Plaisirs pervers (Le miel du diable) : la critique du film (1988)

Thriller, Erotique | 1h23min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Plaisirs pervers, affiche française alternative de Le miel et le diable

  • Réalisateur : Lucio Fulci
  • Acteurs : Brett Halsey, Corinne Cléry, Blanca Marsillach, Stefano Madia
  • Date de sortie: 20 Juil 1988
  • Nationalité : Italien, Espagnol
  • Titre original : Il miele del diavolo
  • Titres alternatifs : Plaisirs pervers (Titre français) / Le Miel du diable (titre français cinéma alternatif), The Devil's Honey (titre international) / Dämon in Seide (Allemagne) / Dangerous Obsession (titre vidéo américain) / La miel del diablo (Espagne) / Divina Obsessão (Brésil)
  • Année de production : 1986
  • Scénariste(s) : Jaime Jesús Balcázar, Lucio Fulci, Ludovica Marineo, Sergio Partou, Vincenzo Salviani
  • Directeur de la photographie : Alejandro Ulloa
  • Compositeur : Claudio Natili
  • Société(s) de production : Selvaggia Film, Producciones Cinematográficas Balcazar
  • Distributeur (1ère sortie) : Eurodis
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : MPM Production (VHS, 1991) / Artus Films (Mediabook, 2021)
  • Date de sortie vidéo : 2 mars 2021 (Mediabook)
  • Paris-périphérie : 5 883 entrées en 3 semaines sous le titre de Plaisirs Pervers
  • Box-office nord-américain -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdit aux moins de 16 ans
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Studio Lapis (affiche italienne)
  • Crédits : Selvaggia Film, Producciones Cinematográficas Balcazar
Note des spectateurs :

Thriller érotique et pervers, Le miel du diable constitue une bonne surprise pour les amateurs de Lucio Fulci dont on retrouve le goût pour les ambiances sombres. A redécouvrir malgré ses évidents défauts.

Synopsis : Une jeune femme séquestre et torture un docteur qu’elle tient pour responsable de la mort de son petit ami.

Le miel du diable, remake d’un film écrit par… Lucio Fulci

Critique : Durant l’année 1985, le cinéaste Lucio Fulci doit lutter contre la maladie qui le gagne peu à peu. Ses problèmes de santé l’éloignent pour la première fois de sa longue et riche carrière des plateaux de cinéma. Pourtant, il signe tout de même le scénario du film L’enchaîné (1985) que réalise finalement Giuseppe Patroni Griffi avec Laura Antonelli. Cette histoire d’une femme qui séquestre chez elle un homme et l’humilie s’éloigne de son genre de prédilection puisqu’il s’agit d’un thriller érotique pervers. Pourtant, alors qu’il est en convalescence, Fulci est appelé par le producteur Vincenzo Salviani pour réaliser Le miel du diable, devenu Plaisirs pervers lors de sa distribution française d’époque. Dès lors, Fulci et Salviani modifient fortement le script initial de Ludovica Marineo pour en faire une sorte de seconde version de L’enchaîné qui s’est bien vendu à l’international.

Le miel du diable, jaquette Mediabook

© 1986 Selvaggia Film – Producciones Cinematográficas Balcazar / © 2020 Artus Films. Tous droits réservés.

Et de fait, le long-métrage a beau se présenter comme un classique film érotique, il s’éloigne très franchement des canons du genre pour embrasser des thématiques bien plus sombres que d’ordinaire, comme si Fulci avait voulu y laisser son empreinte indélébile. En fait, même lorsqu’il doit s’acquitter de quelques scènes de sexe, le réalisateur ne peut s’empêcher de dynamiter les conventions en ajoutant un élément incongru qui rend la séquence éprouvante pour les nerfs. On peut notamment citer l’hallucinante scène de sexe entre la jeune fille et son amant saxophoniste pendant que le chien de la donzelle cherche à pénétrer dans le domicile. Par le jeu d’un découpage alterné, le réalisateur transforme une scène sensuelle en une séquence quasiment horrifique, ou du moins stressante, par l’ajout des aboiements du cabot.

Comment dynamiter une intrigue sentimentale en ajoutant une bonne dose de perversité

En réalité, Fulci dynamite ici une histoire qui aurait pu être mélodramatique en y ajoutant une bonne dose de perversité. Ainsi, le jeune couple idéal formé par Blanca Marsillach et Stefano Madia apparaît peu à peu, par le biais de nombreux flashback, dans sa dimension sadomasochiste. Loin d’être un jeune amant romantique, Johnny (Stefano Madia, donc) est en réalité un sadique qui aime humilier sa jeune partenaire. Elle-même n’a rien d’une oie blanche et consent finalement à se livrer aux pires turpitudes par amour, mais aussi par goût.

Parallèlement, la description du vieux couple au bout du rouleau formé par le vétéran Brett Halsey et Corinne Cléry est davantage marquée par le cliché. Monsieur tente de soigner son impuissance auprès de prostituées, tandis que sa femme se désespère d’être enfin désirée et comblée. Désireuse de venger la mort de son jeune amant lors d’une opération chirurgicale effectuée par Brett Halsey, Blanca Marsillach séquestre le bourgeois impuissant afin de lui faire subir tous les outrages. Cette seconde partie du film déploie tout un arsenal d’humiliations qui ont le mérite de rapprocher les deux personnages, au point de supposer une possible issue positive après un final en points de suspension.

Affiche espagnole de Le miel et le diable de Lucio Fulci

© 1986 Selvaggia Film – Producciones Cinematográficas Balcazar / Visuel : AM2. Tous droits réservés.

Du cinéma bis aussi bancal que séduisant

Marquée par une noirceur manifeste et une volonté de s’écarter des canons traditionnels du film érotique, Le miel du diable est donc une œuvre qui s’inscrit pleinement dans la filmographie torturée du cinéaste. L’ensemble n’est pourtant pas exempt de défauts, notamment au niveau de sa musique très kitsch signée Claudio Natili, de l’interprétation fragile de Blanca Marsillach et de quelques séquences bis outrancières (la scène de sexe avec le saxophone par exemple).

Par contre, le long-métrage bénéficie d’un montage correct, d’une belle prestation de Brett Halsey et Corinne Cléry, ainsi que d’une ambiance générale séduisante pour peu que l’on aime le cinéma bis italien des années 80. Lucio Fulci filme également avec talent les extérieurs vénitiens. Il est un peu moins inspiré sur les intérieurs (tournés à Barcelone) dont les décors trahissent un sérieux manque de moyens. Effectivement, le long-métrage souffre de nombreux stigmates liés aux conditions de tournage de plus en plus compliquées en cette période de déclin du cinéma transalpin.

Un médiabook attendu au mois de mars 2021

Toutefois, loin de démériter, Le miel du diable constitue plutôt une bonne surprise au sein d’une filmographie en déclin. On retrouve ici des thématiques typiques du cinéaste ainsi que des fulgurances qui permettent de faire abstraction de certains choix esthétiques douteux. Nous sommes particulièrement heureux d’apprendre que l’éditeur Artus prévoit de sortir ce titre dans sa magnifique collection Lucio Fulci d’ici le mois de mars 2021. Une excellente initiative dont nous reparlerons forcément le moment venu.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 20 juillet 1988

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Le Miel et le diable, affiche alternative de Plaisirs pervers de Lucio Fulci

© 1986 Selvaggia Film – Producciones Cinematográficas Balcazar. Tous droits réservés.

Box-office :

Sorti sur Paris-Périphérie sous le titre de Plaisirs pervers, le film de Lucio Fulci devait affronter en première semaine Vices et caprices de Tinto Brass que Metropolitan FilmExport avait placé dans 18 salles et en couverture du Pariscope. Deux érotiques italiens le même jour, il fallait l’oser. Et comme en 1986 on osait à peu près tout…

Plaisirs pervers se contente de 6 cinémas en ce milieu d’été que l’on qualifierai de chiche en succès pour le cinéma érotique et pour le cinéma tout court. En gros, c’est la crise.

Le bide historique d‘Emmanuelle 6 de Bruno Zincone, sorti quinze jours auparavant, est un symbole de la déchéance du genre, avec 40 000 badauds en 4 semaines sur P.P. quand le premier volet s’était approché des 3 millions en fin de marathon.

L’étrange Plaisirs pervers, avec son titre aussi impersonnel qu’une affiche de production à caractère pornographique, ce qu’il n’est jamais, se retrouve au George V, au Paramount Opéra, à la Fauvette et au Pathé Clichy, plus deux écrans en périphérie. Il réalisera 3 282 entrées pour son lancement et obtiendra à l’échelle française une 32e place alarmante.

Tinto Brass n’a pas plus de chance. Son esthétisant Vices et caprices déguste à 13 951 spectateurs sur 18 cinémas bien répartis dans la “francilie”.

L’ultime film de Lucio Fulci à être sorti au cinéma en France

En 2e semaine, Le miel du diable chute à 4 cinémas, avec seulement le Paramount Opéra et le George V pour renflouer les caisses parisiennes. Avec 1 713 entrées et un total de 4 985, il est évident que pour sa 3e et dernière semaine d’exploitation, Plaisirs pervers finira dans un cinéma de quartier pour clore son piètre parcours parisien. En l’occurrence, c’est au Paris Ciné, en double programme, qu’il grapille 898 spectateurs mâles et achève ses râles de Plaisirs pervers (ou ceux de son distributeur fauché) à 5 883 clients. American Ninja complète la programmation.

Aenigma étant sorti dans les derniers jours de décembre 1987, Le miel du diable, même s’il a été réalisé plus tôt, sera l’ultime film de Lucio Fulci a connaître une sortie en salle. Son Zombi 3, achevé par Claudio Fragasso, est trop mauvais pour les salles de cinéma et c’est logiquement en VHS qu’on le retrouvera malgré sa programmation au festival du Rex, en juin 1988. Les films qui suivront seront destinés au marché de la vidéo, c’est donc bel et bien au chant du cygne auquel on assiste à Paris cet été là.

La sortie VHS du Miel du diable tardera, chez MPM, faisant pendant un temps de ce Fulci une œuvre rare et peu vue. En 2020, avec le blu-ray All-Zone de chez Severin, la présence de la série B sur différentes plateformes de SVOD, et l’annonce du médiabook somptueux d’Artus, au premier trimestre 2021, le film est devenu parfaitement accessible, mais à réserver aux adultes.

Frédéric Mignard  

Le Miel du diable, le mediabook de Artus

Visuel : Sciotti © 1986 Selvaggia Film – Producciones Cinematográficas Balcazar / © 2020 Artus Films. Tous droits réservés.

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