Mine de rien est une comédie sociale à l’anglaise, à l’écriture soignée et aux personnages attachants.
Synopsis : Dans une région qui fut le fleuron de l’industrie minière, deux chômeurs de longue durée, ont l’idée de construire un parc d’attraction “artisanal” sur une ancienne mine de charbon désaffectée. En sauvant la mine et sa mémoire, ils vont retrouver force et dignité.
Mine de rien, victime collatérale du Covid-19
Critique : Victime du Covid-19 et d’une affiche repoussoir qui ne représente pas la réalité sociale du film, Mine de rien n’a pas eu de chance. Le film est sorti quinze jours avant la fermeture des cinémas. Le distributeur confiant l’avait employé à séduire dans plus de 300 cinémas, mais la première semaine fut bien maigre. Patatras, en seconde huitaine, alors que les spectateurs fuyaient les salles pourtant encore ouvertes, la comédie dégringolait de plus de 70% de sa fréquentation, les Français ayant d’autres soucis en tête que de s’enfermer dans des salles désormais perçues comme à haut risque. Il n’y aura jamais de troisième semaine pour les raisons que vous connaissez.
Une VOD avancée par dérogation exceptionnelle
Une dérogation exceptionnelle plus tard, Orange Studio parvient à sortir le film en VOD un mois et demi après sa furtive distribution dans les cinémas. Une aubaine exceptionnelle pour cette comédie qui, si elle avait été mieux vendue et était sortie dans des conditions autres, aurait eu un vrai potentiel pour séduire le public sur la durée. Pourquoi sur la durée ? Car Mine de rien n’appartient pas aux productions évidentes à vendre (pas de stars bankable, un sujet qui n’est pas des plus avenants pour attirer les foules…), mais plutôt à celles qui plaisent vraiment quand on fait l’effort de les découvrir. Son Prix du Public à l’Alpe d’Huez en était un signe, les critiques favorables qui accompagnaient sa sortie également. Par ailleurs, cette comédie de chômeurs qui essaient de sauver leur dignité en essayant de transformer une ancienne mine en parc d’attractions de système B, appartient à ces œuvres sur une France de laissés-pour-compte qui travaille par le bouche à oreille, celui des régions, et qui finissent toujours avec un coefficient Paris Province très élevé.
Les gueules noires contre-attaquent
Mine de rien avec ses descendants des gueules noires, à la recherche d’une légitimité professionnelle et humaine dans un monde globalisé qui veut jusqu’à effacer leur patrimoine, s’intéresse aux problématiques locales qui ne sont de celles qui génèrent le buzz internet, ce dernier se focalisant sur des produits plus urbains, aux budgets autres (l’investissement de 2.3M d’euros de Mine de rien était très bas et aurait pu se rentabiliser très vite en salle).
Coup d’essai réussi pour Mathias Mlekuz à la réalisation
L’acteur de seconds rôles Mathias Mlekuz réussit largement son essai en passant à la réalisation de long, car, faute d’une réalisation et une technicité exemplaires, il démontre ce que l’on attend de ce type de programme, une compréhension fine du genre humain. Sa peinture d’un microcosme social, familial et économique, relève d’une analyse ethnologique belle et humaine, celle de la région du Nord, avec ses paysages endoloris par la misère d’un monde industriel qui a trépassé, laissant derrière lui le désespoir et le sentiment angoissant de ne pas être adapté au nouveau monde vendu par les politiques des nouvelles générations…
Dans la tradition du cinéma social britannique
En s’attachant au genre de la comédie (légèrement dramatique) à la Full Monty, Les Virtuoses et autre Billy Elliot, Mlekuz sillonne le genre du feel good movie britannique où le regard social n’est jamais troublé par le ton humoristique et la réalité dépressive de personnages paumés et/ou excentriques. C’est parce que l’auteur s’imprègne de ce que l’humain peut offrir de plus bon dans sa générosité, par le prisme d’acteurs solides et surtout attachants (Ducret, Rebbot, Rufus, la découverte Marianne Garcia, déjà aperçue dans Les invisibles en 2019…).
Au final, ce premier long métrage ne paie pas de mine derrière son affiche publicitaire ringarde, mais il peut espérer un succès VOD et télévisuel si les téléspectateurs comprennent que cette œuvre au militantisme doux et jamais orgueilleux leur mettra du baume au cœur en ces temps de confinement, et ce sans pour autant abêtir. En cela réside toute la noblesse du bon divertissement.