Limbo : la critique du film de Soi Cheang (2023)

Thriller | 1h58min
Note de la rédaction :
7/10
7
Affiche de Limbo de Soi Cheang

  • Réalisateur : Soi Cheang
  • Acteurs : Gordon Lam (Lam Ka-tung)
  • Date de sortie: 12 Juil 2023
  • Année de production : 2021
  • Nationalité : Hong-kongais, Chinois
  • Titre original : Zhi chi / 智齒 (Mandarin)
  • Titres alternatifs :
  • Autres acteurs : Yase Liu, Mason Lee, Hiroyuki Ikeuchi
  • Scénaristes : Kin-Yee Au, Kwan-Sin Shum
  • D'après le roman : The Wisdom Tooth de Lei Mi
  • Monteur : David M. Richardson
  • Directeur de la photographie : Siu-Keung Cheng
  • Compositeur : Kenji Kawai
  • Chef décorateur : Kwok-Keung Mak
  • Producteurs : Paco Wong, Wilson Yip, en coproduction avec Defu Jiang, Man-Hong Tong, Kevn Tse
  • Producteur exécutif : Alex Dong
  • Sociétés de production : Sun Entertainment Culture, en coproduction avec Bona Film Group, Er Dong Pictures - Beijing
  • Distributeur : Kinovista
  • Distributeur reprise :
  • Date de sortie reprise :
  • Editeur vidéo :
  • Date de sortie vidéo :
  • Budget :
  • Box-office France / Paris-Périphérie :
  • Box-office nord-américain / monde :
  • Rentabilité :
  • Classification : Interdit aux moins de 16 ans
  • Formats : 2.39 : 1 / Noir et blanc (DCP) / Dolby Digital 5.1
  • Festivals : Lyon Festival Hallucinations Collectives (2023), Reims Polar Festival du Film Policier (2023), Berlin International Film Festival (2021), Udine Far East Film Festival (2021), New York Asian Film Festival (2021), Fantastic Fest, Austin (2021), Tokyo International Film Festival (2021), London East Asia Film Festival (2021), Stockholm International Film Festival (2021), L'Étrange Festival (2021), Hong Kong International Film Festival (2023),
  • Nominations : 13 nominations au Golden Horse Film Festival, 4 nominations aux Asian Film Awards 2021
  • Récompenses : 3 prix au Golden Horse Film Festival (Décors, Photo, Scénario adapté), Meilleure photo au Festival de Sitgès (2021), Prix du meilleur son et du meilleur décorateur (Asian Film Awards 2021), 2 prix au Hong Kong Film Critics Society Awards (2022), Grand Prix et Prix de la critique au Reims Polar Festival du Film Policier (2023)
  • Illustrateur/Création graphique : © Les Aliens.com. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse : Aude Dobuzinskis, Jean-François Gaye (Dark Star)
  • Tagline : "Le polar de l'année" (Citation Première)
Note des spectateurs :

La violence faite aux femmes érigée en art visuel et expérience esthétique, Limbo de Soi Cheang est une œuvre forte, radicale et brillante.

Synopsis : Dans les bas-fonds de Hong-Kong, un flic vétéran et son jeune supérieur doivent faire équipe pour arrêter un tueur qui s’attaque aux femmes, laissant leur main coupée pour seule signature. Quand toutes leurs pistes s’essoufflent, ils décident d’utiliser une jeune délinquante comme appât.

Critique : Virtuose, pugnace, sans concession. Limbo a marqué les festivals de la planète de par sa noirceur radicale. Depuis l’Etrange Festival en France ou le Festival de Sitgès en Espagne, en 2021, jusqu’à Reims Polar ou les Hallucinations Collectives, en 2023, c’est dans les manifestations dédiées au cinéma de genre que ce film de prodige, éminemment visuel et sensoriel, a surtout fait son chemin, glanant de nombreux prix sur son passage et une glaçante réputation de shocker.

Cette adaptation d’un roman chinois de Lei Mi n’est, dans sa narration, que peu originale au premier abord. Deux flics de générations, parcours de vie, et méthodes totalement antagonistes, enquêtent sur des meurtres commis sur des femmes, avec barbarie. Le thriller a le puanteur qui suinte la déviance et l’ambiance qui plombe la dopamine estivale. Une caractéristique empruntée aux thrillers des années 90 : Limbo plonge le spectateur dans les limbes de l’humanité, les tréfonds de l’âme et la bestialité humaine, comme en son temps Le silence des Agneaux de Jonathan Demme (1991).

Limbo de Soi Cheang expose le thriller urbain à la démence

Le film de Soi Cheang (la trilogie de blockbusters chinois The Monkey King aux centaines de millions de dollars de recettes) possède toutefois de nombreux atouts qui le distinguent du tout venant des ersatz post-Seven (le nihilisme du classique fondateur de David Fincher est présent à bien des strates de cette enquête poisseuse dans la barbarie). Sa photographie glauque, mais pourtant esthétique, met en lumière les ténèbres d’une mégalopole déliquescente, où la crasse a englouti la zone périphérique de ses déchets. Un macrocosme d’ordures où la monstruosité frappe avec ignominie.

L’ambiance évoque parfois le Mad God de Phil Tippett. Les deux œuvres sont des expériences dans l’horreur, le jusqu’au-boutisme d’auteurs visionnaires et la perversion artistique qui comble la rétine dans la pestilence. Le sujet est lui bien différent. Son urbanisme et son architecture d’anticipation, celle d’une dégénérescence sociétale qui sert de matrice, évoque le Hong Kong du cinéaste, mais aussi l’inhumanité d’une Chine post-industrielle, ou le Japon dantesque des mangas désenchantés. La peinture de maître se fait l’écho d’une misogynie rampante abjecte, une marchandisation de l’humain abasourdi quand l’empathie n’est plus, la déchéance de l’individu écrasé dans le mouroir capitaliste, l’oppression intrinsèque du peuple qui étouffe dans un océan d’excréments.

Un thriller en noir et blanc d’une violence inouïe

Brillant dans la forme, son montage, et sa capacité à faire du décor l’objet d’un éblouissement, loin des surcouches numériques, Limbo fait mal. Trop probablement, à une époque aseptisée dans le rapport aux femmes. Ici, la femme, délinquante, droguée… est une victime qui encaisse une violence insoutenable, jusque dans son traitement par la police pour des raisons développées par l’auteur. Le seuil de la souffrance retranscrit à l’écran ne passe pas toujours. Une scène de viol est particulièrement difficilement supportable, en particulier en 2023, dans une société qui a justement érigé la violence faite aux femmes comme une cause nationale.

Nous ne voulons plus voir l’insupportable, même pour témoigner contre. Or, Limbo le terrible maltraite le spectateur insidieusement, jusqu’à un final paroxysmique qui arrache un peu plus d’horreur au malaise. C’est inouï, mais brillant. C’est surtout interdit aux moins de 16 ans. Aisément.

Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 12 juillet 2023

Affiche de Limbo de Soi Cheang

Affiche créée par © Les Aliens.com

Tags :

Les films en noir et blanc, Les violences policières au cinéma, Reims Polar 2023, Choc, Cinéma chinois, Cinéma hongkongais, Trash, Thriller asiatique

Trailers & Vidéos

trailers
x
Affiche de Limbo de Soi Cheang

Bande-annonce de Limbo

Thriller

x