Plus violent et érotique que les précédents films Hammer, Les cicatrices de Dracula constitue un petit plaisir coupable, et ceci malgré ses nombreux défauts liés à un scénario paresseux et des acteurs peu charismatiques.
Synopsis : Furieux des méfaits du comte Dracula, les villageois ont brûlé son château. Mais le monstre, toujours vivant, est bien décidé à leur donner une leçon.
La Hammer en pleine tourmente budgétaire
Critique : Au début des années 70, la société de production britannique Hammer traverse une période difficile. Effectivement, le producteur James Carreras fait l’unanimité contre lui auprès de ses traditionnels partenaires américains de la Warner Bros. Carreras perd donc une grande partie du financement de ses productions et doit se résoudre à passer un accord avec la firme EMI. Présenté comme un avantage puisque les produits Hammer sont désormais à 100 % anglais, cet accord entraîne surtout une baisse drastique des budgets qui ne dépassent plus les 200 000 livres sterling par film.
© 1970 Hammer Film Productions Ltd – Tous Droits Réservés
Ces restrictions vont progressivement se voir à l’écran, avec l’exploitation des mêmes décors dans des œuvres différentes, mais aussi par la pauvreté de certains effets spéciaux. Les cicatrices de Dracula est la première victime de ce mauvais deal, avec son script au rabais signé Anthony Hinds et ses effets mécaniques peu convaincants, parmi lequel on compte une chauve-souris peu véloce qui fait bien rire (ou pleurer selon).
Un scénario paresseux qui reprend les grandes lignes du roman de Bram Stoker
On peut notamment regretter que le scénario ne soit finalement qu’une énième variation autour du roman de Bram Stoker. Les auteurs ne cherchent même plus à expliquer le retour à la vie du célèbre vampire, ni même d’ailleurs sa mort précipitée en fin de métrage. Cette indigence se voit également dans le traitement des personnages qui ne présentent guère de cohérence psychologique, ni même de substance.
Il faut dire que le long-métrage souffre d’un casting particulièrement médiocre. Les deux frères incarnés platement par Dennis Waterman et Christopher Matthews n’ont absolument aucun charisme. Les personnages féminins ne sont guère mieux servis puisqu’ils ne sont là que pour succomber aux crocs acérés de l’immonde Dracula. Finalement, il n’y a que les vieux routiers de la firme qui s’en sortent correctement. On peut ainsi évoquer la bonne tenue de l’interprétation de Michael Gwynn ou encore Michael Ripper.
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Christopher Lee, toujours impérial, sauve les meubles
Mais celui qui demeure impérial dans le rôle-titre, c’est bien évidemment Christopher Lee. Même si celui-ci s’est plaint par la suite des défauts du film, il n’en demeure pas moins un pilier solide au sein d’un édifice un peu fragile. A la fois terriblement inquiétant, délicieusement séduisant et finalement très animal derrière son allure aristocratique, l’acteur incarne à la perfection ce personnage qu’il connaît alors sur le bout des canines. Il est pour beaucoup dans le plaisir ressenti durant la projection.
Sans doute conscient des limites du script qu’il doit illustrer, Roy Ward Baker a poussé les curseurs de la violence et de l’érotisme bien plus loin que d’habitude. Il a ainsi amené la Hammer vers moins de finesse, mais davantage de perversité. Les quelques passages violents s’avèrent particulièrement sanglants, voire même légèrement gore, tandis que l’érotisme est nettement plus prononcé.
Des excès de violence et d’érotisme qui fleurent bon le cinéma d’exploitation
Ce sont d’ailleurs ces excès qui rendent Les cicatrices de Dracula sympathique aux yeux des fans du genre horrifique. Il compte parmi les films les plus outrageusement violents de la firme et constitue donc un petit plaisir coupable, ceci dans les limites évoquées précédemment. A sa sortie, le long-métrage a réussi à réunir 426 972 spectateurs français, ce qui est plutôt un bon score à une époque où le fantastique gothique est en train d’agoniser.
Critique de Virgile Dumez
Les films de la Hammer
Les sorties de la semaine du 28 juillet 1971
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