L’emprise des ténèbres : la critique du film (1988)

Epouvante-Horreur, Aventures | 1h38min
Note de la rédaction :
6/10
6
L'emprise des ténèbres, l'affiche

  • Réalisateur : Wes Craven
  • Acteurs : Bill Pullman, Cathy Tyson, Zakes Mokae, Paul Winfield, Brent Jennings, Michael Gough
  • Date de sortie: 11 Mai 1988
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : The Serpent and the Rainbow
  • Distributeur : United International Pictures (UIP)
  • Éditeur vidéo : CIC (VHS) / Wild Side Vidéo (Blu-ray)
  • Sortie vidéo (blu-ray) : Le 8 mars 2019
  • Box-office France / Paris-périphérie : 134 139 entrées / 32 101 entrées
  • Box-office USA : 19,5 M$
  • Budget : 7 M$
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans
Note des spectateurs :

Assurément ambitieux, L’emprise des ténèbres bénéficie d’une première heure intéressante au contenu politique d’une belle pertinence. La dernière demi-heure, massacrée par les producteurs, tempère malheureusement notre enthousiasme.

Synopsis : Dennis Alan, un jeune anthropologue, est envoyé en mission dans une clinique à Haïti pour rencontrer un patient diagnostiqué mort et enterré quelques années plus tôt. Arrivé sur l’île, Alan apprend l’existence d’une mystérieuse poudre vaudou capable de plonger un homme dans une mort artificielle. Son enquête le met bientôt aux prises avec les Tontons Macoutes, des miliciens paramilitaires qui utilisent cette drogue pour éliminer les opposants politiques au régime. Menacé de mort, Alan tente de récupérer la recette du poison avant de repartir pour Boston. Mais, ensorcelé par ses ennemis, il ne tarde pas à sombrer dans un univers de magie noire, où se mêlent hallucinations, cauchemars et réalité.

Un projet ambitieux durant la première heure

Critique : Après le triomphe rencontré par Les griffes de la nuit (1984), le réalisateur Wes Craven se sent quelque peu enfermé dans un genre dont il aimerait parfois s’affranchir. Ainsi, il a conçu L’amie mortelle (1986) comme une comédie romantique fantastique, avant qu’on ne le contraigne à insérer des éléments horrifiques. Même son de cloche avec L’emprise des ténèbres (1988) qui ne devait être au départ que l’illustration d’un livre scientifique sur le vaudou écrit par Wade Davis, tout en évoquant la chute du dictateur Duvalier en Haïti.

Conçu initialement pour devenir le grand film politique de Wes Craven, à l’image des œuvres ambitieuses et très cotées de John Boorman, Peter Weir et autres Roland Joffé, le long-métrage devait bien contenir quelques éléments fantastiques, mais sans que cela ne dérive vers l’horreur. Craven comptait donc bien livrer ici son œuvre la plus ambitieuse et aboutie, démontrant au passage son implication citoyenne, en dénonçant notamment les terribles méfaits d’une dictature.

Des séquences saisissantes au service d’une histoire engagée

Et de fait, le cinéaste parvient à ses fins, du moins durant la première heure du film. En suivant les pas d’un scientifique chargé d’identifier une drogue en Haïti qui semble avoir la vertu de ressusciter les morts, le cinéaste livre ici un film d’aventures parcouru de fulgurances étonnantes. Largement inspiré des délires fantasmatiques d’un John Boorman dans La forêt d’émeraude (1985), Craven insère dans son histoire des passages hallucinatoires qui saisissent le spectateur par leur puissance d’évocation (on citera notamment la chute du héros dans un puits de terre infesté de morts, ou encore sa confrontation avec un serpent vindicatif).

L'emprise des ténèbres, le visuel du coffret collector Wild Side

© 1987 Serpent And The Rainbow Productions Inc. / Conception graphique : Wild Side Vidéo. Tous droits réservés.

Mais ce qui fait la force de L’emprise des ténèbres vient de l’imbrication de ces éléments fantastiques liés au culte vaudou et la dénonciation de la dictature des Duvalier en Haïti. Le mélange des deux est savamment orchestré et finalement très pertinent lorsque l’on sait que les dictateurs (le père, puis le fils) se sont appuyés sur les superstitions locales pour affirmer leur pouvoir. Ils se sont notamment fait passer pour des hougan, c’est-à-dire des chefs spirituels de la religion vaudou.

Craven s’engage en tant que citoyen du monde

Wes Craven dénonce également les exactions des milices privées appelées les Tontons macoutes qui ont torturé et massacré des milliers de personnes en Haïti durant les nombreuses décennies de cette terrible dictature. Rappelons que les Duvalier ont longtemps été soutenus par les Etats-Unis, car ils se déclaraient anticommunistes, ce qui plaisait à l’administration américaine, alors obsédée par la guerre froide.

Tous ces éléments sont donc traités avec beaucoup de sérieux durant la première heure du métrage, avant que Wes Craven n’opère un revirement bien moins pertinent. Poussé par les producteurs à la suite de projections-test catastrophiques, le réalisateur a été contraint une fois de plus de transformer son projet initial pour en faire un produit plus vendeur.

Sortie de route incontrôlée au bout d’une heure

La dernière demi-heure fait donc du chef Tonton macoute un sorcier qui peut hanter les rêves et cauchemars des personnages (Freddy ! Sors de ce film !). Si le long-métrage ne part pas totalement en vrille, il se réoriente vers un fantastique moins élaboré et parfois ridicule. Wes Craven succombe alors à tous les clichés qu’il avait évités jusque-là, notamment lors de l’affrontement final entre Bill Pullman et le sorcier vaudou.

Alors que le film pouvait aisément s’inscrire parmi les meilleurs travaux du réalisateur, cette dernière partie vient ruiner une grande part de ses efforts. C’est d’autant plus dommage que la plupart des acteurs tiennent la route et s’avèrent crédibles (Bill Pullman était encore inconnu et s’acquitte correctement de sa tâche). La réalisation regorge d’excellentes idées, tandis que la partition musicale de Brad Fiedel est d’une belle efficacité.

Petit succès aux States, bide en France

Petit succès aux Etats-Unis, L’emprise des ténèbres n’a pas connu le même sort en France où il est sorti dans l’indifférence générale, en pleine crise du cinéma. Avec seulement 134 139 entrées sur la France entière, le long-métrage a donc été un cuisant échec dans nos contrées, se hissant à peine au-dessus de L’amie mortelle, autre contre-performance du cinéaste en France.

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Critique : Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 11 mai 1988

L'emprise des ténèbres, l'affiche

© 1987 Serpent And The Rainbow Productions Inc. Tous droits réservés.

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