La vie est un long fleuve tranquille : la critique du film (1988)

Comédie | 1h30min
Note de la rédaction :
7/10
7
La vie est un long fleuve tranquille, l'affiche

Note des spectateurs :

Grâce à un ton sarcastique accrocheur et des acteurs formidables, La vie est un long fleuve tranquille est une comédie savoureuse bien qu’inégale. Son énorme succès est bien mérité.

Synopsis : Dans une petite ville du nord de la France, deux familles nombreuses, les Le Quesnoy et les Groseille, d’origines bien différentes, n’auraient jamais du se rencontrer. Mais c’était sans compter sur Josette, l’infirmière dévouée du docteur Mavial, amoureuse et lasse d’attendre qu’il quitte sa femme. Dans un moment d’égarement la douce infirmière a échangé deux nouveau-nés, un Groseille (les pauvres) contre un Le Quesnoy (les riches), pour se venger de la vie et du docteur. Comprenant que Mavial ne l’épousera jamais, elle révèle le-pot-aux roses aux deux familles…

Marie-Chantal Vs. Bidochons

Critique : Au cours des années 80, le réalisateur Etienne Chatiliez se distingue par une série de spots publicitaires drolatiques qui attirent l’attention sur lui. Il décide de passer à la vitesse supérieure en 1987 où il écrit avec sa complice Florence Quentin le scénario de La vie est un long fleuve tranquille. Les deux compères osent employer un ton sarcastique assez peu courant dans la comédie française d’alors, plus portée sur la gaudriole et le vaudeville. Leur script se fonde essentiellement sur une caricaturale opposition des classes sociales, avec d’un côté les pauvres et de l’autre la petite bourgeoisie catholique traditionnelle.

Toutefois, les auteurs parviennent à échapper à un excès de caricature grâce à un ton mi-complice, mi-critique qui se fonde essentiellement sur une observation très juste du quotidien. Ainsi, ils ne prennent aucunement parti pour un camp ou un autre. Porté par une revigorante misanthropie, le film égratigne les deux classes sociales. Ainsi, les pauvres sont des Bidochons sales, bêtes et méchants qui cherchent systématiquement à arnaquer le système. De l’autre côté, les bourgeois dissimulent habilement leur haine de classe derrière un argumentaire social hypocrite symbolisé par leur attachement au catholicisme. Finalement, les positions habituelles des deux côtés seront malmenées par la découverte de l’échange des bébés à la maternité.

Une accumulation de répliques devenues cultes

Si le point de départ est particulièrement habile, notamment dans ce qu’il révèle de l’acquis et de l’inné, cela ne débouche que sur une classique remise en cause de l’ordre établi. La fin du film, en forme de point d’interrogation, est en cela quelque peu décevante. En attendant, La vie est un long fleuve tranquille a atteint son but premier, nous faire rire, tout en grinçant des dents. On ne compte plus les passages devenus cultes avec le temps, comme l’expression C’est lundi, c’est ravioli ou encore la chanson Jésus reviens entonnée par Patrick Bouchitey lors de la fête paroissiale.

L’impact du long-métrage n’aurait pas été si important sans la contribution essentielle d’un casting formidable. A l’époque, seul Daniel Gélin était un acteur connu, la plupart des autres venant du théâtre. Ainsi, le triomphe du film a permis de lancer les carrières cinématographiques d’Hélène Vincent, d’André Wilms et de Catherine Jacob. Parmi les 1600 enfants vus lors de la phase de casting, Etienne Chatiliez a eu le nez fin en donnant le rôle du petit Momo à l’excellent Benoît Magimel. Celui-ci allait ensuite continuer une bien belle carrière au cinéma. Il est ici d’un naturel impressionnant, aussi crédible en petit sauvageon qu’en élève modèle une fois qu’il change de milieu social.

Succès inattendu en pleine crise du cinéma

Alors que la crise du cinéma débutait, La vie est un long fleuve tranquille fait figure de rescapé puisque la comédie s’est hissée à la quatrième place du box-office national avec plus de 4 millions d’entrées, alors qu’elle ne possédait aucune tête d’affiche. Un phénomène confirmé par les trois autres gros succès de l’année (Le grand bleu, L’ours et Qui veut la peau de Roger Rabbit ? ne sont pas portées par des stars). Ce magnifique succès, aussi bien critique que public, a permis au film de concourir aux César 1989 et de remporter quatre statuettes. Etienne Chatiliez et Florence Quentin ont ainsi été récompensés pour le scénario, mais aussi pour la meilleure première œuvre. Le reste a été attribué aux actrices, notamment Hélène Vincent en meilleur second rôle féminin et Catherine Jacob en meilleur jeune espoir féminin.

Un ensemble plutôt mérité pour une comédie un peu inégale, mais globalement savoureuse. Le cinéaste allait confirmer deux ans plus tard avec son meilleur film à ce jour, à savoir Tatie Danielle. La suite serait bien moins brillante.

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Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 3 février 1988

La vie est un long fleuve tranquille, l'affiche

© 1988 MK2 Productions – Téléma – France 3 Cinéma. Tous droits réservés.

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