La vallée de la peur : la critique du film et le test DVD (1948)

Western | 1h41min
Note de la rédaction :
8/10
8
La vallée de la peur - affiche reprise

  • Réalisateur : Raoul Walsh
  • Acteurs : Robert Mitchum, Teresa Wright, Judith Anderson
  • Date de sortie: 13 Oct 1948
  • Nationalité : Américain
  • Distributeur : Warner Bros (1948), Swashbuckler Films (reprise le 14 octobre 2015)
  • Éditeur vidéo : Sidonis Calysta
  • Date de sortie vidéo : 25 mai 2019
  • Box-office France / Paris-périphérie : 1 223 070 entrées / 229 230 entrées
  • Titre original : Pursued
Note des spectateurs :

La Vallée de la Peur repose sur un scénario complexe et dramatique, mais la réalisation de Walsh le rend limpide et alerte, l’approfondit avec verve.

Synopsis : Territoire du Nouveau-Mexique, au début du XXe siècle, Medora Callum recueille Jeb Rand, un jeune enfant dont le père vient d’être assassiné, et l’élève avec ses deux propres enfants, Thorley, alors âgée de trois ans, et Adam, quatre ans. Ceux-ci devenus adultes, elle veut partager ses biens en trois parts égales, ce qui provoque avec Adam, qui a toujours considéré Jeb comme un intrus, un conflit, exacerbé par la naissance de relations amoureuses entre Thorley et Jeb…

Un grand western noir de Raoul Walsh

Critique : Dans la longue carrière de Walsh figurent quelques westerns, pas tous géniaux, mais qui comportent suffisamment de grandes réussites pour qu’on s’y attarde, parmi lesquels son chef-d’œuvre, La Charge fantastique, évocation superbe et historiquement très libre des faits d’armes de Custer. Moins connu, mais passionnant, La vallée de la peur est un film atypique, aussi taraudé par le noir que par la tragédie et mâtiné de psychanalyse : famille déchirée, rêve obsédant, secret enfoui, malédiction, culpabilité, le tout emballé avec la légendaire efficacité de Walsh.

L’intrigue en est complexe, calquée sur le modèle noir : un flash-back explicatif forme l’essentiel du métrage, et on ne peut s’empêcher de penser aux Tueurs de Siodmak, réalisé un an plus tôt. Jeb raconte donc son histoire à la femme qu’il aime, histoire qu’elle connaît d’ailleurs en grande partie. Ses parents assassinés, il a été recueilli par la mère de Thor et Adam. La rivalité entre les deux garçons s’exacerbent jusqu’à ce que Jeb tue Adam en légitime défense. Cela nous vaut, entre autres, la magnifique séquence dans laquelle Adam suit Jeb dans la profondeur de champ, mais aussi la truculente discussion du « jury » chargé d’évaluer la culpabilité de ce dernier. Bien que la tonalité soit grave, voire par moments très légèrement grandiloquente, Walsh ponctue d’un humour discret ce qui s’avère bientôt une tragédie de la vengeance : Callum, le méchant énigmatique, veut se venger de Jeb, tout comme Thor qui va jusqu’à l’épouser pour le tromper ; là encore un très beau passage conduit du mariage misérable à la résolution du conflit entre les époux : économie, splendeur des plans, jeux d’ombres et de lumières, montage rapide, tout est impeccable. La survenue des tueurs et la fuite de Jeb est elle aussi un modèle de concision et de lisibilité.

Des acteurs au firmament

Le scénario est fortement charpenté par divers échos (Jeb tue deux fois en légitime défense, et des motifs tels que le pile ou face, la boite à musique, le vin, forment une assise solide), par de discrètes ironies (la mère d’Adam souhaite que jamais la famille ne soit séparée, le casino s’appelle La Roue honnête, alors qu’on voit le patron tricher), mais aussi par des péripéties qui s’enchaînent à un rythme bondissant. Certes, la fin rappelle à quel point Hollywood a toujours simplifié la psychanalyse, mais la cohérence d’un récit particulièrement habile, servi par des acteurs au sommet (si Robert Mitchum ne saurait être mauvais, son entourage ne démérite pas), force le respect. Il faut dire que ce scénario est écrit par Niven Busch, qui signa celui de Le facteur sonne toujours deux fois et écrivit le roman à l’origine de Duel au Soleil.

Mais les admirateurs de Walsh souligneront sa mise en scène soignée, sa vivacité permanente, ses images marquantes, qui impriment au film une esthétique particulière : il privilégie les passages nocturnes, jouant sur les nuances d’ombres pour mieux figurer des personnages envahis par une obscurité grandissante. Symboliquement, au moment où Thor veut tuer Jeb, il intensifie la lumière pour ne pas qu’elle le rate ; la mère en fait de même pour comprendre ce que trame sa fille. Ainsi le parcours de Jeb est-il marqué par la nuit (la nuit originelle, celle du souvenir manquant) et s’achemine-t-il vers la clarté du jour, de la mémoire retrouvée, du conflit résolu et de l’amour réciproque. Toute la simplicité classique s’affiche ici, dans ce film solide, infiniment plaisant, et qui se suit avidement.

 

Critique : François Bonini

 

Edition blu-ray La Vallee de la peur 2019 chez Sidonis

Copyrights : Sidonis

 

Le test blu-ray

Suppléments : non noté

Le coffret propose en bonus les deux habituelles présentations de Bertrand Tavernier et Patrick Brion, un documentaire et un livre sur Walsh. Mais nous n’avons reçu que le film.

Image : 4 / 5

Vu l’âge du film, on est agréablement surpris par une copie propre, lisse et plutôt bien définie, même si le noir et blanc manque de tranchant et s’avère souvent grisâtre. Reste une image qui, malgré la faiblesse toute relative de ses contrastes, a bénéficié d’une magnifique restauration.

Son : 4 / 5

Là encore c’est par sa propreté que la piste  en version originale (DTS-HD 2.0) se caractérise. On pourra trouver que les dialogues sont un peu étouffés, que la musique manque de profondeur, mais ce sont des vétilles ; la VF a une fois de plus mal vieilli.

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La vallée de la peur - affiche reprise

Copyrights : Warner Bros Entertainment / Swashbuckler Films

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