La France interdite est un mondo du terroir navrant qui investit les perversités françaises. De l’ethnologie des égouts propulsée par le succès inespéré de L’Amérique interdite en 1982.
Synopsis : Ce film présente une suite de séquences où l’insolite, le burlesque, le délirant et l’interdit se côtoient allègrement. Il s’agit de : Paris vu d’hélicoptère, le look dément de la mode, Peep-show à Pigalle, les nuits du Bois de Boulogne, paris homo et lesbien, le dernier fauconnier de France, les loubards de Nanterre, le collectionneur de vieilles voitures, les apprenties comédiennes “X”, les derniers cathares, le chasseur de démons, les femmes musclées, les saunas et bars cuir, expériences et rites de sorcellerie d’aujourd’hui, Saint-Tropez, les adeptes de la fessée, la Baie du Mont Saint-Michel en hélicoptère.
Critique : Sorti un 20 juin 1984, chez les Films de la Rochelle, La France interdite est l’un des derniers mondos à avoir été distribué sur notre territoire, quelques mois avant Shocking Asia (été 1984), Saint-Tropez Interdit (août 1985), Les Interdits du monde (janvier 1986) et Carré Blanc (février 1986). Cela sera d’ailleurs également l’un des derniers succès du genre.
Produit par la société de Benjamin Simon ATC 3000, La France interdite a été réalisé par trois potos qui œuvreront sur la série maison Joy, dont Gilles Delannoy, futur coréalisateur de Carré Blanc, d’Isabelle Pierson et Michel Campioli, mais surtout l’écrivain Jean-Pierre Imbrohoris qui est ni plus ni moins que le créateur de la série littéraire Joy, Joy Laurey en personne. Pendant 6 mois de tournage, les trois hommes se sont amusés à faire le tour de lieux cocasses pour partir à la rencontre des initiés aux perversions tordues des années 80.
Le mondo, vices pointés, perversité publique
Surfant sur la vague des documentaires sociologiques, à caractère érotique, qui inondaient les salles de l’époque (L’Amérique Interdite en 1982 avait dépassé le million d’entrées), ce film d’exploitation pur, voyeur, fauché et indéniablement mauvais, ravivait un genre très populaire dans les années 60 avec des titres porteurs comme L’Amérique insolite (1960), Mondo Cane (1962), Paris secret* (1965), Jeunesse interdite (1968) et Paris Top Secret* (1969). On notera que les deux productions de Pierre Roustang (*) sont parues en DVD et blu-ray, chez Gaumont, dans les années 2020, démontrant la curiosité persistante autour de ces produits indéniablement étonnants, mais datés qui peuvent éventuellement informer sur les mœurs et pratiques d’une époque révolue.
Une scène de bordel gay cause le souk chez les censeurs
La France Interdite qui est resté près de trois mois à l’affiche, à Paris, en 1984, fait lui-même l’objet d’un culte auprès des amateurs de nanars, au moins pour le final affichant la châtelaine Brigitte Lahaie chevauchant nue, le pied fermement à l’étrier son étalon. Elle n’est pas créditée au générique, mais l’ancienne actrice de X est clairement reconnaissable lors de cette scène improbable qui conclut la quête du bidon par ce même vide caractérisé, où la femme est indéniablement rabaissée au statut de jument à monter.
On assiste sidéré à des scènes de peep-show peu émoustillantes, à un casting porno so lesbos, à un délire homo crade à plusieurs, dans un bordel gay, qui a valu au film de lourds problèmes de censures en 1984, à des scènes de sado-masochisme crues, et même à la vie des dresseurs d’aigles (cherchez l’intrus).
Au final, le chocumentaire est un catalogue de toutes les déviances d’une époque qui aimait bien épier et fantasmer, moins de la salle obscure du cinéma de quartier, en perte de vitesse, qu’à la télévision, sur Canal+ et en VHS. En VOD, le film tournera bien également dès les années 2010.
La France interdite, un petit succès au box-office et un nanar pour gourmets
La bande-originale faite de disco cheap est par ailleurs disponible. Gilbert Montagné aurait officié au clavier, et André Georget, collaborateur de Bashung, a dirigé tout ce beau monde, en s’appropriant les bons sons électroniques de son époque. Même que tout est disponible sur certaines plateformes de streaming, dont YouTube.
Avec 3 499 entrées le jour de sa sortie sur Paris, le pâté de campagne est arrivé en tête des 14 sorties de la semaine. Il est partagé par 27 000 parisiens dans 17 salles dont le Max Linder. En 2e semaine, programmé dans 14 salles, principalement sur le circuit Paramount (8 Paramount), il retient l’attention de 18 000 parisiens supplémentaires et reste à l’affiche pendant tout l’été, au même titre que le mondo Shocking Asia qui trouve lui aussi sa place dans les cinémas durant ces grandes vacances de franchouille et de système D.
Box-office Paris-Périphérie de La France interdite
- 27 466 entrées (17 salles)
- 18 248 entrées (14 salles)
- 6 268 entrées (4 salles)
- 6 398 entrées (4 salles)
- 4 658 entrées (4 salles)
- 2 636 entrées (3 salles)
- 4 511 entrées (3 salles)
- 5 285 entrées (3 salles)
- 1 142 entrées (1 salle)
- 1 934 entrées (3 salles)
- ?
- 1 188 entrées (1 salle)
- 943 entrées (1 salle)
Les sorties de la semaine du 20 juin 1984
Affiche © Jouineau Bourduge. © ATC 3000 1984. Tous droits réservés.
Mots clés :
Mondo, René Chateau, Sexploitation, Exploitation, Les transexuels au cinéma