Kirill Serebrennikov, après Leto et La Fièvre de Petrov, revient en compétition à Cannes, où la Russie n’a pas été boycottée. La présence de La femme de Tchaïkovski crée donc la polémique, occultant ainsi le sujet même du biopic passionnel.
Synopsis : Russie, 19ème siècle. Antonina Miliukova, jeune femme aisée et brillante, épouse le compositeur Piotr Tchaïkovski. Mais l’amour qu’elle lui porte tourne à l’obsession et la jeune femme est violemment rejetée. Consumée par ses sentiments, Antonina accepte de tout endurer pour rester auprès de lui.
Le film : Dans le contexte de la guerre en Ukraine, agressée dans sa chair par la Russie, la présence de La femme de Tchaïkovski en compétition sur la Croisette prend forcément un tour politique et polémique. L’appel au boycott de tout ce qui touche au pays agresseur, y compris l’art, n’a pas été suivi par les sélectionneurs cannois qui ont tenu à permettre au très long métrage de Kirill Serebrennikov d’exprimer sa dissidence par son existence même en dehors du territoire de Poutine.
Coproduit par la Russie, le biopic a été pointé du doigt pour ses liens financiers avec l’oligarque Roman Abramovich. De quoi occulter, lors de la conférence de presse, la réalité narrative du film qui relate la passion malheureuse d’Antonina Miliukova pour son époux, le compositeur Tchaïkovski, homosexuel, qui la méprise. Cette histoire d’amour impossible qui évoque une fois de plus la difficulté d’être femme et épouse, devrait avoir du mal à trouver sa place au palmarès dans un festival où l’ombre de la guerre européenne plane directement sur le festival.
Le réalisateur prometteur du Disciple (Un Certain Regard, 2016), qui, contre toute attente, n’avait pas reçu de prix pour le très apprécié Leto, en Compétition en 2018, et de La fièvre de Petrov, également en sélection officielle, a beau parler le langage international de l’art, sa dernière symphonie théâtrale aura du mal à être audible dans un monde traumatisé, qui va souffrir longtemps des répercussions catastrophiques du conflit qu’inflige la Russie à l’Ukraine.
BAC Films avait beaucoup perdu avec La fièvre de Petrov, dans un contexte post-covid, qui avait réduit la carrière de cette grosse production russe à 20 000 entrées contre 170 000 tickets pour Leto. Mais le distributeur suit Kirill Serebrennikov depuis Le disciple en 2016. Cette fois-ci, en plus de la crise du cinéma art et essai qui frappe l’exploitation post covid 19, BAC pourrait aussi subir les dommages collatéraux de la guerre dans le Donbass et ainsi attendre 2023 pour programmer le film en salle, dans ce contexte compliqué.*
*le film sortira finalement en France le 15 février 2023. La guerre menée par la Russie contre la démocratie d’Ukraine est toujours d’actualité.
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