La chatte à 2 têtes : la critique du film (2002)

Drame, Erotique, Trash, LGBTQ | 1h27min
Note de la rédaction :
7.5/10
7.5
La chatte à 2 têtes , affiche du film Jacques Nolot

  • Réalisateur : Jacques Nolot
  • Acteurs : Jacques Nolot, Vittoria Scognamiglio, Sébastien Viala, Olivier Torres
  • Date de sortie: 20 Nov 2002
  • Nationalité : Français
  • Titre original : La chatte à deux têtes
  • Titres alternatifs : Glowing Eyes (Titre de travail international), Porn Theatre (USA)
  • Année de production : 2002
  • Scénariste(s) : Jacques Nolot
  • Directeur de la photographie : Germain Desmoulins
  • Compositeur : -
  • Société(s) de production : Elia Films
  • Distributeur (1ère sortie) : Mars Distribution
  • Éditeur(s) vidéo : MK2
  • Date de sortie vidéo : 1 avril 2009
  • Box-office France : 22 975 entrées
  • Budget : 1 130 000 €
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdit aux moins de 16 ans
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Dolby
  • Festivals et récompenses : Sélection Officielle Un Certain Regard Cannes 2002, Torino International Gay & Lesbian Film Festival (2003, Meilleur Film), Valencia Festival of Mediterranean Cinema (2002, Palme d'or), International Film Festival Rotterdam (2003)...
  • Illustrateur / Création graphique : -
  • Crédits : © Elia Films
Note des spectateurs :

La chatte à 2 têtes est une plongée sans concession dans une salle de cinéma porno de quartier. Entre désirs refoulés et amours tarifés, Jacques Nolot signe une âpre valse des sentiments.

Synopsis : Un cinéma porno est le cadre d’une histoire d’amour entre une caissière, un homme de cinquante ans et un projectionniste nettement plus jeune. La caissière abuse de la naïveté du projectionniste pour draguer l’homme de cinquante ans, tandis que ce dernier se sert de la complicité de la caissière pour séduire le jeune garçon.

Les fantômes des cinémas de quartier

Critique : Après avoir passé de nombreuses années à écrire de très beaux scénarios pour André Téchiné (J’embrasse pas) et Paul Vecchiali (Le café des Jules), l’écrivain et acteur Jacques Nolot est passé derrière la caméra pour raconter son histoire dans L’arrière-pays (1998), œuvre autobiographique âpre où l’auteur règle ses comptes avec sa famille et sa province natale. Un succès dans le domaine de l’art et essai.

Continuant sur sa lancée, il revient en 2002 à Cannes, dans la section Un Certain Regard, avec La chatte à deux têtes, film beaucoup plus abrupt et cru sur la vie d’une salle de cinéma pornographique parisienne. Opposant le monde de la caissière – à l’extérieur – et la salle obscure située en contrebas, le cinéaste s’attarde sur quelques personnages abîmés par la vie tandis que d’autres se perdent dans des relations sexuelles sans issue.

La force de Nolot est de ne jamais s’appesantir sur le caractère sordide de la situation et de regarder tous ses protagonistes avec un regard bienveillant. Loin de juger qui que ce soit, sa caméra ne fait qu’enregistrer des instantanés d’une vie sexuelle exposée aux yeux de tous. Car la cinéma de quartier est ici conçu comme lieu de désir, de plaisir et d’abandon. Expérience intime et collective à la fois, elle permet à chacun de se révéler à lui-même, au risque de se découvrir des pulsions homosexuelles jusqu’alors refoulées. Malgré la présence de nombreux hommes, un terrible sentiment de solitude émane de ce lieu et de ces personnages anonymes qui viennent tromper leur mal de vivre durant une heure ou deux.

La chatte à deux têtes, un titre de film porno, en guise de cinéma vestige

Sans fausse pudeur, Nolot filme le sexe frontalement et multiplie les séquences de fellations, sodomies collectives et éjaculations à caractère homosexuel. Le film d’auteur, obsédé par la maladie et marqué par l’ancrage du sida dans une société dévastée, est à réserver à un public averti, dans la nostalgie d’un type d’écrans totalement disparus depuis sa sortie, en 2002, ou dans la quête de la découverte d’une sociologie marginale et insoupçonnée, à l’image de ce film puissamment underground.

La force du métrage vient finalement du constat peu reluisant qui est fait de ces amours charnelles et clandestines rejetées par la bonne société. L’intrusion des policiers dans le cinéma nous rappelle d’ailleurs que la répression de toutes les pratiques considérées comme déviantes est toujours d’actualité. La chatte à deux têtes (2002), cinéma personnel transgressif, risque donc de choquer plus d’un spectateur, ce qui est toujours bon signe, surtout en ces temps de politiquement correct généralisé.

Brillante Mendoza, Simone Barbès, Vecchiali et les autres…

A la sortie de cette seconde réalisation, Nolot obtînt des critiques favorables et des prix à l’international. Le film, distribué sur 20 copies en France, réalisera 22 975 entrées. Son public étant très restreint, cette œuvre peut être considérée comme un semi-succès dans son secteur. Le budget de La chatte à deux têtes était bas et MK2 l’éditera en vidéo, sept ans après son exploitation furtive en salle, quelques années après l’exploitation sur TPS et Canal+.

En 2008, le cinéaste philippin Brillante Mendoza proposera sa propre lecture du phénomène des errances humaines dans les cinémas de quartier avec Serbis (Service), présenté en compétition à Cannes. Les analogies y sont nombreuses, pourtant c’est bien au cinéma de Paul Vecchiali et au culte Simone Barbès et la vertu de Marie-Claude Treilhou (1980), auxquels on pensera en priorité en découvrant La chatte à deux têtes. Toutes ces œuvres forment une entièreté, témoignant d’une époque pré-Internet où les marginaux trouvaient dans les cinémas spécialisés l’abandon et l’oubli pour des segments d’existence fantasmée. A bien des égards, ces films servent aujourd’hui de regard historique précieux sur des communautés ethniques ou à l’orientation sexuelle différente, des êtres qui se côtoyaient dans la pénombre d’une société encore peu ouverte au droit à la différence.

Critique de Virgile Dumez et Frédéric Mignard.

Les sorties de la semaine du 20 novembre 2002

La chatte à 2 têtes , affiche du film Jacques Nolot

© Elia Films

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La chatte à 2 têtes , affiche du film Jacques Nolot

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