Haine : la critique du film et le test blu-ray (1980)

Drame, Thriller | 1h27min
Note de la rédaction :
7/10
7
Haine, l'affiche du film

  • Réalisateur : Dominique Goult
  • Acteurs : Klaus Kinski, Maria Schneider, Patrice Melennec, Evelyne Bouix, Katia Tchenko
  • Date de sortie: 09 Jan 1980
  • Nationalité : Français
  • Titre alternatif : Le crédo de la violence
  • Musique : Alain Jomy
  • Distributeur : Gaumont International
  • Éditeur vidéo (VHS) : SVP (Super Vidéo Productions)
  • Éditeur vidéo (blu-ray) : Le Chat qui Fume
  • Sortie vidéo (blu-ray) : Le 10 juin 2019
  • Budget : 4 millions de francs
  • Box-office France / Paris-périphérie : 131 847 entrées / 41 482 entrées
  • Classification : Interdit aux moins de 18 ans lors de sa sortie / Interdit aux moins de 12 ans de nos jours
Note des spectateurs :

Dans la lignée de La saignée ou de Scènes de chasse en bavière, Haine est un film français étonnant qui entend dénoncer la xénophobie ordinaire avec force. La réalisation est tout bonnement excellente et constitue donc une belle surprise.

Synopsis : On ne sait qui il est, ni d’où il vient. Vêtu d’une combinaison blanche, il sillonne les routes de campagne sur sa moto. Le destin le conduit dans un village de la France profonde fraîchement marqué par la mort d’une enfant, fauchée par un deux-roues. Très vite, l’étranger ressent l’indifférence, puis le mépris et bientôt la haine de ces villageois confinés dans leurs préjugés. Seule Madeleine, mère célibataire, accepte de lui venir en aide. Mais tous les hommes du village, jusqu’au maire, ont trouvé en l’étranger leur bouc émissaire.

Une dénonciation du racisme ordinaire dans l’air du temps

Critique : Au cours des années 70, de nombreux films chocs sont tournés sur le modèle du chef-d’œuvre de Peter Fleischmann Scènes de chasse en Bavière (1969). Le principe est simple et reprend celui du film séminal de Fritz Lang Furie (1936), à savoir un personnage accusé à tort et qui se retrouve traqué par une populace assoiffée de sang et de lynchage. En France même, Claude Mulot a dégoupillé La saignée (1971), mais dans un style assez similaire, on peut également citer La traque (Leroy, 1975). Évoquons aussi l’influence majeure de Dupont Lajoie, autre shocker ironique d’Yves Boisset dont on sent aussi l’influence ici dans sa peinture de la xénophobie ordinaire.

En soi, Haine (1980) n’est donc aucunement original, d’autant que les séquences de poursuites entre le motard et le camionneur nous renvoient également au Duel de Steven Spielberg. Ces multiples influences n’écrasent pas totalement ce long-métrage assez méconnu de Dominique Goult qui bénéficie d’une bien belle réalisation.

Un réalisateur méconnu ausculte la campagne française avec hargne

Pourtant, ce n’était pas gagné sur le papier puisque le réalisateur n’avait alors à son actif que quatre réalisations non officielles dans le domaine de la pornographie, sous le pseudonyme de Richard Stephen. Haine constitue donc sa première et malheureusement unique incursion dans le domaine du cinéma grand public. Le film a malgré tout écopé d’une interdiction aux moins de 18 ans lors de sa sortie, sans doute à cause du climat de violence qui sourd du métrage.

Effectivement, l’intrigue, écrite par Goult lui-même, nous invite à suivre la traque d’un motard innocent par des villageois en furie. Peu de temps avant, une petite fille du village est effectivement morte écrasée par un motard et les habitants du coin s’en prennent au premier étranger venu, de manière totalement surréaliste.

Dépeinte comme un repaire d’abrutis consanguins, la campagne française est ici largement ridiculisée par un réalisateur misanthrope. Pour autant, ces gens avinés, totalement repliés sur eux-mêmes et qui cultivent une haine tenace des étrangers ont non seulement existé, mais surtout continuent de peupler certains recoins de France. Et de fait, Haine (1980) par sa localisation dans des villages intemporels reste toujours terriblement d’actualité de nos jours.

Klaus Kinski en contre-emploi dans un rôle positif et carrément christique

Klaus Kinski, pour une fois très sobre dans un rôle positif de victime expiatoire, représente donc cet étranger que l’on rejette, non pas pour des raisons valables, mais uniquement parce qu’il vient de l’extérieur. Dominique Goult en profite donc pour régler ses comptes avec une certaine France, celle déjà fustigée par Clouzot dans Le Corbeau (1943). Mais il signe également une parabole religieuse où Kinski serait une sorte de Jésus-Christ jeté en pâture à la foule, tandis que Maria Schneider incarne une prostituée justement prénommée Madeleine, comme une certaine Marie-Madeleine.

Ces éléments hautement symboliques se confirment par le chemin de croix éprouvé par Kinski lors du final où se déroule une crucifixion métaphorique. La toute dernière scène, magnifique et ambiguë, ne se déroule-t-elle pas dans une église ?

Un échec commercial injuste

Entre les deux, Dominique Goult orchestre une traque qui n’est pas toujours passionnante, mais bénéficie d’une réalisation inspirée, ainsi que de séquences de poursuite bien menées. Toutes les scènes du jeu du chat et de la souris entre le camion et la moto conduite par Kinski sont tournées avec talent et inspiration. Les acteurs, pas toujours très justes, à l’instar d’une Maria Schneider à la masse, font ce qu’ils peuvent pour avoir l’air naturel. C’est assurément le point faible du métrage, même si cela n’empêche nullement de l’apprécier.

Assez violent, ambitieux aussi bien sur le plan visuel que thématique, Haine pâtit de certains défauts liés aux premières œuvres, mais le métrage méritait largement mieux que l’indifférence qui a accueilli sa discrète sortie en salles. Avec à peine plus de 130 000 entrées sur toute la France, il fut un échec cinglant qui a entraîné la fin de la carrière du réalisateur, dont on perd alors toute trace. Un vrai gâchis en somme.

Nos tests et critiques des éditions cultes du Chat qui fume

Le test blu-ray :

Acheter le blu-ray sur le site de l’éditeur

Haine, jaquette blu-ray

© 1980 Radios-Cinés S.A. -S. Productions. © 2019 Le Chat qui Fume / Conception graphique : Domont. Tous droits réservés.

Compléments & packaging : 4/5

Comme pour le reste de la collection du Chat qui fume, l’objet est proposé dans un beau packaging avec fourreau et deux volets où sont nichés le DVD et le blu-ray du film. L’éditeur ajoute un petit encart de quatre pages écrit par Christophe Lemaire, dont on savoure l’humour. L’ensemble est comme toujours très soigné.

En ce qui concerne les suppléments, on notera la présence d’un court making-of d’époque (4min) qui permet de découvrir des images du tournage et quelques mots de Kinski en français, ainsi que des explications du réalisateur en plein travail.

Mais le bonus de choix réside en un entretien passionnant avec l’acteur Patrice Melennec. Celui-ci fait preuve d’une faconde assez impressionnante, visiblement très content de pouvoir évoquer sa longue carrière en détail (32min). Sans aucune langue de bois, voire avec quelques médisances en réserve, ce dernier évoque le tournage de Haine. Il parle positivement de Kinski et passe plus rapidement sur Dominique Goult, apparemment plus préoccupé par la technique que le jeu des acteurs. Melennec, prompt aux excès et exagérations, rend en tout cas ce bonus fort sympathique et plutôt drôle à suivre.

Enfin, les amateurs de la jolie musique d’Alain Jomy pourront en profiter sur une piste musicale isolée. De nombreuses bandes-annonces du catalogue de l’éditeur sont également proposées.

Bandeau le chat qui fume

Copyrights : 2019 Le Chat qui fume

L’image du blu-ray : 4/5

Issu d’une copie restaurée en 2K par l’éditeur lui-même, le master proposé est d’excellente tenue. La colorimétrie a été rehaussée, les scories ont été pour la plupart éliminées et la définition est particulièrement soignée. La copie est donc resplendissante et fait honneur au travail de l’équipe technique et artistique du long-métrage. Un grand bravo pour cette initiative.

Le son du blu-ray : 3,5/5

Le film est proposé en français (langue d’origine) et allemand dans des versions DTS-HD Master-Audio 2.0. Nous n’avons pas testé la version allemande, mais la française comporte des différences qualitatives en fonction des scènes. Les dialogues paraissent parfois un peu étouffés, tandis que les effets sonores peuvent se faire agressifs. Toutefois, il s’agit sans aucun doute de défauts déjà présents lors de la prise de son initiale.

Critique du film et test blu-ray : Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 9 janvier 1980

Haine, l'affiche du film

© 1980 Radios-Cinés S.A. -S. Productions / Illustrateur : Kalki. Tous droits réservés.

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Haine, l'affiche du film

Bande-annonce de Haine (VF)

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