Film ayant offert son premier rôle hollywoodien de Gérard Depardieu, Green Card est une comédie romantique séduisante et éminemment sympathique qui fonctionne grâce à l’alchimie entre les comédiens et une écriture maîtrisée.
Synopsis : Grâce à un mariage blanc avec une américaine, un français pense pouvoir obtenir la “Green Card” et s’installer définitivement aux États-Unis pour travailler. Brontë Parrish veut emménager dans un appartement qui ne peut être loué qu’à un couple marié. Pour ces deux inconnus, l’union de convenance semble être la solution idéale.
Depardiou : Passeport pour Hollywood
Critique : A la fin des années 80, le réalisateur australien Peter Weir développe un scénario complet à partir d’un vieux traitement laissé dans un tiroir, avec dans l’idée d’offrir le rôle principal à l’acteur français Gérard Depardieu. Il rédige donc le script de Green Card en ayant en tête la star qui accepte le rôle, mais qui doit d’abord respecter des engagements. En attendant que l’acteur se libère, Peter Weir tourne Le cercle des poètes disparus (1989), avec le succès que l’on connaît.
Désormais devenu un cinéaste qui compte à Hollywood, Peter Weir peut tourner n’importe quel film et ce sera justement son Green Card (1990) qu’il produit avec des fonds australiens, alors même qu’aucun acteur du cru n’est embauché. Réunissant 12,5 millions de dollars grâce à des apports américains et français, Peter Weir choisit de confier le rôle féminin à Andie MacDowell qui venait tout juste de rencontrer le succès avec la Palme d’Or Sexe, mensonges et vidéo (Soderbergh, 1989).
Une classique opposition de caractères
Le film, très classique dans sa construction, fonctionne donc essentiellement sur l’opposition de caractères entre un Gérard Depardieu qui incarne la bonhomie française, le goût de la chair et des plaisirs simples, et une Andie MacDowell en mode bobo new-yorkaise. Le premier apparaît comme un peu rustre, mais terriblement chaleureux et séduisant, tandis que la seconde est quelque peu guindée, entièrement corsetée dans ses certitudes de petite bourgeoise à la conscience écologique et sociale marquée.
Si le sujet de départ – le problème de l’immigration aux Etats-Unis et la pratique illégale des mariages blancs – pouvait faire l’objet d’un film à thèse, Peter Weir esquive en réalité la problématique induite par la situation et préfère développer un divertissement inoffensif. Il s’agit pour lui de retrouver le charme des comédies romantiques qui furent un temps une spécialité hollywoodienne entre les années 30 et 60. Ce genre redevient d’ailleurs à la mode depuis le triomphe de Quand Harry rencontre Sally (Reiner, 1989) et ne cesse d’inonder les écrans américains depuis une trentaine d’années, en recyclant toujours les mêmes situations.
La confrontation des cultures donne lieu à une comédie assez fine
Avec Green Card, Peter Weir ne cherche aucunement à détourner les codes d’un genre très balisé, mais il s’appuie sur une écriture fine des personnages pour éviter de tomber dans la caricature. Si le Français incarné par Depardieu fait craquer ces dames, c’est surtout par le regard posé sur lui par des Américaines déjà convaincues de son charme. Sans doute bien conseillé par Gérard Depardieu, Peter Weir évite donc la plupart des clichés qui collent à la peau des Français dans les films hollywoodiens.
Au passage, le réalisateur développe encore les thématiques qui lui tiennent à cœur, comme celle de l’écologie, même si cela reste une toile de fond ici. Par contre, on retrouve son goût pour la confrontation des cultures, ce qui donne lieu à quelques jolies scènes et de bons passages humoristiques.
Une comédie charmante, tout à fait recommandable
Alors que l’on ne rit jamais vraiment – il n’y a pas de gags à proprement parler – le spectacle s’avère charmant de bout en bout, sans que l’on relève de véritable faute de goût. Il s’agit alors de se laisser porter par l’alchimie du couple Depardieu / MacDowell, ainsi que l’ambiance éthérée et feutrée, renforcée par la jolie musique synthétique de Hans Zimmer. Au lieu de sortir l’artillerie lourde, ce dernier préfère envelopper les images de nappes synthétiques soyeuses qui charment immédiatement.
Spectacle certes un peu vain et superficiel, Green Card est donc une comédie romantique tout à fait recommandable qui fut au passage la première incursion de notre Gégé national à Hollywood. Le résultat fut plutôt encourageant au box-office américain (environ 30 M$), même si très éloigné des chiffres du Cercle des poètes disparus (95 M$). En France, la présence au générique de Gérard Depardieu a permis à Green Card de glaner 982 188 entrées, un résultat plutôt satisfaisant, d’autant que le film affrontait cette semaine-là la sortie de Danse avec les loups, le western événement de Kevin Costner.
Critique du film : Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 20 février 1991
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