Coup de maître au service de Sa Majesté britannique : critique (1972)

Policier, Espionnage | 1h40min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Coup de maître au service de Sa Majesté britannique, la jaquette VHS Proserpine

Note des spectateurs :

Curieux mélange d’eurospy et de film de casse, Coup de maître au service de Sa Majesté britannique est un petit film d’exploitation sympathique, typique de son époque.

Synopsis : Un acteur est approché par de mystérieux individus. Ceux-ci lui demandent de jouer le rôle d’un expert en pierres précieuses auprès de la General Diamond, une vénérable institution londonienne. Le comédien accepte sans se douter de ce qui l’attend…

Un savant mélange d’eurospy et de film de casse

Critique : Tourné en 1967 en pleine vague d’eurospy initiée par le triomphe de la saga James Bond, Coup de maître au service de Sa Majesté britannique avance en réalité masqué. Effectivement, le réalisateur Michele Lupo ne signe pas tant ici un vrai film d’espionnage qu’un polar avec multiples retournements de situation et casse spectaculaire d’une grande banque internationale. Le script, écrit à six comme très souvent dans la production italienne de l’époque, mixe donc plusieurs sous-genres à la mode afin de livrer un spectacle total et surtout opportuniste. Nous sommes bien là en présence d’un pur cinéma d’exploitation qui ne cherche même pas à dissimuler ses emprunts et ses références.

Coup de maître au service de Sa Majesté britannique, la jaquette VHS

© 1967 Atlanta Films – Fida Cinematografica. / Visuel : Proserpine. Tous droits réservés.

Le casting est en lui-même un aveu puisqu’il tisse tout un réseau souterrain au sein du cinéma populaire de l’époque. Adolfo Celi est ainsi connu pour avoir été le charismatique méchant Largo dans le James Bond Opération tonnerre (Young, 1965). En cette même année 1967, il tourne même la parodie du film avec Alberto De Martino (Opération frère cadet). Margaret Lee, après avoir émergé dans le péplum, est également devenue une figure emblématique de l’eurospy en en tournant à la chaîne (une bonne quinzaine de titres en seulement trois ans). Enfin, on retrouve au casting tous les seconds couteaux qui vont arpenter les terres du western, puis du polar comme les fameux Eduardo Fajardo, Antonio Casas ou encore Andrea Bosic. A la tête de ce casting 100 % bis, Richard Harrison ne démérite pas et livre une prestation honorable, à défaut d’être remarquable.

Le premier film policier de Michele Lupo

Après être passé par les cases péplum, puis western, le réalisateur Michele Lupo aborde ici pour la première fois un domaine qui lui réussira plutôt bien, à savoir le polar. Il en tournera plusieurs autres par la suite, dont le très réussi L’homme aux nerfs d’acier avec Lee Van Cleef en 1973. Ainsi, toute la partie qui décrit le casse est plutôt menée avec entrain et un certain sens du suspense. On sent que le réalisateur s’amuse et prend plaisir à essayer d’égaler les grands maîtres américains. Certes, son budget plus modeste ne lui permet pas toujours de briller, mais ses efforts sont quand même louables.

Coup de maître au service de Sa Majesté britannique commence d’ailleurs par une scène programmatique plutôt étonnante. Alors que le générique n’a pas débuté, le spectateur assiste totalement médusé à un duel de western mettant en scène Richard Harrison et George Eastman dans une apparition fugitive. On imagine la réaction des spectateurs de l’époque, sans doute persuadés de s’être trompés de salle. En réalité, il s’agit d’une scène de tournage d’un western, ce qui permet de présenter le personnage d’acteur incarné par Harrison. Cette séquence en forme de clin d’œil prépare donc le spectateur à une œuvre qui sera pleine de chausse-trappes.

Un film qui joue sans cesse avec les attentes du spectateur

Effectivement, le réalisateur nous refait le coup une seconde fois en nous faisant assister à un casse, pour finalement orienter à nouveau le long-métrage dans une autre direction, celle de l’espionnage. Ce jeu avec le spectateur n’est certes pas d’une grande profondeur et permet surtout de combler les trous d’un script un peu trop alambiqué pour être honnête, mais il faut avouer que cela rend la projection plutôt agréable et ludique. Alors que l’on pense avoir un coup d’avance sur les personnages, le spectateur est gentiment manipulé par un réalisateur démiurge qui s’amuse comme un petit fou.

L’ensemble se regarde donc plutôt avec plaisir, même si le dernier quart d’heure s’enlise tout de même dans des retournements de situation à répétition. Il faut mieux ne pas trop réfléchir à la crédibilité de tout ceci, sous peine de déchanter. Il n’empêche que Coup de maître au service de Sa Majesté britannique est plutôt une bonne surprise pour les amateurs de films pop des années 60. Réalisé avec soin, joué avec une certaine conviction, le métrage conserve un charme old school indéniable.

Une rareté bis qui mériterait d’être restaurée

Resté longtemps inédit en France, le film serait sorti dans plusieurs salles de province au cours de l’année 1972 – la date de sortie indiquée reste d’ailleurs difficile à confirmer. Par contre, sa sortie en VHS chez Proserpine est certifiée. On notera que le film n’a pas eu le droit à une édition sur support DVD chez nous et qu’il a été donc visionné sur la plate-forme de Canal+ dans une version très abîmée qui semble être celle de la VHS. Pour le juger pleinement, il faudrait passer par une restauration digne de ce nom.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 16 février 1972

Coup de maître au service de Sa Majesté britannique, l'affiche

© 1967 Atlanta Films – Fida Cinematografica. Tous droits réservés.

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