Albatros : la critique du film (2021)

Drame | 1h56min
Note de la rédaction :
6/10
6
Albatros, l'affiche

  • Réalisateur : Xavier Beauvois
  • Acteurs : Jérémie Renier, Xavier Beauvois, Marilyne Canto, Marie-Julie Maille, Madeleine Beauvois, Victor Belmondo
  • Date de sortie: 03 Nov 2021
  • Nationalité : Français, Belge
  • Titre original : Albatros
  • Titres alternatifs : Drift Away (titre international)
  • Année de production : 2021
  • Scénariste(s) : Xavier Beauvois, Frédérique Moreau et Marie-Julie Maille
  • Directeur de la photographie : Julien Hirsch
  • Compositeur : Extraits de Pergolèse et de Gabriel Fauré
  • Société(s) de production : Les Films du Worso, Pathé, Orange Studio, France 3 Cinéma, Scope Pictures
  • Distributeur : Pathé Distribution
  • Éditeur(s) vidéo : Pathé (DVD)
  • Date de sortie vidéo : 9 mars 2022
  • Box-office France / Paris-périphérie : 90 275 entrées / 25 140 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : 5.1
  • Festivals et récompenses : Festival de Berlin 2021 : sélection officielle
  • Illustrateur / Création graphique : Le Cercle Noir pour Silenzio d'après la photographie de Guy Ferrandis.
  • Crédits : Les Films du Worso, Pathé, Orange Studio, France 3 Cinéma, Scope Pictures
Note des spectateurs :

A la fois document social pertinent et drame personnel poignant, Albatros suit plusieurs pistes et manque donc de cohérence narrative. Heureusement, Jérémie Renier y fait preuve d’un jeu intense et habité.

Synopsis : Laurent, un commandant de brigade de la gendarmerie d’Etretat, prévoit de se marier avec Marie, sa compagne, mère de sa fille surnommée Poulette. Il aime son métier malgré une confrontation quotidienne avec la misère sociale. En voulant sauver un agriculteur qui menace de se suicider, il le tue. Sa vie va alors basculer.

Le désespoir du monde agricole en ligne de mire

Critique : Après le joli succès rencontré par Les gardiennes (2017) qui évoquait le rôle des femmes durant la Première Guerre mondiale et qui a attiré 489 430 spectateurs sur toute la France, Xavier Beauvois avait les mains libres pour traiter le sujet qu’il désirait. Il évoque comme point de départ de son histoire d’Albatros un fait divers durant lequel un agriculteur à bout a foncé  en voiture sur des gendarmes qui ont répliqué et l’ont tué. Dans le dossier de presse, Xavier Beauvois précise :

J’ai transposé ça à Etretat où les gendarmes sont mes potes. Je connais aussi des agriculteurs du coin, on sait ce qu’ils gagnent. En France, il y a 3 000 fermes à vendre, un suicide par jour… Les agriculteurs laitiers travaillent à perte. Je les vois bosser autour de ma maison, ils se lèvent tôt, finissent tard, n’ont ni vacances, ni week-ends. La Normandie paraît riche mais c’est une fausse image.

Albatros ou la gendarmerie au quotidien

Le réalisateur s’est ainsi servi de ses connexions avec la gendarmerie d’Etretat pour construire la première partie de son script, à savoir la description du quotidien d’une brigade de gendarmerie de province, comme il l’avait fait autrefois avec la police dans Le petit lieutenant (2005). Durant une quarantaine de minutes, Xavier Beauvois suit donc la routine du gendarme incarné avec beaucoup de crédibilité par Jérémie Renier. L’on découvre alors l’essentiel de l’activité de ces hommes d’ordre qui sont confrontés à la misère sociale. Non seulement ils doivent prendre les plaintes de tout un chacun, mais ils s’occupent aussi d’encadrer des manifestations, font face aux colères des citoyens, ainsi qu’à leurs débordements, notamment alcoolisés.

Cette première partie prend également le pouls d’une société française tout juste sortie de la crise des Gilets jaunes lorsque le script a été rédigé. Le réalisateur se fait donc l’écho de ce malaise social grandissant, surfant sur les mécontentements. Il s’empare aussi du sujet brûlant de la déshérence du milieu agricole, et notamment du désespoir des éleveurs laitiers. Xavier Beauvois a d’ailleurs attribué le rôle de l’agriculteur suicidaire à un véritable homme du terroir normand, l’excellent Geoffroy Sery.

Une deuxième partie plus psychologique

Au bout de cette partie, le drame évoqué dans le synopsis intervient enfin et précipite le long-métrage vers une tonalité plus intimiste, avec une évocation parfaitement menée du phénomène de sidération qui peut intervenir après un choc ou un traumatisme. Désormais comme absent à lui-même, le gendarme incriminé perd pied et ne parvient pas à faire face à une situation accidentelle dramatique.

Dès lors, le long-métrage se resserre sur la famille de celui-ci et les différentes problématiques sociétales semblent abandonnées. Si le jeu de la monteuse et compagne de Xavier Beauvois Marie-Julie Maille peut apparaître comme fragile, on est davantage convaincu par le naturel de leur petite fille Madeleine Beauvois, assez bouleversante. C’est tout de même Jérémie Renier qui s’en sort le mieux, avec une capacité remarquable à s’enfoncer dans le désespoir de son personnage.

Le symbolisme final dessert le film

Malheureusement, Xavier Beauvois a cru bon ajouter une troisième partie d’une vingtaine de minutes où le gendarme abandonne tout pour partir en mer chercher la rédemption. Albatros prend donc des allures de chemin de croix pour le protagoniste, et la dimension religieuse est encore renforcée par l’utilisation de morceaux de musique de Pergolèse et de Gabriel Fauré. Certes, cette immersion dans la reconquête de son destin par un être brisé est plutôt intéressante, mais les autres personnages devenus périphériques font face à des événements qui semblent marqués du sceau de l’invraisemblance. On a du mal à croire aux rebondissements proposés par le cinéaste, jusque dans la réconciliation finale qui paraît un peu trop facile.

Finalement, en abandonnant la terre ferme, le cinéaste perd aussi le spectateur en cours de route. Albatros, parfaitement tenu jusque-là, déçoit donc dans sa dernière ligne droite et ne tient donc pas toutes ses promesses. Un péché mignon chez le cinéaste, assez coutumier du fait.

Albatros, un échec commercial au cœur d’une période difficile pour l’exploitation

Sorti dans les salles le même jour que le film Marvel Les éternels (Zhao) et surtout que Les Olympiades (Audiard) qui lui faisait directement concurrence, Albatros s’est hissé à la quatrième place des nouveautés du mercredi 3 novembre 2021 avec 10 091 gendarmes dans 213 cinémas. La moyenne était donc plutôt décevante pour Xavier Beauvois. Au bout de sa première semaine d’exploitation, Albatros n’avait attiré que 47 815 spectateurs. Ce chiffre ne sera même pas doublé à la fin de l’exploitation du long-métrage qui a donc terminé sa carrière avec 90 275 amateurs de drames intenses.

Cette contre-performance a d’ailleurs poussé Pathé à ne sortir le film qu’en DVD, ce qui oblige donc le public qui souhaiterait voir le film en HD à se reporter sur les plateformes SVOD.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 3 novembre 2021

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