Béla Tarr est un maître du cinéma hongrois. Radical, cinéaste de l’espace-temps, spécialiste du plan-séquence et génie du visuel, il est l’un des grands noms du cinéma d’art et essai des années 2000, découvert sur le tard, après plus de vingt ans de carrière.
On le découvre en France en 2000 avec Les harmonies Werckmeister (11 000 entrées), un chef-d’œuvre de mélancolie qui lui permet de se bâtir une réputation solide auprès d’un public exigeant, qui retrouve dans son cinéma de l’Est, une vision philosophique de l’homme dans un univers en ruine, à la différence qu’il se distingue de l’auteur russe par un athéisme à la hauteur de son caractère trempé. Son film le plus abouti, Les harmonies Werckmeister est présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, à Cannes.
Pourtant Béla Tarr n’en est pas à son premier film. Son œuvre longue de plusieurs décennies a démarré dans les années 70, avec Le nid familial (1979), puis avec L’outsider en 1981.
Sátántangó, l’une des œuvres fleuves les plus importantes du 7e art
Son premier chef-d’œuvre est réalisé en 1988 avec Damnation, qui installe un style contemplatif qu’il maîtrisera de façon exponentielle sur Sátántangó, un film fleuve de 7h30, dystopie rurale d’une puissance picturale extraordinaire. A l’occasion de séances spéciales au Saint-André des Arts, le film sera montré à Paris en 2003, mais de façon très limitée. Certains le découvriront en DVD. L’éditeur Carlotta ressortira ce monument du septième art, en France, en 2020, à l’occasion d’une restauration en 4K.
Dans la foulée, en 2005, on découvre Damnation en 2005, proposé dans 5 salles par le distributeur des Harmonies Werckmeister (4 300).
Le cinéaste connaîtra un échec impitoyable en 2007 avec L’homme de Londres, sélectionné à Cannes. Le film est hué : les critiques tuent la réputation de cette adaptation de Simenon, qui passe inaperçue lors de son passage en salle, un an plus tard (6 100).
Le Cheval de Turin, l’œuvre testamentaire de Béla Tarr
Affecté par l’échec de ce film, Béla Tarr revient en 2011 avec son ultime film, Le Cheval de Turin, une nouvelle apocalypse du terroir, qu’il annonce comme l’ultime projet cinématographique de sa carrière. S’il se retire de la caméra, il réalise un coup de maître, recevant notamment l’Ours d’argent au festival de Berlin. Le Cheval de Turin est un autre chef-d’œuvre dans une carrière d’une cohérence totale. Le film réalise 20 000 entrées en France, malgré son caractère radical.
Las de se battre contre les aléas de la production de ses films, vidé par ses efforts de réalisation et l’intensité métaphysique de son oeuvre, Béla Tarr se retire dans l’enseignement, ne revenant sur les devant de la scène qu’en 2016, en qualité de président du jury, au festival de Marrakech.
Filmographie (réalisateur)
1979 : Le Nid familial (Családi tűzfészek)
1981 : L’Outsider (Szabadgyalog)
1982, Macbeth
1982 : Rapports préfabriqués (Panelkapcsolat)
1985 : Almanach d’automne (Őszi almanach)
1988 : Damnation (Kárhozat)
1994 : Le Tango de Satan (Sátántangó)
2000 : Les Harmonies Werckmeister (Werckmeister Harmóniák)
2007 : L’Homme de Londres (A Londoni férfi)
2011 : Le Cheval de Turin (A Torinói ló)