Flop magistral des années 90, L’autoroute de l’enfer est surtout une comédie parfaitement tordue et totalement truculente, qui, sur son point de départ d’un épisode de La Quatrième dimension, tourne les mythes antiques en une avalanche de gags clownesques. L’autoroute de l’enfer est l’un des films fantastiques les plus singuliers des années 90.
Synopsis : Décidés à se marier malgré l’opposition de leurs familles, Charlie et Rachel se rendent à Las Vegas. Ils vont croiser la route du sergent Bedlam, une sorte de flic zombie qui enlève Rachel et disparait. Charlie découvre que pour retrouver sa fiancée, il doit aller en Enfer.
Bienvenue en enfer : une sortie de DTV en France, et une diffusion sur Canal + avec un titre alternatif
Critique : Highway to Hell, du cinéaste néerlandais Ate de Jong, alors totalement inconnu, est méconnu en France, où il est sorti directement en VHS, sans passer par la case salle, en 1993. En fait, Bienvenue en enfer, c’est son titre de diffusion sur Canal + en février 1994. Quatre diffusions et puis s’en va. Le film était paru en VHS, deux mois plus tôt, en décembre 1993, sous son titre L’autoroute de l’enfer, repris en 2022 par l’éditeur Rimini, qui le propose en combo DVD & blu-ray, après 30 ans d’invisibilité sur notre territoire.
Aux USA, ce film dans un premier temps intitulé Route 666, lors de son développement, avait déjà connu un échec impitoyable en raison des problèmes judiciaires d’Hemdale, en grosse difficultés financières, et qui ne savait guère comment lancer pareil OFNI sur le grand écran alors que le genre fantastique prenait l’eau de toute part, en cet âge d’or des direct-to-vidéocassettes.
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Tourné pour 7.5M$, un beau budget pour une œuvre particulièrement ambitieuse voir la course poursuite sur une autoroute d’une dizaine de voies, avec une armée de coccinelles), le film que l’on peut aisément qualifier de dingue, ne sort que dans une poignée de salles dans son pays d’origine où il rapportera misère (26 055$). Et pourtant cette comédie rocambolesque, à mi-chemin entre Jason et les Argonautes, Orphée, Mad Max et Beetlejuice, ne manquait pas de poil à gratter pour promouvoir l’hilarité de l’Amérique grunge.
L’esprit est celui du début des années 90, d’une Amérique alors adepte des franchises Wayne’s world ou de Bill & Ted’s Excellent Adventure, dont on peut, d’une certaine façon, retrouver une certaine filiation, dans le goût irrésistible pour le délire. On y retrouve également le même ton de folie que celui de La cité des montres (Freaks) de Tom Stern et Alex Winter, autre monument ovniesque du début des années 90, au sort commercial tout aussi peu ragoutant.
Avec L’autoroute de l’enfer, remake déjanté d’Orphée, il faut imaginer la bouille blonde du frère de Rob Lowe, Chad, que l’on venait de découvrir dans la comédie Personne n’est parfaite, partant épouser à la sauvette Kristy Swanson – donc, L’amie mortelle de Wes Craven et future Buffy contre les Vampires, au cinéma. Tous deux sur la route poussiéreuse et iconique de Las Vegas, s’engouffrent par accident dans une autre dimension, où un Robocop, ou plutôt un flic de l’enfer (Hell Cop), vérolé comme un Maniac Cop (référence au film de Lustig), à la peau grêlée d’un cénobite, va kidnapper l’héroïne fleur bleue pour sa Majesté Satan en mal de vierge à tout faire. Le flic est joué par C.J. Graham, figure décidément masquée du cinéma fantastique, puisqu’il avait incarné Jason Voohrees dans Jason le mort vivant. Autre figure bien connue du cinéma fantastique, Kevin Peter Hall, acteur afro-américain dont le basketball avait particulièrement accentué sa croissance à l’adolescence, y trouve son ultime rôle, celui de Charon, passeur des Enfers. L’acteur à la carrure imposante avait interprété Predator à deux reprises, mais aussi la créature poilue de Bigfoot et les Henderson (1987).
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Le script de Brian Helgeland, scénariste bien connu aujourd’hui, installé dans sa zone de confort hollywoodien, depuis L.A. Confidential, Mystic River ou Green Zone, et même réalisateur (Payback, Le purificateur, Chevalier…) ose l’humour à fond la route, dans une production loin d’être lisse, mais toujours dans le délice. Si le budget a été revu à la baisse en raison des problèmes financiers de son studio, la créativité est de mise.
Sur un titre clin d’œil au classique musical d’ACDC, on se retrouve donc dans un enfer d’idées où les effets spéciaux sont d’une belle variété : des mains menottes en animatronique, un cerbère en stop motion, les premières images de synthèse du début des années 90… tout se mélange dans un joyeux bordel, alors que déambulent des maquillages zombiesques un peu foireux, des créatures bien peinturlurées (la goule méphistophélique obsédée de l’entrejambe) et que le gore accompagne quelques scènes où les corps sont broyés, notamment lors du tri des âmes errantes en enfer.
Dans cet antre de la folie où la musique un peu faiblarde sonne comme un DTV des années 90, le casting humain est burlesque, et les personnages sont dignes des poilées franchouillardes : dans un club, on croise à table Hitler et Cléopâtre ; sur une table, une carte indique qu’une place est réservée à Mouammar Kadhafi, une autre à Jerry Lewis, et c’est écrit en français pour faire référence au succès quasi exclusif de l’ancienne gloire américaine dans notre contrée.
Dans ce trip qui joue du chapeau, les gags s’enchaînent, avec un goût pour l’absurde, le surréalisme et la référence puissante au cinéma B. Parmi les très nombreux caméos, on croise d’ailleurs toute la famille Stiller, la mère Anne Meara en serveuse de macchabées, son mari Jerry Stiller, leur fille Amy (dans le rôle de Cléopâtre) et, le plus connu dans nos contrées, le fils Ben, pas encore trentenaire, mais déjà bien teigneux dans le gag. Graine de star, il s’amuse à improviser tous ses gags dans le film. On lui doit d’ailleurs le gag moqueur sur Jerry Lewis.
Blu-ray allemand chez Wicked Vision de L’autoroute de l’enfer (Highway to Hell), Covers C – © 2022 Metro-Goldwyn-Mayer Studios Inc and made available in Germany by Park Circus Ltd through Wicked Vision. Tous droits réservés / All rights reserved. Copyright © 1991 Hemdale Film Corporation. All Rights Reserved / Tous droits réservés, Copyright © 1991 Orion Pictures Corporation. All Rights Reserved / Tous droits réservés
Dans ce film culte, on regrettera la touche nineties de la pellicule, décade pauvre pour l’image, et évidemment sa musique rock d’époque, avec des riffs de progressive indigente. Mais, la nostalgie aidant, cela fait de cette grosse série B un témoignage prégnant de son époque, jusque dans le choix critiquable de l’acteur incarnant le diable… Un certain Patrick Bergin dont l’absence de charisme ne l’a pas empêché de se retrouver dans une pléiade de films importants durant la décennie 90 : Mes nuits avec mon ennemi où il incarnait le mari violent de Julia Roberts, Robin des Bois, Jeux de guerre avec Harrison Ford…
Trois décennies plus tard, comment voir L’autoroute de l’enfer ? Retrouver la VHS de Gaumont Columbia TriStar risque d’être inutile, un blu-ray toutes zones en provenance d’Espagne est accessible en deux clics, mais vous n’y trouverez aucune piste française, ni même sous-titres français. Evidemment, une édition américaine est disponible. Mais celle-ci est exclusivement lisible sur les lecteurs de région A. Depuis 2020, le film est proposé en Allemagne en médiabook (3 éditions avec des couvertures différentes). Mais rebondissement, depuis février 2022, un blu-ray bien de chez nous est paru. Une édition collector avec un packaging remarquable. Il est donc temps de reprendre un bon plein d’énergie fossile.
MOVIEMeter : Présent sur IMDB depuis la création de l’encyclopédie en ligne, Highway to Hell n’a pu atteindre que la 300e position des films les plus consultés durant l’hiver 1998-1999. Il ne réapparaitra plus jamais dans le top 1 000, oscillant entre la 1700e position (2004) et la 17 760e place (2017).
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Box-office :
Tourné en deux mois durant l’automne 1989, dans l’Arizona, Bienvenue en enfer est sorti en 1991 dans quelques pays européens. Les difficultés financières du distributeur américano-britannique Hemdale (Terminator, Platoon, Le dernier empereur), en proie à un procès liant la MGM, Orion et le Crédit Lyonnais, empêcha toute sortie dans son pays avant mars 1992, soit trois ans avant la fin du tournage. Le film parvint toutefois à être projeté sur le grand écran de quelques marchés étrangers, comme l’Allemagne ou les Pays Bas, avant-première.
Le distributeur Hemdale ne put trouver que 14 écrans au film, après avoir étudié scrupuleusement le montage du film pour ne pas écoper d’une interdiction trop lourde. La production hors normes ne réalisa que 800$ par écran pour un total de 12 000$ pour son ouverture. Il se classe ainsi à la 20e position du box-office américain où il est attifé de la deuxième pire moyenne du Top 20, après Hook qui lui est en 14e semaine. Retour à Howards End, dans un seul cinéma, engendrera 4.5 fois plus de dollars pour son investiture la même semaine. C’est donc largement insuffisant pour un film budgété à 6M$ (chiffres avancés par le cinéaste néerlandais Ate de Jong, dont l’accent, lorsqu’il parle en anglais, évoque immédiatement celui de Paul Verhoeven) ou 7.5M$ (selon Wikipedia), voire même 9M$ (IMDB Pro). Il est donc vite déprogrammé pour connaître quelques mois plus tard, durant l’été 92, une sortie en VHS chez HBO Vidéo. Selon les auteurs du film, le film aurait profité d’un fort succès sur ce support. On ne peut le vérifier, malheureusement. Toutefois, il lui faudra attendre 2016 pour que ce film culte, récupéré par MGM entre-temps, apparaisse en DVD et blu-ray aux USA, ce qui contredit un peu l’enthousiasme autour de cette œuvre maudite.
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Cultissime, L’autoroute de l’enfer est gratifié d’une belle édition blu-ray confirmant le caractère immanquable de cette œuvre pour tout amateur d’OFNI. Un must dans un packaging collector.
Packaging & compléments : 4 / 5
Désormais dans le catalogue de la MGM depuis le début des années 2000, L’autoroute de l’enfer bénéficie d’une édition digipack que Rimini réserve à des œuvres culte du passé que le public contemporain ne connaît par forcément mais qui forment une collection précieuse, l’une des plus intéressantes et des plus riches du panorama horrifique des éditeurs français.
Le digipack retrouve la griffe des autres titres de l’éditeur, avec un livret de l’incontournable Marc Toullec qui évoque notamment la genèse du film développé par le scénariste Brian Helgeland, dès 1986. C’est précis, référencé, faute de pouvoir profiter des commentaires audio du cinéaste qui figurent notamment sur le blu-ray espagnol, mais pas le français.
Le seul bonus audiovisuel est une présentation supplémentaire du film par l’historien du cinéma Gilles Gressard. D’une durée de 29 min, cette introduction s’apparente quelque peu à une lecture de la page Wikipedia du film et à une relecture commentée des filmographies IMDB des acteurs. A l’ère de l’internet, cela paraît léger.
On peut regretter l’absence de l’interview de Steve Johnson de 10min qui figure sur les éditions blu-ray étrangères. Le maître des effets spéciaux y évoque l’influence de Clive Barker, notamment pour le flic de l’enfer, le fameux Hell Cop, dont il puisa son inspiration dans Le Livre de sang du grand Clive.
Image : 4 / 5
L’ensemble est propre, avec une colorimétrie riche. La profondeur de champ profite énormément au film proposé dans des conditions vidéo approximatives en 1993 (VHS de Gaumont Columbia TriStar). La variété des effets spéciaux, souvent vintage, peut parfois montrer des limites, à l’ère du numérique, mais le grain cinéma rééquilibre l’ensemble, rendant parfaitement vivace une image de grand écran.
Son : 4 / 5
Tourné en Dolby Stéréo à la fin des années 80, L’autoroute de l’enfer est un film aux scènes souvent bruyantes, qui affectionne le recours à une bande originale rock FM et progressive au charme suranné. La piste française issue de la VHS d’époque a été gonflée en DTS HD Master Audio. Les voix écrasent toujours autant l’ensemble de la bande-son. En revanche, on y retrouve un charme vintage pour ceux qui ont connu la réalité de cette décennie 90.
On apprécie beaucoup la piste originale, beaucoup plus équilibrée. Elle dynamise la piste française ronflante.
Toutes les conditions sont donc réunies pour profiter pleinement de ce pur plaisir de série B. Cette œuvre à redécouvrir absolument compte parmi nos films culte les plus chers de notre adolescence.
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