Jusqu’à la mort est un petit DTV étonnant qui foire toutes les scènes d’action à cause d’une réalisation à la peine, mais qui trouve la rédemption par un script élaboré. Jean-Claude Van Damme y est particulièrement convaincant.
Synopsis : Flic pourri et drogué, méprisé par tout le monde, Anthony Stowe sombre dans le coma après avoir pris une balle en pleine tête, tirée par son ex-coéquipier. Au sortir du coma, il décide de se venger et de faire payer le prix fort à son ancien ami, désormais baron de la drogue.
Critique : Perdu dans l’enfer du DTV au cours des années 2000, Jean-Claude Van Damme a beaucoup tourné à cette époque pour la firme Millenium qui lui offre des petits budgets de série B tournés à moindre frais dans les pays de l’Est. Jusqu’à la mort (2007) n’échappe pas à la règle et l’action a beau se dérouler à la Nouvelle-Orléans, la plupart des prises de vue ont été réalisées en Bulgarie. Autre constante des productions Millenium, une photographie pisseuse, typique des produits vidéo de l’époque, ainsi que des décors un peu pauvres. Une signature maison en quelque sorte, même si cela n’est pas à l’avantage des films concernés.
Pour cette nouvelle livraison, Jean-Claude Van Damme souhaitait initialement s’adjoindre les services de son complice Ringo Lam avec qui il a déjà tourné trois films (Risque maximum, Replicant et In Hell). Malheureusement, un différend avec les producteurs pousse Lam vers la sortie et Van Damme retrouve donc pour l’occasion Simon Fellows, son réalisateur d’Ultime menace (2006), ce qui n’est pas nécessairement une bonne nouvelle pour les cinéphiles.
Effectivement, le cinéaste n’est pas particulièrement doué lorsqu’il s’agit de dégoupiller des scènes d’action efficaces. Bizarrement, le cinéaste, pourtant habitué des productions burnées, se révèle bien souvent incapable d’insuffler la moindre tension dans ses plans. Les fusillades sont mollement filmées et le cinéaste semble avoir des difficultés avec le découpage de ses séquences. Ainsi, on comprend rarement ce qui se passe à l’écran lors de ces quelques scènes pétaradantes, d’ailleurs peu nombreuses.
Pourtant, paradoxalement, Jusqu’à la mort n’en demeure pas moins un DTV intéressant grâce à un scénario qui ausculte la noirceur des personnages en allant jusqu’au bout de sa logique, comme le titre l’indique judicieusement. Cela commence par une description sans fard de la police de la Nouvelle-Orléans que l’on pourrait comparer à celle faite dans le Bad Lieutenant de Ferrara. Ici, les êtres sont tous corrompus, alcooliques ou carrément drogués dans le cas du personnage interprété avec force par un Jean-Claude Van Damme quasiment méconnaissable.
Pour mémoire, l’acteur a connu dans sa chair l’enfer de la drogue au cours des années 90 et il en traduit tous les symptômes avec une grande véracité à l’écran. Ayant davantage confiance en ses qualités d’acteur, la star des arts martiaux cherche effectivement à élargir sa palette de jeu au milieu des années 2000, comme le prouvera l’année suivante sa prestation remarquable dans JCVD d’El Mechri. Finalement, cette histoire de rédemption d’un flic pourri qui va se racheter une conscience peut être lue comme une métaphore de la carrière de l’acteur. Lui qui a connu tous les excès cherche alors la lumière grâce au cinéma. Peu importe que le film marche pour peu que sa prestation soit appréciée.
Finalement, Jusqu’à la mort doit être davantage vu comme un drame personnel auquel les auteurs ont greffé une intrigue policière accessoire. La lutte que mène JCVD contre son ancien partenaire incarné par un Stephen Rea en légère roue libre peut ainsi se lire comme un combat intérieur contre ses propres démons. C’est cet aspect dramatique, détonnant dans le cadre d’une série B d’action, qui fait tout le sel de ce petit DTV plein de défauts, mais finalement plus sympathique que la moyenne car cherchant à se distinguer du tout-venant.
Sorti au cinéma dans quelques pays (Espagne, Portugal, Japon), le film a surtout fait les beaux jours des étagères DVD du monde entier. Il possède aujourd’hui une réputation assez flatteuse et peut effectivement être rangé dans le rayon des bonnes surprises de la filmographie souterraine de Jean-Claude Van Damme à côté de L’empreinte de la mort (Martinez, 2004).
Critique de Virgile Dumez