Call Me By Your Name est un film lumineux, magnifiquement interprété, qui s’immisce au panthéon des œuvres traitant du désir.
Synopsis : Été 1983. Elio Perlman, 17 ans, passe ses vacances dans la villa du XVIIe siècle que possède sa famille en Italie, à jouer de la musique classique, à lire et à flirter avec son amie Marzia. Son père, éminent professeur spécialiste de la culture gréco-romaine, et sa mère, traductrice, lui ont donné une excellente éducation, et il est proche de ses parents. Sa sophistication et ses talents intellectuels font d’Elio un jeune homme mûr pour son âge, mais il conserve aussi une certaine innocence, en particulier pour ce qui touche à l’amour. Un jour, Oliver, un séduisant Américain qui prépare son doctorat, vient travailler auprès du père d’Elio. Elio et Oliver vont bientôt découvrir l’éveil du désir, au cours d’un été ensoleillé dans la campagne italienne qui changera leur vie à jamais.
Le grand retour de James Ivory
Critique : Cinéaste sur plus de cinq décennies, mais dont l’heure de gloire s’est surtout bâtie à la fin des années 70, pour se poursuivre jusqu’en 1993 avec Les vestiges du jour, James Ivory n’a jamais caché son amour pour les adaptations de matériaux littéraires riches en émotions refoulées. De Foster (Maurice, Retour à Howards End) à Kazuo Ishiguro (Les vestiges du jour), en passant par Henry James (The Bostonians), son illustre talent de metteur en scène lui a valu bien des louanges et il a dernièrement été nommé aux BAFTA et Oscars, pour son adaptation en qualité de scénariste du roman d’André Aciman, Call Me By Your Name.
Ivory aurait pu réaliser cette œuvre s’il avait été plus jeune, tant elle regorge de lumières, de décors flamboyants, de passions, d’un rapport respectueux des classes, où l’intellectualité d’arrière-plan donne toujours matière à des dialogues somptueux et apporte un habillement vertueux aux conflits du cœur. De surcroît, cet amateur de films en costume trouve ici le seau du vintage et du rétro dans la peinture estivale d’une Italie idyllique des années 80 pop, qui baigne dans la culture et son histoire des arts. Pourtant, il s’agit bel et bien d’un film de Luca Guadagnino, le réalisateur de I Am Love et A Bigger Splash.
Le chef-d’œuvre de Luca Guadagnino
Le cinéaste italien, au firmament de son inspiration, annonce ainsi clore une trilogie sur le désir avec cet épiphénomène de Sundance 2017, qui s’est transformé en enjeu cinématographique majeur, tout au long de l’année 2016 jusqu’à sa sortie américaine et en décrochant des sélections magnifiques dans divers festivals (notamment Berlin), et des prix valeureux lors des grandes manifestations annuelles. Ainsi, pour les Oscars, il a pu compter sur quatre nominations. Formidable pour une œuvre dite de répertoire classique qui, au premier abord, aurait pu pâtir du sceau mortifère de sa thématique LGBT. Toutefois cette dernière n’est-elle pas en fait qu’illusoire ?
Call Me By Your Name : une apothéose émotionnelle
Au-delà de l’amour naissant entre un jeune homme de dix-sept ans et un bel invité masculin de cinq ans son aîné, Ivory et le cinéaste italien Guadagnino dépeignent avec une maestria d’esthète, les troubles de la passion dans son éveil, la sexualité dans ce qu’elle a de plus ardent. D’homosexualité, il n’en est jamais vraiment question. L’on évoquera volontiers les désirs, et troubles. Qu’ils soient refoulés, consommés, ou qu’ils laissent place à un déferlement d’émotions fortes, rarement déployées avec autant de force et de pudeur à l’écran. Ici en l’occurrence sur le visage, juvénile et pourtant complexe, de Timothée Chalamet, lors d’une scène finale en forme d’apothéose émotionnelle, tourmentée, mais nécessaire, où le cinéaste s’emploie à faire l’éloge de la douleur pour un apprentissage de la vie, vif et inoubliable, ponctuant le film de façon formidable.
Critique : Frédéric Mignard