De jeune fille rebelle, dans le Bronx, à diva soprano mondialement reconnue, Julia Migenes est plus que la Carmen de Francesco Rosi…
Julia Migenes est une chanteuse lyrique américaine connue des cinéphiles pour son rôle mythique de Carmen dans l’adaptation de George Bizet par Francesco Rosi, en 1984. Le film, avec Plácido Domingo, devient le plus grand succès historique pour un film-opéra. Julia Migenes, à l’époque appelée Julia Migenes Johnson, est nommée aux César et aux David di Donatello comme Meilleure actrice.
Au cinéma, Julia Migenes ne cherche pas vraiment à développer une carrière qui ne décolle pas. L’échec de L’Unique de Jérôme Diamant-Berger (1986), co-écrit par David Assayas, est une douche froide. Elle voulait tourner avec Charles Denner et Sami Frey. Le nom de Jean-Claude Carrière au scénario lui avait inspiré confiance. Mais l’expérience tourne au fiasco. Elle veut changer de réalisateur, mais en vain. Elle finira par refuser d’en faire la promotion.
Sa rencontre avec l’ancien gourou déchu de la Cannon, Menahem Golan, pour L’Opéra de Quat’sous, ne lui permet pas non plus de réitérer le succès de Carmen qui commence à s’éloigner. Elle tourne à ce moment-là avec Peter Medak, l’un des hommes de sa vie.
Depuis ses 18 ans, Julia Migenes a été mariée quatre fois, dont avec le cinéaste hongrois Peter Medak, entre 1988 et 2003. Le réalisateur cherchait une actrice qui pouvait interpréter La Traviata pour un épisode de La Cinquième dimension, en 1987. Elle a tourné par la suite La voix humaine, d’après Francis Poulenc, avec son époux. Pas un succès pour autant. Elle fait différentes petites apparitions dans ses films, notamment Les Frères Krays, film culte.
Malgré tout, la carrière cinématographique de Julia Migenes est tertiaire car l’artiste a surtout le chant lyrique dans les veines et c’est sur les scène que la Soprano est éblouissante.
La New-Yorkaise d’origine porto-ricaine, grecque et irlandaise a une enfance difficile dans le quartier populaire du Bronx : un père alcoolique violent, une mère battue, elle est aussi le fruit d’une liaison extra-conjugale avec un voisin grec… Dans cette existence compliquée, elle est même placée dans un orphelinat catholique… Dans une école de danse, elle est découverte par Leonard Bernstein dans les années 60. Il la caste comme soliste dans le cadre de ses Young People’s Concert. C’est le début d’une carrière à Broadway où elle enchaine Fiddler on the roof et West Side Story.
Egerie de l’opéra de Vienne, Julia Migenes a connu une ascension fulgurante dans Lulu d’Alan Berg, au Metropolitan Opera de New York, et surtout dans Salomé de Richard Strauss, au Grand Théâtre de Genève, où elle était dirigée par Maurice Béjart. L’un de ses plus grands rôles. C’est d’ailleurs Béjart qui la présentera au producteur de Carmen, Patrick Ledoux qui cherchait une actrice-chanteuse-danseuse incandescente pour interpréter ce personnage miraculeux qui allait bouleverser son plan de carrière.
Avec une vingtaine de disques jusqu’en 2009 dans différents styles, Julia Migenes la polyglotte et globetrotteuse, n’a cessé de cultiver une carrière prestigieuse, au gré d’une voix qu’elle a su développer et protéger comme le précieux outil qui veillait sur elle. Et pour cause, cet outil l’a propulsée au sommet du rêve américain. Elle n’en est jamais vraiment descendue.

Affiche : Michel Landi – 2020 © ADAGP Paris © Gaumont. Tous droits réservés.