Senna est un documentaire percutant qui rend un magnifique à l’ancien champion de formule 1, décédé tragiquement en pleine course, en 1994.
Synopsis : Le destin exceptionnel d’Ayrton Senna, ses réalisations sur et en dehors de la piste, sa quête de perfection et son statut mythique constituent le sujet de ce documentaire. Le film relate ses années légendaires de pilote de F1, de la saison 1984 à sa mort dix ans plus tard. Plus qu’un documentaire destiné aux fans de courses automobiles, Senna s’affranchit des conventions du genre pour privilégier une approche cinématographique. Le film recourt abondamment à des images pour la plupart inédites, extraites des archives de la Formule 1.
Senna, documentaire phénomène des festivals de 2011
Critique : Précédé d’une réputation solide depuis son passage à Sundance, le documentaire sur Ayrton Senna est indéniablement la réussite attendue. Charismatique, imprévisible et toujours passionnant à suivre, ce portrait déploie des archives vidéo rares et précieuses pour nous relater les dix dernières années du triple champion du monde de Formule 1, qui défraya la chronique dans les années 80 en raison de sa rivalité surmédiatisée avec l’autre grand nom de l’époque, le français Alain Prost, avant de périr lors d’une course en direct, devant des millions de spectateurs.
Las des documentaires construits autour d’entretiens bavards où l’on s’éloigne finalement de l’intéressé pour se focaliser sur les intervenants, le réalisateur Asif Kapadia, venu du cinéma (The Return, Far North), a préféré se focaliser sur les images de l’homme, issues d’émissions de télévision, de reportages d’époque, de vidéos amateurs… Son travail de montage est impressionnant, toujours pertinent, rassemblant des tonnes de documents d’origines diverses, pour monter son biopic comme une fiction, avec des enjeux dramatiques et humains exceptionnels et un sombre destin final auquel nous sommes préparés comme dans une tragédie grecque.
Portrait d’une gloire charismatique aux allures de success-story
Véritable révélation du film, pour ceux, non initiés, qui découvrent tardivement la personnalité de Senna, la star brésilienne, devenue le symbole de gloire d’un pays alors endigué dans l’illettrisme et la misère, est dévoilée avec une certaine franchise de ton qui ne ternit jamais son image. Dans sa course ultime pour la pôle position, il est décrit comme ambitieux, jusqu’au-boutiste, téméraire, risque-tout… mais surtout comme un homme déterminé par sa rage de vaincre, et non une star capricieuse à l’ego surdimensionné.
Le jeune homme affiche une vraie intelligence, une position franche par rapport au milieu dans lequel il baigne. Il est passionné par la course et le goût mérité de la victoire pour laquelle il se bat, et non par les magouilles financières annexes, ce qui lui a coûté un titre et une rancœur mythique à l’égard de son rival de toujours, Alain Prost.
Cette rivalité est montrée ici à travers des documents forts, où les hommes se confrontent dans les coulisses ou lors des fameuses scènes de réunion de pilotes, avant les championnats. Celles-ci, interdites aux caméras et au public, sont révélées pour la première fois, démythifiant le sport, pour toutefois le rendre encore plus passionnant dans sa complexité, en soulignant les vrais enjeux.
Soudain le virage vers le sombre et la tragédie
Vers la fin de ce documentaire universel, qui ne se destine pas qu’aux aficionados des voitures de course et de la célébrité mais à tous ceux qui s’intéressent aux destins hors du commun, les accidents se multiplient et l’ombre de la mort de Senna plane sur le film. Ce personnage historique qu’on a appris à aimer pendant plus d’une heure, côtoyé au plus près de son intimité, a perdu le sourire alors que le secteur est fortement bouleversé par l’arrivée de l’informatique dans le pilotage des voitures. Son ultime transfert chez Williams est un désastre qui va lui coûter la vie. Le film, devenu très sombre à l’image du pilote très croyant, s’achève de façon magistrale, après un long suspense où les défaites et l’accident tant redouté, nous fichent un sacré coup au moral.
Au final, on ressort de la projection ébranlé. Les plus jeunes seront pour leur part déçus de ne pas avoir suivi de son vivant la carrière exemplaire de cette légende brésilienne. Dans tous les cas, la légende aura eu le film à la hauteur de sa gloire. Pour ce qui est du réalisateur, Asif Kapadia, il remportera l’Oscar pour un documentaire sur une personnalité tragique de la chanson, une certaine Amy Winehouse. Le talent ne s’invente pas.