Les sorcières d’Akelarre : la critique du film et le test blu-ray (2021)

Drame, Historique | 1h32min
Note de la rédaction :
7.5/10
7.5
Les sorcières d'Akelkarre, affiche (2021)

  • Réalisateur : Pablo Agüero
  • Acteurs : Daniel Fanego, Alex Brendemühl, Amaia Aberasturi
  • Date de sortie: 25 Août 2021
  • Année de production : 2020
  • Nationalité : Espagnol, Argentin, Français
  • Titre original : Akelarre
  • Titres alternatifs :
  • Scénaristes : Pablo Agüero, Katell Guillou
  • Autres acteurs : Garazi Urkola, Yune Nogueiras, Jone Laspiur
  • Directeur de la photographie : Javier Agirre
  • Monteur : Teresa Font
  • Compositeurs : Maite Arroitajauregi, Aranzazu Calleja
  • Producteurs : Koldo Zuazua, Iker Ganuza, Fred Prémel, en coproduction avec Jokin Etcheverria, Garazi Elorza, Nicolás Avruj, Diego Lerman
  • Sociétés de production : Sorgin Films, Tita Productions, en coproduction avec La Fidele, Tita B, Campo Cine, Kowalski Films, Lamia Producciones Audiovisuales, Gariza Produkzioak
  • Distributeur : Dulac Distribution
  • Distributeur reprise :
  • Date de sortie reprise :
  • Editeur vidéo : Blaq Out (DVD, Blu-ray, VOD)
  • Date de sortie vidéo : 7 décembre 2021
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 48 463
  • Box-office nord américain / monde :
  • Budget : 2 500 000 euros
  • Rentabilité :
  • Classification : Tous Publics avertissement : "Certaines scènes sont susceptibles de heurter la sensibilité des plus jeunes."
  • Formats : 1.66 Couleur / Proj. : 1.85 2K / 5.1
  • Festivals et récompenses : 5 Goya : Meilleure Direction Artistique, Meilleure Musique Originale, Meilleurs Effets Spéciaux, Meilleur Maquillage et Coiffure, Meilleurs Costumes
  • Illustrateur / Création graphique : © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Les sorcières d’Akelarre, à partir d’une histoire somme toute banale dans l’histoire du cinéma, livre une reconstitution du XVIIe siècle envoûtante et d’une grande richesse historique.

Synopsis : Pays basque, 1609. Six jeunes femmes sont arrêtées et accusées d’avoir participé à une cérémonie diabolique, le Sabbat. Quoi qu’elles disent, quoi qu’elles fassent, elles seront considérées comme des sorcières. Il ne leur reste plus qu’à le devenir…

Critique : Pablo Agüero n’est pas un inconnu pour les cinéphiles ouverts au cinéma latin d’art et essai. Eva ne dort pas, sur les conséquences de la mort d’Eva Peron, était une proposition de cinéma emballante. C’était en 2015.

De l’influence de Jules Michelet, La sorcière

Le cinéaste qui a grandi en Patagonie, est issu d’un bidonville, qu’il assimile volontiers à la rusticité du XVIIe siècle de son film. Une époque qu’il met en scène dans Les sorcières d’Akelarre, avec un regard qu’il sait donc aborder avec recul et une certaine connaissance des enjeux rustiques de l’époque.

L’auteur se bat depuis 2008 pour mettre en scène ce projet diablement envoûtant, celle d’une chasse aux sorcières au Pays Basque, au début du XVIIe siècle. Le point de départ a été la lecture d’un roman longtemps interdit, de Jules Michelet, La sorcière (1862). L’œuvre offrait une vision libératrice de la femme/sorcière sous l’angle de la révolte contre l’oppression patriarcale et religieuse.

Création du mythe du sabbat des sorcières

Précurseur sur la lutte féministe des années 2010, post #MeToo, Pablo Agüero a dû pourtant mettre dix ans pour aboutir à produire son film qui devait évoquer l’histoire française, mais faute de financement français suffisant, se situe dans la partie espagnole du Pays Basque.

Evidemment, à la lueur des tonnes de films sur l’oppression féminine que l’actualité cinématographique expie au début des années 2020, le propos pourrait presque enfoncer des portes ouvertes, mais la mise en scène du regard illustré de l’ouvrage de Pierre de Lancre, beau-frère de Montaigne et proche d’Henri IV, qui s’est adonné à une chasse aux sorcières obsessionnelle en Navarre, allant dans ses propos créer le mythe du sabbat des femmes soumises au Malin, est vraiment opportune. Cette figure historique de notre histoire est majeure dans l’élaboration du cliché de la sorcière dans l’inconscient collectif.

Les sorcières d’Akelarre, juste une redite d’Häxan, la sorcellerie à travers les âges?

Les sorcières d’Akelarre dans ses propos cinématographiques n’a, de son côté, rien de bien original à offrir. Le chef d’œuvre du muet Häxan, la sorcellerie à travers les âges, de Benjamin Christensen, avait dès le début des années 20, conclu que la figure de la sorcière était le fruit du patriarcat dans son rejet de la sexualité et des libertés des jeunes femmes trop belles, ou des vieilles femmes, laides et démentes, à écarter de la société. Un moyen de brûler toute pathologie mentale sur le bûcher de la vérité autoproclamée d’une religion aux pouvoirs d’hommes en proie à leurs propres libido.

Une redite nécessaire et magistralement mis en scène

Philosophiquement, Pablo Agüero enfonce des portes ouvertes qu’il est peut-être bon de rappeler. Cinématographiquement, son film, récompensé par 5 Goya, est une splendeur qui redonne un souffle poétique et réaliste à une sombre histoire atemporelle. Son talent de narrateur, sa capacité à filmer la liberté d’une jeunesse innocente est de chaque plan face aux jeunes actrices formidables de spontanéité. Il les suit avec la maestria d’une caméra virevoltante, face au regard vicié d’un magistrat, étriqué, qui n’entend dans leur langue régionale que barbarie et délire sataniste. Il ne voit en ces fougueuses jeunes filles que l’expression érotique du corps  qu’il essaie de combattre comme si il représentait un danger pour la monarchie et la religion.

Délivrez-nous du mâle

Les jeunes actrices bilingues, maniant naturellement la langue basque et castillane, brillent dans le rôle de magnifiques victimes d’une époque où le pouvoir était aux mains des puissants. Leurs personnages sont poussés à des confessions que l’on ne connaît que trop bien (tortures, pressions psychologiques…), jusqu’à la reproduction d’un sabbat, lors d’une assemblée nocturne hallucinante et paroxysmique, qui insinue un sentiment de folie collective, aux portes du film démoniaque et horrifique, alors qu’il ne s’agit que d’une magnifique transe psychologique où le pouvoir du mental l’emporte sur la raison.

Avec ses lumières picturales empruntant à Rembrandt et Goya, Les sorcières d’Akelarre, est le cas scolaire d’un film dont on sait tout avant d’entrer en salle, mais duquel on ressort fasciné et grandi. A découvrir absolument.

Frédéric Mignard

Disponible en VOD sur Univers Ciné

Sorties de la semaine du 25 août 2021

Les sorcières d'Akelkarre, affiche (2021)

Les sorcières d’Akelarre, affiche (2021) – Création : Benjamin Seznec / Troïka

Le blu-ray :

Remarquable édition d’un film d’auteur abouti. Les sorcières d’Akelarre bénéficie d’un blu-ray aux petits oignons, avec une belle surprise parmi les suppléments.

Suppléments & Packaging : 3.5 / 5

Interview du réalisateur, entièrement en français, de 19min dans lequel Pablo Agüero explique la longue genèse d’un projet de 9 ans qu’il a eu du mal à financer, notamment du côté de la France, mais aussi la difficulté de la langue basque… Entrecoupé d’extraits du film, le document est passionnant et extrêmement bien fourni en éléments historiques. Pour les journalistes, pas de surprise, c’est ni plus ni moins les mêmes propos du réalisateur repris dans le dossier de presse.

Une poignée de scènes coupées et un module très court sur l’éclairage du film et l’influence picturale de l’auteur, sont également fournis.

Le vrai bon point des suppléments, c’est la présence d’un second long métrage sorti en salle en France, Mère des dieux. Il s’agit d’un documentaire spirituel sur des femmes en Patagonie. La copie HD rend la découverte des images impeccable et les témoignages sont remarquables. Le parallèle avec Les sorcières d’Akelarre vient comme une évidence. On remercie l’éditeur Blaq Out pour ce bonus exceptionnel et inattendu.

Packaging : Boîtier amaray bleu et un fourreau typique de Blaq Out qui rend l’objet plus pertinent lors d’un rangement de sa DVDthèque par éditeur.

lmage : 4.5 / 5

Une splendeur. Œuvre très esthétique, bénéficiant d’un point de vue riche et de nombreux plans serrés, la version HD offre un apport remarquable au film : une acuité épidermique, une photographie  parfois proche de l’huile sur toile baroque… Les séquences sombres (cachots ou pleine nuit) sont scrupuleusement appuyées avec des pointes d’embellissement lumineux qui rend chaque plan abouti.

Son : 4.5 /5

Une vraie pureté sonore, avec un bel écrin musical, jusqu’à la séquence hallucinante du sabbat où la musique vocale et tribale entraîne le spectateur dans la transe généralisée.

Le 5.1 DTS HD Master rend hommage à la belle composition de Maite Arroita jauregi et Aranzazu Calleja.

Curieusement, le film a été doublé ; le doublage français figure donc sur cette édition. La version originale est particulièrement intéressante pour le passage du castillan au basque qui sert la narration même du film et nourrit l’incompréhension entre les genres.

Disponible en audiodescription, avec également sous-titres pour sourds et malentendants.

Les sorcières d'Akelarre en blu-ray

Copyrights : Blaq Out

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Les sorcières d'Akelkarre, affiche (2021)

Bande-annonce de Les sorcières d'Akelarre

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