Le vénérable W. : la critique du film documentaire (2017)

Documentaire historique | 1h40mn
Note de la rédaction :
8/10
8
Le vénérable W, affiche du film de Barbet Schroeder

  • Réalisateur : Barbet Schroeder
  • Date de sortie: 07 Juin 2017
  • Nationalité : Français, Suisse
  • Année de production : 2017
  • Titre original : The Venerable W.
  • Titre alternatif Il venerabile W. (Italie), El venerable W. (Espagne),
  • Scénariste : Barbet Schroeder
  • Compositeur : Jorge Arriagada
  • Directeur de la photographie : Victoria Clay-Mendoza
  • Monteur : Nelly Quettier
  • Producteurs : Lionel Baier, Margaret Ménégoz, Olivier Père
  • Société de production : Les Films du Losange, Bande a Part Films (Suisse), Arte France Cinéma (France), Radio Télévision Suisse (RTS) (Suisse), SRG - SSR (Suisse)
  • Distributeur : Les Films du Losange
  • Editeur vidéo : (VOD, DVD) Blaq Out
  • Date de sortie DVD : 13 novembre 2017
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans (en raison d'images d'archives d'assassinats et de violences répétées particulièrement difficiles et susceptibles de heurter la sensibilité du public jeune)
  • Festivals : Sélection Officielle Cannes 2017, Lumière Awards 2018, Locarno Film Festival (2017), New York Film Festival (2017), Jerusalem Film Festival (2017), Stockholm Film Festival (2017), London Film Festival (2017)
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / -
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 89 083 entrées / 54 948 entrées
  • Crédits : Les Films du Losange
Note des spectateurs :

Avec Le vénérable W., Barbet Schroeder nous convie à une réflexion signifiante sur les tensions de notre monde contemporain, en attirant notre regard sur le génocide ethnico-religieux dont la communauté musulmane est victime en Birmanie. Un documentaire aussi effroyable que nécessaire qui prend une dimension particulière des années plus tard, à l’aune du coup d’État militaire de 2021.

Synopsis : En Birmanie, le « Vénérable W. » est un moine bouddhiste très influent. Partir à sa rencontre, c’est se retrouver au cœur du racisme quotidien, et observer comment l’islamophobie et le discours haineux se transforment en violence et en destruction. Pourtant nous sommes dans un pays où 90% de la population est bouddhiste, religion fondée sur un mode de vie pacifique, tolérant et non-violent.

La haine des musulmans, les Rohingyas

Critique : Après une rétrospective au Centre Pompidou et un superbe coffret DVD-Blu-ray chez Carlotta, Barbet Schroeder revenait enfin en salle en France avec un nouveau documentaire mettant en scène une figure ambiguë de l’Histoire, le vénérable W. Il s’agissait d’un éminent moine bouddhiste du paysage politico-religieux birman qui s’avère être un prêcheur de haine à l’égard de ses compatriotes musulmans contre lesquels il incite à la haine et appelle à la résurrection.

Dans ce documentaire important où l’on est invité à parcourir près de quarante ans d’histoire de l’une des nations asiatiques les plus intrigantes car parmi les plus méconnues des Occidentaux, la Birmanie, le constat est affligeant. Les religions s’embrasent, les haines ethniques s’enveniment et les symboles de paix que sont les moines bouddhistes partent en guerre préventive contre les Rohingyas, l’ennemi musulman pourchassé et incité à fuir vers le Bangladesh.

Barbet Schroeder, éternel dénonciateur des monstres de notre monde

Le réalisateur de L’avocat de la terreur et Général Idi Amin Dada, éternel dénonciateur des monstres de notre monde, donne la parole à l’affable (sic) Wirathu, prédicateur de haine à la tête de courants radicaux, dont les intentions sont à peine dissimulées sous son étoffe rouge pourpre. L’homme de foi professe un discours de propagande effroyable incitant la majorité bouddhiste à s’adonner ni plus ni moins à un génocide envers la minorité musulmane.

Le vénérable W, photo

Le vénérable W © Les Films du Losange

De l’importance des fake news

Amateur de vérités alternatives qu’il aime répandre chez les ignorants du peuple pour les faire basculer dans un désir irrépressible de vengeance, le prêcheur soigne sa présence numérique, diffuse des vidéos d’une violence inouïe pour manipuler ses ouailles, et ainsi faire du musulman un violeur dont le seul but est de profaner et d’éradiquer la « race birmane ». La méthode de l’ennemi islamiste ? Courtiser la femme birmane et la convertir dans une logique capitaliste, selon la « stratégie du sexe » ahurissante, que W. aime faire répéter à ses brebis confiantes.

Manipulant les outils de peurs des grands populistes, Wirathu se fait l’écho d’un certain Donald Trump dont il approuve la campagne isolationniste ; il vomit sur les injonctions des Nations Unies et la politique d’ouverture de Merkel…

Le vénérable W., une mise en garde édifiante pour nos sociétés

Occidental au fait des tourments de nos sociétés en proie au terrorisme islamiste, Barbet Schroeder démontre la complexité de notre époque en faisant des musulmans les victimes premières d’une intolérance sanguinaire comme pour contredire les raccourcis de ses compatriotes sur cette peur du musulman qui grandit en Europe et aux Etats-Unis.

Regard indispensable sur des exactions d’une violence inouïe commises dans l’indifférence des démocraties de notre monde envers des minorités religieuses (le film est par ailleurs interdit aux moins de douze ans en raison de scènes choquantes), Le vénérable W. brouille les pistes, infiltre le radicalisme chez des bouddhistes peu pacifistes et se fait l’écho de l’oppression ignoble vécue par les musulmans sur d’autres terres, et ce loin des stéréotypes vains qui agitent nos sociétés.

Un documentaire admirable, à découvrir ou redécouvrir à l’aune du coup d’État de l’armée en 2021.

Frédéric Mignard

Complément de lecture : Barbet Schroeder sur la crise birmane en 2021

Sortie la semaine du 7 juin 2017

Le vénérable W, affiche du film de Barbet Schroeder

Affiche de Le vénérable W © Les Films du Losange –

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