Le Genou de Claire : la critique du film (1970)

Comédie | 1h50min
Note de la rédaction :
10/10
10
Affiche de Le Genou de Claire

  • Réalisateur : Éric Rohmer
  • Acteurs : Jean-Claude Brialy, Fabrice Luchini, Aurora Cornu, Béatrice Romand, Laurence de Monaghan, Michèle Montel, Gérard Falconetti
  • Date de sortie: 15 Nov 1970
  • Nationalité : Français
  • Scénario : Éric Rohmer
  • Distributeur : Les Films du Losange
  • Éditeur vidéo : Potemkine
  • Date de sortie vidéo : 2 mai 2018 (DVD)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 638 445 entrées (France) - 300 993 entrées (Paris-périphérie)
  • Classification : Tous publics
  • Récompenses : Prix Louis-Delluc 1970 - Golden Globes 1972 : Nomination au meilleur film en langue étrangère - Prix du Syndicat français de la critique de cinéma
  • Crédit visuels : © 1970 - Les Films du Losange. Tous droits réservés.
  • Format : 1.37 : 1 / Mono
Note des spectateurs :

Quatrième volet des « Contes moraux », Le Genou de Claire est l’un des sommets du cinéma de Rohmer et offre son meilleur rôle à Jean-Claude Brialy.

Synopsis : Jérôme, diplomate et écrivain, vit en Suède et est à la veille de se marier. Il a décidé de faire seul un voyage en France, dans la région d’Annecy. Là, il rencontre Aurora, une romancière roumaine dont il avait fait la connaissance six ans auparavant, lorsqu’il était attaché d’Ambassade à Bucarest. Elle lui présente Mme Walter, qui vit avec sa fille, Laura, âgée de seize ans. Celle-ci ne cache pas qu’elle est amoureuse de Jérôme…

L’apogée des « Contes moraux »

Critique : Le Genou de Claire est l’avant-dernier film du cycle « Contes moraux », avant L’Amour l’après-midi (1972). Cette série d’œuvres réalisées par Éric Rohmer avait débuté par les courts-métrages La Carrière de Suzanne (1962) et La Boulangère de Monceau (1963), et s’était poursuivie avec La Collectionneuse (1967) et Ma nuit chez Maud (1969). L’accueil critique dithyrambique et le succès de ce dernier long métrage, sélectionné à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère, ont donné encore plus de liberté créative à un auteur désormais reconnu sur le plan international, et qui ne renonce en rien à sa démarche singulière. Filmé au bord du lac d’Annecy, le film reprend la base du « récit de vacances » de La Collectionneuse, et que Rohmer adoptera à nouveau avec Pauline à la plage (1983), Le Rayon vert (1986) ou Conte d’été (1996). Comme souvent chez Rohmer, les adultes sont des personnages cultivés et au niveau de vie plutôt confortable. Jérôme (Jean-Claude Brialy) n’échappe pas à la règle, succédant au jeune ingénieur de Ma nuit chez Maud (Jean-Louis Trintignant), et anticipant d’autres figures rohmériennes comme Hugues Quester dans Conte de printemps (1990) ou Didier Sandre dans Conte d’hiver (1998).

Les femmes qu’ils côtoient sont de la même condition sociale, telle l’écrivaine roumaine (Aurora Cornu), aussi brillante et sophistiquée que la femme libre et indépendante (Françoise Fabian) de Ma nuit chez Maud, et qui pourrait être une parente de la jeune femme déterminée (Pascale Ogier) dans Les Nuits de la pleine lune (1984). Quant aux adolescentes campées par Laurence de Monaghan et Béatrice Romand, on peut les voir comme des « midinettes et Marie-Chantal plus ou moins esseulées, bavardes, nombrilistes », comme l’écrivait Jacques Lourcelles, qui n’aimait guère Rohmer ; mais aussi comme des jeunes filles de leur temps, hésitant entre romantisme et sens des réalités, sagesse et pulsion, sécurité et liberté.

Le Genou de Claire et son suspense des sentiments

Tout ce beau monde est réuni dans un cadre respectant l’unité de lieu, au bord d’un lac Léman splendidement photographié par Nestor Almendros, sans apparat touristique. Tous vont déclarer suivre des règles et des principes auxquels ils ne peuvent que se soumettre, comme la fidélité, mais chacun sera tenté par un comportement qui va démentir ses beaux principes éthiques. À l’instar de Hitchcock, qu’il admire, Rohmer va diluer un suspense, certes sentimental et non pas policier, selon la démarche suivante : il ne s’agit pas de savoir si les personnages vont trahir leurs idéaux, mais comment et quand ils vont les trahir, tant leur comportement dément leur propos dès le début du récit. C’est le cas notamment lorsque Laura propose à Jérôme de l’accompagner, en tout bien tout honneur, au week-end en montagne que le vacancier s’apprêtait à effectuer en solo. Il va sans dire que le scénario et les dialogues (très abondants) sont savoureux, dans un petit théâtre des sentiments plus proche des univers de Flaubert, Marivaux et Madame de La Fayette réunis, que des conventions de la comédie estivale des années 70, représentée au mieux par Les Bronzés (1978) de Patrice Leconte, et au pire par À nous les petites anglaises (1976) de Michel Lang…

Le Genou de Claire, qui atteint carrément le sublime dans son dernier quart d’heure, vaut aussi par son épure magistrale et la limpidité d’une mise en scène sans fioritures dont se souviendront des cinéastes tels Hong Sang-soo ou Guillaume Brac. Le film vaut aussi pour l’interprétation de Jean-Claude Brialy, prodigieux de dandysme détaché, qui trouvait là son meilleur rôle à l’écran. On remarquera aussi la pétulante Béatrice Romand, future interprète du Beau mariage (1982) et de Conte d’été ; Gérard Falconetti en bellâtre obnubilé par son mépris de classe ; et surtout un Fabrice Luchini tout jeunot qui fournit au métrage ses séquences les plus drôles, tout en comportant les prémices de son personnage. Le Genou de Claire fut le deuxième plus gros succès public de Rohmer, avec 638 445 entrées France (dont 300 993 sur Paris-périphérie). Il fut honoré par plusieurs récompenses dont le prix Louis-Delluc, le prix du Syndicat français de la critique de cinéma, et une nomination aux Golden Globes.

Critique de Gérard Crespo

Les sorties de la semaine du 15 novembre 1970

Affiche de Le Genou de Claire

© 1970 – Les Films du Losange. Tous droits réservés.

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