Accessoirement intégré à l’univers partagé de Conjuring, La malédiction de la Dame Blanche est un petit film d’attaque démoniaque qui succombe à tous les artifices classiques du genre, en abusant de jump scares bien inoffensifs. Cela reste regardable, avec un œil distrait.
Synopsis : Los Angeles, années 1970. La Dame Blanche hante la nuit… et les enfants.
Ignorant les avertissements d’une mère soupçonnée de violence sur mineurs, une assistante sociale et ses enfants sont projetés dans un monde surnaturel des plus effrayants. Pour espérer survivre à la fureur mortelle de la Dame Blanche, leur seul recours est un prêtre désabusé et ses pratiques mystiques destinées à repousser les forces du mal… à la frontière où la peur et la foi se rencontrent…
La critique : Alors que le titre français évoque une légende urbaine connue par chez nous, le long-métrage de Michael Chaves s’attache en réalité à décrire un conte macabre bien connu des Mexicains, mettant en scène une femme appelée la Llorona (ce qui signifie la Pleureuse). Celle-ci a déjà été le sujet de quelques films, dont le plus fameux demeure La Llorona (1960) de René Cardona, mélange habile de mélodrame et de fantastique gothique à la Mario Bava. Toutefois, la fidélité à la légende est le cadet des soucis de Michael Chaves et de son producteur James Wan qui reprennent en réalité ce thème classique pour mieux l’intégrer à leur univers partagé fondé depuis Conjuring. Cette nouvelle mode qui veut qu’aucun film ne soit totalement indépendant des autres n’est ici qu’un gadget accessoire puisqu’une seule scène fait explicitement référence à la poupée Annabelle, sans que cela n’apporte quoi que ce soit à l’intrigue, à part un clin d’œil lourdingue aux fans.
La malédiction de la Dame Blanche n’est pas une bénédiction pour le spectateur
En tant que tel, La malédiction de la dame blanche ne se distingue guère du tout-venant du film de fantômes tel qu’établi depuis 2013 par James Wan. On retrouve ici la menace d’outre-tombe qui pèse sur une famille monoparentale à qui il n’arrivera finalement pas grand-chose, hormis quelques frousses provoquées par des jump scares inoffensives et des évolutions aériennes sous les coups du démon. Certes, le film démarre plutôt bien avec la mort de quatre enfants en moins d’un quart d’heure, toujours hors champ bien évidemment. Malheureusement, les méfaits de la dame blanche s’arrêteront là et la suite du programme est bien plus timorée. Il faut ensuite se contenter d’assauts répétés du démon, tous plus prévisibles les uns que les autres, déclenchant à chaque fois des cris et des larmes de la part des gamins, ainsi que l’affolement de leur mère biologique. Comme dans tous les films du genre, la famille a ensuite recours à une aide extérieure, ici un chaman qui ramènera la foi dans le foyer déstructuré. La thématique chrétienne est une fois de plus assénée avec la délicatesse d’un pachyderme et tout finit par rentrer dans l’ordre grâce au secours de la Croix.
On ne peut nier une certaine efficacité de la réalisation de Michael Chaves qui a été repéré grâce à ses nombreux courts-métrages, mais le cinéaste a trop souvent recours aux jump scares afin de compenser son incapacité à créer une vraie ambiance tendue et ténébreuse. Avec un tel sujet, il y avait pourtant matière à approfondir de nombreuses thématiques (sociales bien sûr, mais aussi morales et ontologiques) qui ne sont qu’effleurées ici au profit d’une efficacité de façade. Là où ils pouvaient plonger au cœur des angoisses les plus profondes de l’être humain (perdre le fruit de ses entrailles) comme a pu le faire magistralement Stephen King dans son livre référence Simetierre, les auteurs ont préféré suivre la voie la plus balisée possible, soucieux de ne bousculer personne. Ils passent ainsi à côté de la grande œuvre potentielle pour ne livrer qu’un petit produit de consommation courante. Pas aussi mauvais que le premier Annabelle, La malédiction de la Dame Blanche se suit sans déplaisir, mais également sans grande passion, n’atteignant jamais la puissance d’évocation du premier Conjuring. Le métrage se situe également à de larges encablures des œuvres espagnoles dégoupillées par Amenabar ou Bayona ces dernières années. Quant à L’exorciste, cité de manière indirecte par la date de l’action du film (1973, donc), il peut trôner encore fièrement au panthéon des films démoniaques pour quelques années encore.