Cache-cache est un deuxième long métrage singulier et fantaisiste, qui s’impose comme l’une des très bonnes surprises de 2006. Par Yves Caumon.
Synopsis : Un paysan exproprié s’installe au fond du puits de son ancienne demeure, à l’insu des nouveaux propriétaires. Il les observe, les approche sans jamais se montrer, partageant leur quotidien et leur intimité. Pour contrer son extrême solitude, il devient, aux yeux des enfants, un fantôme, facétieux et joueur, qui refait surface à la tombée de la nuit…
Critique : Deuxième long métrage d’Yves Caumon après Amour d’enfance (2001), Cache-cache semble sortir de nulle part. Avec son casting d’éternels seconds rôles (Lucia Sanchez, Antoine Chappey et Bernard Blancan), son budget réduit au strict minimum, beaucoup ne lui accorderaient pas la moindre attention. Cela serait pourtant dommage de se priver de cet étonnant moment de comédie, aussi inattendu qu’original, qui vient ensoleiller à sa manière ce début d’année frigorifique.
© Sunday Morning Productions
Cette histoire quasi surnaturelle de marginal vivant reclus dans le puits de son ancienne propriété à l’insu des nouveaux propriétaires est une excellente idée cinématographique qui a tout du fantasme de cinéaste. Le jeu de cache-cache qui en découle, l’exploitation de chaque coin et recoin, la gestion de l’espace à deux niveaux, celui de la famille et celui de l’outsider, implique tout un stratagème de mise en scène, à la fois visuel et sonore, qui sollicite les différents sens des spectateurs. Peu de dialogues, mais beaucoup de bruits et de sons mis en valeur dans un environnement rural propice aux contes.
En effet, le cinéaste semble vouloir relater un conte du terroir, l’un de ces récits que l’on se racontait au coin du feu dans les campagnes, et qui naissaient de rumeurs que l’on gonflait sur la grand-place du village, l’une de ces histoires tristes et irrationnelles qui puisaient pourtant leur vérité dans des faits sociaux accablants et dramatiques. A travers ce beau récit, Yves Caumon revient délicatement sur le mal être des campagnes, désormais colonisées par les gens de la ville, et l’exclusion des faibles. Pourtant, loin de vouloir réaliser un pamphlet politique, le cinéaste inscrit sa thématique, aussi sérieuse soit-elle, dans le cadre d’une comédie soulignée par les jeux qu’entretiennent les enfants de la famille avec cet être mystérieux qu’ils prennent pour un fantôme. De la fantaisie et de la bonne humeur que l’on retrouve dans le choix des comédiens, et notamment de Lucia Sanchez, toujours aussi fantasque, et de Bernard Blancan, au visage expressif digne d’un personnage de cartoon. Emporté par ce jeu d’ombres et de secrets, le spectateur se surprend à rire et à être ému, tout en étant surpris par les directions narratives empruntées par un réalisateur à la fois sérieux et burlesque qui parait l’année 2006 de l’un de ses plus beaux rayons de soleil. Dommage que Cache-cache soit passé inaperçu.
Sorties de la semaine du 1er février 2006
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© Sunday Morning Productions
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Yves Caumon, Saadia Bentaïeb, Bernard Blancan, Lucia Sanchez, Antoine Chappey