Radley Metzger est l’un des grands réalisateurs de l’âge d’or du X américain, réputé pour son talent formel. Certaines de ses œuvres ont d’ailleurs été acquises par le MoMA à New York.
Né en 1929 dans la ville de New York, Radley Metzger développe très tôt un goût pour le cinéma qui le conduit à suivre des études d’art dramatique. Après avoir servi dans la guerre de Corée (1950-1953), il travaille comme monteur au sein de l’éminente société Janus Films, spécialisée dans un cinéma européen dont il sera lui-même un fervent défenseur. Il s’occupe notamment de mettre en boîte les bandes-annonces. Tout un art dans lequel il excelle.
Radley Metzger ne s’arrête pas là. Il occupe différentes casquettes tout au long de la décennie, notamment comme assistant réalisateur ou travaille sur le doublage du film scandale au succès phénoménal Et Dieu créa la femme, de Roger Vadim, avec Brigitte Bardot. En 1961, il coréalise Dark Odyssey, un drame de l’immigration forcément sexy, distribué par la société qu’il vient de créer, Audubon Films. Cette entreprise proposera essentiellement des films pour adultes en provenance d’Europe. Dans un premier temps, il s’occupait du montage pour le marché américain, forcément en retard par rapport à la libération des mœurs sur les écrans européens et donc contraint à un travail de censure. Son deuxième long métrage, Les Sales Filles (The Dirty Girls) lui permet de confirmer avec un talent reconnu. L’érotisme est sa marque de fabrique.
Cultivé, fréquentant une élite culturelle internationale, Radley Metzger tourne désormais essentiellement en Europe, adaptant des auteurs respectables : Prosper Mérimée, Alexandre Dumas (Camilla 2000 est une relecture de La dame aux camélias), Catherine Robbe-Grillet…
Thérèse et Isabelle est son premier long à sortir à Paris où il cumule plus de 20 000 entrées en première semaine, en 1969, et près de 35 000 entrées en 14 jours. Dans cette adaptation coquine d’une nouvelle de l’écrivaine tourmentée Violette Leduc, il dirige notamment l’actrice Issy Persson (Moi une femme) et Anna Gaël qui multipliait les rôles à l’écran ces années-là, chez des artistes comme Max Pécas, Michel Deville, Edouard Molinaro, Jean-François Davy, John Guillermin, Raoul André, René Gainville, Michel Lang ou encore l’écrivain-réalisateur Andrew Sinclair.
En France, son film Carmen Baby, la femme femelle connaît une belle distribution malgré son interdiction aux moins de 18 ans et une exploitation en version originale. C’est son second long à sortir sur Paris où il réunit plus de 17 000 entrées lors de sa première exclusivité.
Radley Metzger se dirige invariablement vers le porno et tourne parfois sous le pseudonyme d’Henry Paris.
En 1974, il sort aux USA l’adaptation d’une pièce de théâtre de Broadway avec en tête d’affiche l’héroïne de la pièce, Claire Wilbur. C’est l’un des premiers rôles de Lynn Lowry également. Le cinéaste inclut une scène homosexuelle entre deux hommes et provoque le scandale. Ce porno chic marque son époque, à l’instar des fleurons comme Gorge profonde, Derrière la porte verte, ou L’enfer pour Miss Jones. On notera que ce dernier sort en France le même jour que Furies porno dont le titre d’exploitation cache en fait The Private Afternoons of Pamela Mann de Radley Metzger. Furies porno que les Parisiens découvre le 1er octobre 1975 est un triomphe pour le distributeur Alpha France qui le classe dans le top 6 du pays face à des futurs classiques ou films populaires comme La course à l’échalotte, Flic Story, Parfum de femme, Le vieux fusil et Rollerball. En cette année 1975 où le porno est sur toutes les lèvres, Alpha France bat ses propres records avec ce long métrage qui trouve près de 385 000 furies sur Paris ! Le Sexe qui parle, que le distributeur proposera moins de 15 jours après, fera encore mieux. La révolution cul-turelle est en marche.
Suite à ce succès phénoménal, Alpha France présente en mars 1976 La grande partie (Naked Came the Stranger). Le film hardcore est encore une fois livré sous le pseudo d’Henry Paris, mais l’exercice de signe s’arrête tout juste sous la barre des 100 000 Parisiens. Cet hommage au cinéma muet, plein d’humour, ne restera que 6 semaines à l’affiche sur la capitale contre 56 pour Furies Porno ! Trois mois plus tard, Alpha France poursuit l’abattage du catalogue d’Henry – Radley Metzger – Paris, avec Porno Paradise qui trouve 93 000 spectateurs en quête d’éden. Le métrage profitera des grandes vacances pour 9 semaines de plaisirs des sens. Sous ce titre générique se dissimule un classique du X américain, The Opening of Misty Beethoven, adaptation de George Bernard Shaw dont les critiques furent très élogieuses.
Radley Metzger, toujours sous le nom de Henry Paris, réalisera d’autres pornos de renom comme le très élégant Barbara Broadcast en 1977, La maison de la jouissance (Maraschino Cherry) en 1978, avec Gloria Leonard, son ultime film à caractère pornographique sous ce pseudo.
Dans les années 80, il collabore avec Gérard Kikoïne sur le très populaire Dolly l’initiatrice dont le titre original est Tale of Tiffany Lust. Comme beaucoup des classiques du X de Radley Metzger, il a été édité aux USA en blu-ray.
Producteur et réalisateur non-crédité sur Journal intime d’une nymphomane de Kikoïne (1979) ou Les Fantasmes de Miss Jones de Gérard Loubeau (1986), Radley Metzger aurait réalisé un ultime long métrage inédit en 1985, The Sins of Ilsa.
In fine, au cœur d’une œuvre dédiée à la sensualité, un long métrage se détache dans sa filmographie : Le Chat et le Canari. L’adaptation d’une pièce de théâtre de John Willard du début des années 20, entre film gothique et intrigue à la Agatha Christie, est plutôt réussie et témoigne de vraie qualités esthétiques. Malheureusement, ce projet porté par le producteur britannique Richard Gordon (La tour du diable, Inseminioïd) ne profite pas de la Agatha Christie mania de la fin des années 70. Il déçoit au box-office, notamment en France où il ne reste que quelques semaines à l’affiche avant d’être oublié.
Radley Metzger, pionnier d’un genre mal aimé sera considéré comme l’un des plus talentueux esthète du “blue movie” grâce à son sens du montage, du cadrage et son humour personnel. Il faisait du cinéma sexué une affaire de talent, avec des acteurs au jeu concret. Il remportera de nombreux prix de la part de ses pairs.
Il décède en 2017 au moment où son œuvre renaît en vidéo grâce à la restauration des classiques. Il avait 88 ans.