Park Chan-wook est l’un des cinéastes sud-coréens les plus talentueux des années 2000-2010. On lui doit Old Boy et Mademoiselle.
Park Chan-wook est un cinéaste issu des années 90 avec des premiers longs qui ne franchiront pas le seuil occidental en raison de leur échec local (Moon is the Sun’s Dream en 1992 ; Saminjo en 1997).
Il réalise ensuite un drame de guerre sur la frontière entre les deux Corées, JSA Joint Security Area (2000), qui ne paraîtra dans les cinémas français qu’en 2018 via le distributeur Les Bookmakers-La Rabbia, malgré un gros budget et un énorme succès en Corée du Sud.
La trilogie de la vengeance
En 2003, le distributeur français Metropolitan FilmExport a l’audace de sortir Sympathy for Mister Vengeance, un projet que le cinéaste avait de longue date, mais que sa violence et sa noirceur ne rend pas forcément très accessible. Cette œuvre véritablement culte devient le fer de lance d’un nouveau cinéma coréen, assez extrême, deux ans après la sortie de L’île de Kim Ki-duk.
Son premier succès commercial français, Park Chan-wook l’obtient avec le polar choc Old Boy, film génial à la violence encore une fois sensationnelle. Malgré une interdiction aux moins de 16 ans – comme pour Sympathy for Mister Vengeance -, l’OFNI dépasse les 140 000 entrées au box-office, fort d’un Grand Prix au Festival de Cannes 2004. L’uppercut devient une œuvre générationnelle pour de nombreux cinéphiles qui s’ouvrent à la production asiatique via le cinéma de genre. Le film sera adapté aux USA par Spike Lee en 2014 à l’occasion d’un remake peu remarquable.
On notera que Old Boy paraît dans les cinémas français trois mois après Memories of Murder de Bong Joon-ho amplifiant l’idée d’une véritable vague du cinéma sud-coréen qui se confirmera à des degrés supérieurs avec la Palme cannoise de Parasite, en 2019.
Park Chan-wook réalise ensuite un ultime épisode sur la vengeance avec Lady Vengeance, dont l’accueil critique est bon, mais le public n’a pas vraiment l’occasion de le découvrir. Le cinéaste retombe à des chiffres bas (35 000 spectateurs France). La sortie en salle de Je suis un cyborg, comédie romantique avec Im Su-jeong, s’effectue en catimini, dans seulement 8 salles. Le distributeur Wild Side est avant tout un éditeur de vidéo au sommet de son catalogue largement représenté par des films asiatiques culte. Je suis un cyborg peine donc à capter l’envie de 10 000 spectateurs.
Esthétique violente, impasse américaine
En 2009, l’auteur revient avec une production vampirique esthétiquement remarquable, mais qui divise. Thirst, ceci est mon sang, est présenté à Cannes où il ravit le Prix du Jury. L’adaptation de Zola (Thérèse Raquin), interdite aux moins de 12 ans, sera toutefois un succès en vidéo (chez Wild Side). En salle, elle ne dépasse pas les 60 000 spectateurs.
Dans les années 2010, Park Chan-wook se donne davantage de temps pour travailler ses œuvres. Son premier film en anglais, Stoker, avec Nicole Kidman, Mia Wasikowska, et Matthew Goode, relève une fois de plus du conte étrange, fébrilement beau, et violent (interdit aux moins de 12 ans), que la Twentieth Century Fox a du mal à promouvoir. Sortie sur seulement 50 cinémas, l’œuvre vénéneuse est l’adaptation d’un scénario de Wenworth Miller, l’acteur vedette de Prison Break. Malheureusement, elle n’est pas à la hauteur du buzz espéré qui ne viendra jamais. Le film ne retient pas l’attention des grands festivals et fait sa première à Sundance en janvier 2013. En France, il sera sélectionné au Festival de Beaune en 2013.
Park Chan-wook triomphe avec Mademoiselle
Après cette déconvenue américaine (moins de deux millions de recettes localement), le cinéaste sud-coréen ne reviendra que trois ans plus tard avec une œuvre forte, dense, complexe qui se pose comme l’un des jalons de sa carrière. Mademoiselle lui permet de faire son retour sur la Croisette d’où il repartira bredouille, malgré de grandes chances de figurer au palmarès. Versant toujours dans le soufre (une interdiction aux moins de 12 ans accompagne le film), Park Chan-wook épate les spectateurs à l’occasion d’une sortie automnale, six mois après Cannes. Mademoiselle lui vaut son plus grand succès français avec plus de 300 000 spectateurs. La carrière du film de 2h25 se bâtit sur la durée.
Il ne fait plus de doute, dès lors, que l’on retrouvera Park Chan-wook à Cannes pour son long suivant, son premier des années 2020. Decision to Leave est l’un des fleurons de la compétition de 2022, où un Prix de la mise en scène lui est remis. Les critiques très favorables lui prédisent un succès que la période post-covid 19, pourrait compliquer.
Filmographie (Réalisateur, longs métrages) :
- 1992 : Moon Is the Sun’s Dream
- 1997 : Saminjo
- 2000 : Joint Security Area
- 2002 : Sympathy for Mister Vengeance
- 2003 : Old Boy
- 2005 : Lady Vengeance
- 2006 : Je suis un cyborg
- 2009 : Thirst, ceci est mon sang
- 2013 : Stoker
- 2016 : Mademoiselle
- 2022 : Decision to Leave