Chanteur, acteur, compositeur britannique, David Bowie (de son vrai nom David Robert Jones) nait et grandit dans la banlieue de Londres. Très jeune, il se découvre une passion pour la musique, notamment le rock, puis le jazz. Il apprend ainsi à jouer du saxophone au début des années 60.
Des débuts difficiles
Dès 1962, il fonde son premier groupe nommé Les Konrads, avant de rejoindre les King Bees. Avec cette formation, il parvient à sortir un premier 45 tours intitulé Liza Jane qui est un échec commercial. Le premier d’une longue série puisque le jeune artiste qui prend le pseudo de Bowie ne trouve pas grâce auprès du public.
Même s’il publie un premier album éponyme en 1967, celui-ci est un échec commercial cinglant. Dégoûté par cette expérience, David Bowie apprend parallèlement le mime, le théâtre et la Commedia dell’arte. Le succès intervient enfin en juillet 1969 avec la publication du single Space Oddity, sorte de trip psychédélique sous influence folk. Son deuxième album sort dans la foulée, toujours appelé David Bowie, mais retitré depuis Space Oddity afin de ne pas le confondre avec son premier opus. A la même époque, Bowie se marie avec l’actrice américaine Angela Barnett, plus connue sous le nom Angie Bowie.
Pour son troisième album The Man Who Sold The World, Bowie fait la connaissance du guitariste Mick Ronson et du bassiste Tony Visconti qui joueront un rôle fondamental dans l’élaboration du son Bowie. De même, le chanteur débute sa carrière androgyne avec la pochette de cet album qui le présente en robe. La même année sort le 4ème opus intitulé Hunky Dory, mais les ventes ne sont pas au rendez-vous et tout reste à construire pour l’artiste encore largement ignoré du public.
La révélation grâce à Ziggy Stardust
Tout change en 1972 puisque David Bowie invente son fameux personnage fictif de Ziggy Stardust and The Spiders From Mars. L’album The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars, mélange de hard rock teigneux et de pop plus légère est un succès au long cours au point de devenir une référence de la pop des années 70. La carrière de Bowie est lancée. Dès 1973, le chanteur sort l’album Aladdin Sane qui se place immédiatement numéro 1 des charts britanniques, tandis que le chanteur réalise une tournée triomphale aux États-Unis.
En pleine période créatrice, David Bowie commence également à collaborer, écrire et produire les albums d’autres artistes. Il livre ainsi le Transformer de Lou Reed avec des titres devenus des classiques comme Walk on the Wild Side, Perfect Day ou encore Satellite of Love. Il aide également les Stooges d’Iggy Pop à enregistrer l’album mythique Raw Power. En pleine effervescence, Bowie en profite également pour publier un album de reprises intitulé Pin Ups où il rend notamment hommage à Syd Barret.
La mort de Ziggy et la plongée dans la drogue
Le chanteur étonne tout le monde lorsqu’il enterre officiellement son personnage culte de Ziggy Stardust pour ne pas se laisser enfermer dans une formule unique. Il en profite pour s’exiler aux États-Unis où il s’approprie un nouveau genre, plus proche de la soul. Cela donne l’album Diamond Dogs (1974) inspiré par la dystopie 1984 de George Orwell. Le disque est un triomphe mondial (n° 1 en Angleterre). Malheureusement, il s’agit aussi d’une période trouble pour Bowie puisqu’il tombe dans le piège de la drogue et plus précisément de la cocaïne. Son album suivant intitulé Young Americans (1975) désarçonne ses fans par son orientation très soul, ce qui n’empêche pas le titre Fame enregistré avec John Lennon d’être un beau succès.
C’est en 1976 que le chanteur passe le cap du grand écran et se retrouve en tête du casting de L’homme qui venait d’ailleurs (Roeg, 1976), étrange film de SF qui ne trouve pas vraiment son public, mais demeurera culte. Dans la foulée, le chanteur sort son album Station To Station (1976) qui continue la veine soul, avec des titres toutefois supérieurs sur le plan qualitatif. Mais David Bowie décide de changer d’atmosphère et part s’installer pendant quelques années à Berlin.
Le temps de la trilogie berlinoise
Là, il s’attèle avec Brian Eno et Iggy Pop à construire ce qui sera appelé la trilogie berlinoise. Bowie se passionne désormais pour les synthétiseurs et livre des objets musicaux radicaux qui comptent parmi ses plus grandes réussites artistiques. Ainsi, on adore Low (1977) et sa deuxième face entièrement musicale, mais aussi Heroes (1977) avec sa chanson-titre absolument somptueuse, et bien sûr Lodger (1979) qui est généralement moins apprécié mais dont les titres sont tous plus délirants les uns que les autres. C’est aussi durant cette riche période que Bowie compose et produit les deux premiers albums solo d’Iggy Pop The Idiot et Lust for Life, avec des titres aussi culte que China Girl, The Passenger, Lust for Life ou encore Tonight. Puis, retour à la case cinéma en 1978 avec le dispensable Gigolo (Hemmings, 1978) où Bowie donne la réplique à Sydne Rome et Kim Novak.
En 1980, l’artiste dégoupille Scary Monsters qui demeure un album torturé et très étrange, mais porté par un nouveau tube intitulé Ashes to Ashes. Cela lui ouvre une audience supplémentaire auprès d’une génération plus jeune qui n’a pas connu la période Ziggy Stardust. Dès lors, Bowie souhaite se pencher sur sa carrière d’acteur. Il commence par interpréter John Merrick sur scène dans la version théâtrale d’Elephant Man, faisant l’unanimité de la presse. On le voit aussi jouer son propre rôle dans Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée… et il participe à la BO de La féline (Schrader, 1982) avec Nastassja Kinski.
La superstar des années 80
En ce début des années 80, David Bowie parvient à s’arracher à la drogue et entame une nouvelle phase de sa vie. Il souhaite montrer à tout le monde qu’il est capable de réaliser un album constitué uniquement de tubes FM. Il sort ainsi l’album Let’s Dance (1983) qui contient effectivement le tube éponyme, mais aussi une nouvelle version plus commerciale de China Girl, ainsi que des bombes comme Modern Love. L’album comprend aussi la chanson Under Pressure enregistrée avec Queen sur les rééditions CD. Le triomphe est total et la tournée qui s’ensuit (Serious Moonlight) place David Bowie en pure star de la planète rock.
Dès 1984, David Bowie confirme sa popularité avec l’album Tonight, pourtant très médiocre si l’on excepte deux ou trois titres à sauver. Devenue une star de la chanson, Bowie joue un rôle de vampire dans Les prédateurs (Scott, 1983), premier long-métrage esthétisant de Tony Scott où il donne la réplique à Catherine Deneuve et Susan Sarandon. Le succès n’est pas au rendez-vous contrairement à son implication dans Furyo (Oshima, 1983) qui reçoit l’assentiment général des critiques.
Si on le revoit furtivement dans Série noire pour une nuit blanche (Landis, 1985), David Bowie se concentre surtout sur la comédie musicale Absolute Beginners (Temple, 1986) dont on ne retiendra que la splendide chanson-titre, ainsi que sur Labyrinthe (Henson, 1986) où il se fourvoie en méchant d’opérette. En 1987, il sort l’album Never Let Me Down, généralement détesté des fans de la première heure, même s’il contient quelques titres efficaces comme Day In Day Out ou surtout la chanson-titre. Le reste de son année est passée sur scène avec le gigantesque Glass Spider Tour. A noter qu’il a également composé un titre en 1986 pour le film d’animation When The Wind Blows (Murakami, 1986). Enfin, en 1988, il incarne Ponce Pilate dans le film à scandale La dernière tentation du Christ (Scorsese, 1988).
Une remise en cause artistique à la fin des années 80
Sans doute conscient que sa carrière solo s’enfonce dans la facilité et la médiocrité, David Bowie prend comme à son habitude la tangente et crée un nouveau groupe nommé Tin Machine. Il sort le premier album éponyme en 1989 qui possède un son plus brut et garage rock, ce qui est dû aux guitares saturées de Reeves Gabrels. Le résultat commercial s’avère décevant. Tout comme celui de Tin Machine II (1991), pourtant plus accessible, ce qui va mettre un terme à cette aventure. Toutefois, même si ces albums sont inégaux, ils ont permis à Bowie de retrouver l’envie de chanter et de composer.
A la même époque, la star accepte de jouer le rôle masculin principal de The Linguini Incident (Shepard, 1991) qui est un échec commercial, avant d’apparaître brièvement dans Twin Peaks, Fire Walk With Me (Lynch, 1992). Cette dernière expérience est plutôt frustrante puisque son rôle a été taillé dans le vif par un montage qui a supprimé son arc narratif. On le voit donc désormais dans les scènes supplémentaires des éditions vidéo du film. A cette même époque, David Bowie se marie une seconde fois, cette fois avec Iman, avec qui il reste jusqu’à sa mort.
La renaissance des années 90 par l’indus, l’électro et la jungle
En 1993, la renaissance musicale de David Bowie a un nom : Black Tie White Noise. L’album qui mêle les influences jazz, électro et hip hop surprend les fans et s’impose comme une excellente surprise, y compris au niveau des ventes. La chanson Jump They Say se classe 9ème des charts britanniques. La même année, le musicien offre la BO de la série The Buddha of Suburbia (1993) qui déploie une musique planante. Cet album passe totalement inaperçu et demeure l’un des moins vendus de l’artiste.
Bowie se rattrape en 1995 en sortant son chef d’œuvre de la décennie 90 : 1. Outside. L’album concept devait être le premier d’une série de cinq qui ne verra jamais le jour. En tout cas, l’album complètement fou semble synthétiser à lui seul toute la carrière de la star en le propulsant en même temps vers un rock indus de belle tenue. En 1996, il incarne à l’écran Andy Warhol dans le biopic Basquiat (Schnabel, 1996), occasion de rendre hommage au pape de la Factory qu’il a fréquenté.
Toujours à la recherche de nouveauté, Bowie s’empare cette fois de la jungle et de ses rythmes syncopés pour livrer un dynamique Earthling (1997) qui décoiffe. On adore notamment des titres comme Little Wonder, Dead Man Walking ou I’m Afraid of Americans. Mais en 1998, il revient au cinéma avec le rare G-Men (Goth, 1998) dont il joue le rôle principal à côté du pape de la musique jungle Goldie. Bowie se compromet également dans le film italien Il mio West (Veronese, 1998) et termine sa décennie cinéma sur Mr. Rice’s Secret (Kendall, 1999). Pas vraiment des œuvres mémorables.
Un début des années 2000 inégal
L’année 1999 est marquée par la sortie de l’album « Hours » qui voit le chanteur aborder une période moins torturée et davantage tournée vers son passé artistique. Il s’agit également du disque de la rupture avec le guitariste Reeves Gabrels. L’inspiration y est quelque peu en berne, de même que pour son projet intitulé Toy (2000) où le chanteur réenregistre ses premiers titres. À la suite d’une querelle avec sa maison de disques, la galette ne sortira jamais de son vivant. Elle est finalement publiée en 2021 et ne présente guère d’intérêt sur le plan purement musical. Parallèlement, David Bowie est apparu en tant que narrateur de la série Les prédateurs et en jouant son propre rôle dans la comédie Zoolander (Stiller, 2001).
Avec son album suivant intitulé Heathen (2002), le chanteur retrouve l’inspiration et livre un disque de grande tenue. Il enchaîne aussitôt avec Reality (2003) qui est légèrement plus faible, mais conserve un intérêt certain.
Une retraite anticipée d’une dizaine d’années pour cause de santé
Malheureusement pour lui, David Bowie fait une attaque cardiaque en 2004 et le chanteur décide de se retirer de toute vie agitée, du moins pendant une dizaine d’années. On le voit bien de temps à autre dans quelques films comme Le prestige (Nolan, 2006) où il incarne le scientifique Tesla, et on peut l’entendre dans la version anglaise d’Arthur et les Minimoys (Besson, 2006) dans le rôle de Maltazar. Par la suite, on le revoit brièvement dans August (Chick, 2009) avec Josh Hartnett et dans College Rock Stars (Graff, 2009). Rien de bien marquant.
2013, un retour glorieux, mais tristement écourté
A la surprise générale, David Bowie revient en 2013 avec un nouvel album passionnant intitulé The Next Day. Il atteint la première place des charts britanniques et également la 2ème place aux États-Unis, ce qui n’était jusque-là jamais arrivé. Malheureusement, en 2014, David Bowie apprend qu’il est atteint d’un cancer du foie et l’artiste se dépêche d’écrire un ultime album testamentaire, le magnifique Blackstar (2016), tout en montant la comédie musicale Lazarus. Ce qui sera finalement son dernier album sort le 8 janvier 2016 pour l’anniversaire du chanteur.
Celui-ci s’éteint seulement deux jours après la publication de son ultime création, non sans avoir tourné des clips qui mettent en scène sa mort programmée de manière émouvante et poétique à la fois.
Un maître du clip vidéo
Si sa carrière au cinéma a finalement été souvent décevante, il ne faut pas négliger sa contribution majeure à l’art du vidéo-clip. Effectivement, l’aspect visuel de son œuvre est indissociable de sa personne, et ceci dès la fin des années 70. Il marque l’histoire du clip avec Ashes To Ashes réalisé en 1980 par David Mallet. Parmi ses autres réussites en la matière, on peut citer Blue Jean (1984) de Julian Temple, Never Let Me Down (1987) de Jean-Baptiste Mondino.
Au cours des années 90, il livre une série de clips déjantés dont Jump They Say (1993) de Mark Romanek, The Hearts Filthy Lesson (1995) de Samuel Bayer, Little Wonder et Dead Man Walking (1997) de Floria Sigismondi. Après une longue interruption, il retrouve cette dernière pour l’excellent The Stars (Are Out Tonight) (2013). Enfin, il termine en beauté avec le magnifique Blackstar (2015) de Johan Renck et le très prophétique Lazarus (2015) du même réalisateur.
Décédé en 2016 à l’âge de 69 ans, David Bowie est sans aucun doute l’un des artistes britanniques les plus importants de la fin du 20ème siècle et un musicien audacieux sans cesse en recherche de nouveauté. Il ne peut en aucun cas être réduit à l’image qu’ont donné de lui les journalistes généralistes français qui n’ont parlé à sa mort que de ses métamorphoses physiques, au lieu de se concentrer sur l’essentiel, la richesse incroyable de son répertoire et de son catalogue musical.
David Bowie est le père du réalisateur Duncan Jones.