Parfait exemple du savoir-faire hollywoodien en matière de comédie désopilante, Mon homme Godfrey est un savoureux morceau de choix grâce à un script inspiré et des acteurs au dynamisme fou. Un classique.

Synopsis : Irène et sa sœur Cornelia effectuent une « course aux objets », un peu snob et même un rien indécente. Elles en ramènent un clochard nommé Godfrey, qu’elles font engager par leur mère. Godfrey devient vite indispensable à ce petit monde nanti et protégé. Jusqu’à ce que Cornelia éprouve une véritable aversion pour Godfrey. Lorsqu’un collier de perles disparaît, elle tente de le faire accuser…

Une comédie trépidante fondée sur une thématique sociale

Critique : Alors que la firme Universal est en pleine tourmente sur le plan financier à cause de plusieurs échecs commerciaux, elle décide de mettre sur pied une comédie au budget resserré (on parle de moins de 700 000 $) qui pourrait rapporter gros pour un investissement minimal. Les producteurs s’emparent du roman d’Eric Hatch intitulé 1101 Park Avenue et proposent le tout au réalisateur Gregory La Cava, ainsi qu’à la star William Powell qui acceptent immédiatement le contrat. Powell parvient dans le même temps à imposer son ex-femme Carole Lombard dans le rôle de la jeune Irene, prétextant que leurs liens intimes transparaîtraient à l’écran.

© 2019 Editions Montparnasse. Tous droits réservés.

Si le tournage n’a pas toujours été de tout repos, notamment à cause de l’alcoolisme avéré du cinéaste, Mon homme Godfrey (1936) ne semble pas avoir souffert de ces quelques tensions. Basée sur une idée vraiment audacieuse – un clochard se retrouve employé comme majordome dans une maison bourgeoise à la suite d’une course au pauvre organisée par des riches inconséquents – cette comédie délirante impose son tempo trépidant dès les premières minutes. Outre des dialogues percutants, le film offre un nombre conséquent de situations cocasses, le tout sur un ton grinçant. Tourné en plein durant la grande dépression des années 30, le film se dote d’une dimension sociale qui ne peut que ravir le spectateur.

Une screwball comedy d’excellente tenue

Ainsi, la richesse intacte d’une petite minorité agit ici comme un révélateur des failles du système libéral américain. Si le long-métrage ne va jamais jusqu’à critiquer l’idée du rêve américain, il égratigne fortement le comportement des élites. Montrée comme un ramassis d’irresponsables, la haute société est portraiturée de manière assassine par un cinéaste qui s’amuse de ces travers.

My Man Godfrey – Film issu du domaine public. © Coffret 3DVD 2019 Edtions Montpaernasse. Tous droits réservés. Photo DR, proposées par Les Edtions Montparnasse

Comme dans la plupart des screwball comedies de l’époque, le spectateur est plongé au cœur d’une famille riche totalement folle et excentrique. Le père de famille (excellent Eugene Pallette) est ainsi totalement dépassé par la folie de sa femme et de ses filles. il doit supporter non seulement les caprices des deux jeunes filles (excentrique Carole Lombard et froide Gail Patrick), mais aussi l’irresponsabilité totale de sa femme (hilarante Alice Brady). Les auteurs ont osé inclure dans cette maison de fous un amant non officiel du nom de Carlo, véritable pique-assiette qui est le souffre-douleur du maître de maison. Au milieu de ce sacré foutoir, le brave Godfrey est sans aucun doute le plus aristocratique de tous, alors même qu’il semble issu du caniveau.

Des idées bien délirantes dans une comédie au tempo soutenu

Attention toutefois, la comédie ne va pas jusqu’au bout de ce postulat, à cause d’une révélation finale qui vient remettre les choses à leur place. De l’audace, certes, mais pas au point de révolutionner le système tout de même. Entre-temps, le spectateur aura bien ri de tout ce monde, petit théâtre des futilités. Parmi les délires propres au genre, on adore l’idée (suggérée seulement) de la présence d’un cheval dans la bibliothèque de la maison. Ce sont ces menus détails délirants qui font tout le prix de ces comédies de l’âge d’or hollywoodien.

Si la réalisation de Gregory La Cava manque un peu de ressort par moments, on lui sait gré d’avoir su imposer le bon tempo à ses acteurs. Le tout ressemble certes à du théâtre filmé, mais l’énergie qui se dégage de l’ensemble balaie rapidement cette impression.

Un gros succès d’époque largement mérité pour ce classique

Gros succès à l’époque, Mon homme Godfrey a permis de soutenir de manière temporaire le studio Universal, tout en faisant de Carole Lombard une véritable star. Le film a également conforté la position de William Powell durant cette année 1936 où il n’a joué que dans des succès. Considéré à juste titre comme un classique de la comédie américaine, Mon homme Godfrey a également fait l’objet d’un remake éponyme en 1957, réalisé par Henry Koster, avec David Niven dans le rôle-titre.

Film compris dans le coffret sur la Screwball Comedy édité par les Editions Montparnasse

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 16 septembre 1936

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