L’œil du tigre : la critique du film + le test DVD (2018)

Documentaire | 1h18min
Note de la rédaction :
7/10
7
L'oeil du tigre : l'affiche du film de Raphael Pfeiffer

  • Réalisateur : Raphaël Pfeiffer
  • Date de sortie: 19 Déc 2018
  • Nationalité : Français
  • Acteurs : Laurence Dubois, Philippe Dubois, Lucas Dubois
  • Distributeur : Rezo Films
  • Editeur DVD : ESC Editions
  • Date de sortie vidéo : 23 avril 2019
  • Box-office France / Paris-périphérie :
Note des spectateurs :

L’œil du tigre est un documentaire fasciné par l’objet de son attention, une femme humble, souffrant d’un handicap oculaire qui ne l’a jamais abattue, mais qui au contraire en a fait une combattante cabossée du quotidien qui a toujours su sortir les griffes. Un bel exercice de cinéma du réel avec un objet dévoué à la réalité du cinéma.

Synopsis : Laurence vit au cœur de la Mayenne avec son mari agriculteur et ses deux garçons.
Son rêve, devenir championne de Viet Vo Dao, un art martial vietnamien.
Mais ce n’est pas une mince affaire, surtout quand on n’a jamais fait de sport, qu’on aime faire la fête et qu’on a perdu la vue il y a plus de quinze ans.

L’œil du titre se substitue à la cécité de l’héroïne

Critique : Sorti dans le circuit art et essai en décembre 2018, L’œil du tigre aurait pu prétendre à une estampille Streap-tease, dans sa fascination pour un personnage hors-normes, qui suscite les curiosités du spectateur. Curiosité saine ou pas, le regard que le film porte et par conséquent que le spectateur porte sur cette famille bécessit questionnement. L’objet du film est une femme qui a progressivement perdu la vue jusqu’à ses 33 ans, vivant de façon humble, dans une région oubliée de l’activité économique française, dont la vie entière pourrait être retranscrite dans un roman naturaliste (l’évocation de son agression sexuelle est bouleversante !).

Dans ce récit naturaliste d’une battante hors normes d’un quotidien lui normé par la réalité humble d’une vie sociale déterminée, on retrouve toujours ce souci dans le regard du spectateur cultivé, qui va éponger sa curiosité dans des salles de cinéma culturellement connotée par un certain élitisme de programmation, de ces cinémas que ne fréquenteraient pas dans leur quotidien la famille de Françoise…

Heureusement, dans L’œil du tigre, le documentariste Raphaël Pfeiffer, qui a passé des centaines d’heures  “en famille”, à filmer le quotidien selon les préceptes bien connus du “je m’efface en laissant tourner la caméra”, évite le misérabilisme pour se concentrer sur la dynamique d’une femme qui ne se laisse jamais accabler, voire décourager, puisant dans les interdits que lui impose son handicap, l’envie de se surpasser, notamment dans le sport, le Vovinam Viet Vo Dao, art martial tourné sur soi, où le jeu des mouvements reflète l’essentiel de Laurence Dubois, magnifique objet de cinéma, femme attachante qui refuse de se laisser abattre.

Photo issue du documentaire L'oeil du tigre

© GoGoGo Films Deselby Productions

Une mère courage

Dans l’oubli de la caméra ou avec une franchise expiatrice, en dehors des beaux moments sportifs, c’est bien dans la relation à sa famille et notamment à ses enfants qu’elle grandit encore plus. Les aléas de mère, avec ses confidences à son bout de chou, son bâton de vieillisse, qu’elle qualifie de “chouchou” pour lui remonter le moral, car elle apparaît trop mûre par rapport aux autres parents de l’école, et qu’elle ne pourra jamais lui offrir de petit frère ou de petite sœur, car c’est trop tard, soulignent l’importance de l’amour maternel appuyé qu’elle porte sur chacun. L’œil du tigre est un titre habité par la vue perçante de l’animal gracieux qui témoigne de la réflexion intérieure d’une femme qui pleure ce qu’elle aperçoit du quotidien d’efforts de sa famille, des frustrations qu’elle peut occasionner mais auxquelles elle répond par une présence indéfectible.

Bouffant la vie jusqu’au final en boîte de nuit où Françoise n’est plus que lumière, seule avec les vibrations d’une musique techno qui la transcende, la mère courage n’en oublie pas d’être femme, s’épanouissant par le corps et ce besoin universel de singularité dans un mode de formatage que la société aimerait lui imposer, mais dans lequel elle refuse de se conformer.

Raphaël Pfeiffer semble avoir compris l’objet de son attention mieux que personne, et dans son cinéma du réel, le jeune cinéaste gagne en galon en faisant déborder son film d’une humanité magnifique.

Critique : Frédéric Mignard

Jaquette DVD du film L'oeil du tigre

© GoGoGo Films Deselby Productions, Rezo Films, ESC éditions

Le test DVD

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Compléments : 0/ 5

Aucun. Pour une œuvre qui comprend des centaines d’heures de rushs, c’est décevant. Il était important d’avoir un aperçu de l’approche du documentaire par le réalisateur lui-même, pour donner davantage de contexte sur cette rencontre humaine et cinématographique.

Images : 3 / 5

La restitution SD est sommaire, avec une définition trop juste pour prétendre correspondre aux canons contemporains.

Son : 3.5 / 5

Avec des incursions rares, mais puissantes et toujours à propos de la musique, la piste 5.1 est souvent juste, surtout dans un environnement où le sonore est essentiel pour la protagoniste, héroïne de sa propre vie, car frappée de cécité. On notera d’ailleurs la présence d’une piste en audiodescription.

 

Les sorties de la semaine du 19 décembre 2018

L'oeil du tigre : l'affiche du film de Raphael Pfeiffer

© GoGoGo Films Deselby Productions, Rezo Films

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