La femme qui faillit être lynchée : la critique du film et le test blu ray (1954)

Western | 1h27min
Note de la rédaction :
9/10
9
La femme qui faillit être lynchée

  • Réalisateur : Allan Dwan
  • Acteurs : Brian Donlevy, John Lund, Audrey Totter, Joan Leslie
  • Date de sortie: 30 Juil 1954
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Woman they almost lynched
  • Distributeur : Les Films Fernand Rivers S.A.
  • Distributeur : Sidonis Calysta
  • Date de sortie vidéo : 9 septembre 2019
  • Box-office France / Paris-Périphérie : 381 062 entrées / 56 680 entrées
Note des spectateurs :
Un western unique en son genre, mettant en avant trois femmes dans les rôles principaux. On apprécie d’autant plus que le film est diablement efficace.

Synopsis : 1865. Sally Maris rejoint son frère Bill qui tient le saloon de Border City, mais Bill est tué par Lance Horton qu’il menaçait. Pour payer les dettes de son frère, Sally est obligée de diriger le saloon. Elle se bat avec Kate Quantrill, la femme du chef de guerre, et affronte celle-ci dans un duel au revolver qu’elle remporte. Lorsque les Nordistes investissent la ville, Sally cache Kate et Lance Horton, qui en réalité est un capitaine sudiste.

Critique :  De toute la salve de westerns sortis par l’éditeur Sidonis Calysta le 9 septembre 2019, La femme qui faillit être lynchée est sans doute le plus singulier et le plus enthousiasmant. Le cinéaste Allan Dwan dispose d’une filmographie conséquente dans des genres très différents. Le western est à cet égard un domaine qu’il a peu abordé.

Femme sur le point d'être pendue

Copyright Republic Pictures – Sidonis Calysta

Et pourtant on lui doit au moins deux grands westerns. Le meilleur d’entre eux est le rugueux Quatre étranges cavaliers, sorti en 1954, avec un John Payne parfait devant sauver sa peau dans une ville où plane l’ombre du maccarthysme. L’autre, La femme qui faillit être lynchée, sorti l’année précédente, ne manque pas non plus d’attrait. Déjà, le titre aiguise inexorablement notre curiosité. Et tout au long du visionnage du film on ne sera pas déçu. L’introduction démarre avec une scène insolite, typique de l’humour de Dwan : des gens s’affairent pour assister à un lynchage, comme s’il s’agissait d’un spectacle ! Dwan répond par une légèreté de ton à un sujet grave. Toutefois, il ne s’agit absolument pas d’une parodie.

L’histoire proposée est certes étonnante – et on n’est pas au bout de nos surprises – mais elle traitée de façon sérieuse par Dwan qui est convaincu de ce qu’il nous raconte. On se retrouve ici en 1865 à Border City, une ville située sur la frontière entre le Nord et le Sud. La ville est gérée par une mairesse, Delilah Courtney, bien décidée à conserver la neutralité de sa ville. Une femme aux commandes d’une ville, voilà qui n’est pas fréquent dans un western. La suite l’est encore moins avec deux autres femmes occupant les rôles principaux.

Le personnage central de l’histoire est celui de Sally Maris (excellente Joan Leslie), venue initialement rejoindre son frère à Border City. En un temps record elle passe du statut de jeune femme respectable à celui de tenancière de saloon. Le film est sans temps mort et les rebondissements sont aussi nombreux qu’inattendus.

Un film féministe détournant les codes du western pour notre plus grand plaisir

Joan Leslie pointant une arme

Copyright Republic Pictures – Sidonis Calysta

Une des grandes forces d’Allan Dwan est sans conteste de parvenir à nous rendre crédible une histoire abracadabrantesque. Comme dans tout bon western qui se respecte, on a droit à une bagarre bien virile et à un duel à l’extérieur. Sauf que dans le cas présent les adversaires sont deux femmes : la mignonne Sally Maris opposée à Kate (Audrey Totter, femme fatale dans nombre de films noirs), épouse du sanguinaire Quantrill. Ces deux scènes sont filmées très sérieusement avec une tension palpable, notamment pour le duel dans la rue.

La femme qui faillit être lynchée utilise les codes du western pour les détourner avec un plaisir évident. Dwan apprécie tous ses personnages, faisant preuve d’une réelle bienveillance (pour le sanguinaire Quantrill, il adapte certes l’Histoire à sa façon…). Les hommes sont relégués au second plan et paraissent effacés – comme les femmes habituellement ?. Pourtant il s’agit d’acteurs reconnus : Quantrill est joué par Brian Donlevy, le troublant capitaine Horton par John Lund et le jeune Jesse James par Ben Cooper.

Allan Dwan ne dévie jamais de sa trajectoire féministe. Comme l’indique la mairesse de Border City à Sally Maris : « Vos clients sont des hommes. On en fait ce qu’on en veut. » Ce postulat de la prédominance des femmes dans un western des années 50 est à mettre au crédit de Dwan. Jamais on n’avait poussé cette idée de façon aussi singulière.

Il faut d’ailleurs reconnaître la qualité de la distribution…féminine. Nina Varela interprète une mairesse convaincante. Quant à Audrey Totter, si elle appuie parfois un peu trop sur côté charme, elle se révèle à l’aise dans le rôle de Madame Quantrill. Surtout, on retient la prestation de Joan Leslie, passant aisément du rôle de la Lady ayant des principes à celui d’une tenancière déterminée dans ses choix.

Joan Leslie au chevet de son amoureux

Copyright Republic Pictures

Ce western est éminemment féministe et il le prouve par les décisions de ses protagonistes. Ces femmes agissent avant tout par amour, pour sauver leurs hommes. Ah que c’est beau !

On regrettera seulement un happy end tiré par les cheveux et une volonté de justifier le titre du film. On pardonne aisément à Dwan cette petite erreur. En effet, La femme qui faillit être lynchée peut se targuer d’un postulat enthousiasmant, d’un scénario riche, d’actrices de talent et d’une mise en scène à la hauteur. Et il convient de signaler que si les scènes d’action sont rares, elles se révèlent très efficaces. Voilà une raison de plus d’apprécier ce western méconnu (à tort) de 1953.

 

Test blu-ray

Compléments : 4/5

Sidonis Calysta a saisi l’importance de ce western, en regorgeant le blu-ray de bonus pertinents. Le premier d’entre eux est l’habituelle présentation du film par Patrick Brion (10 minutes) qui revient sur la prédominance des femmes dans ce western et sur le fait que considérer cette œuvre comme une parodie du genre est absurde. On a également une présentation par Philippe Ferrari (10 minutes). Si celle-ci est intéressante et permet de saisir l’aspect original du film, elle se révèle un peu redondante avec les propos de Patrick Brion.

Le dernier des bonus, et non des moindres, est une présentation de La femme qui faillit être lynchée par Bertrand Tavernier. Dans ce qui constitue sa plus longue intervention pour le bonus d’un western de Sidonis Calysta (35 minutes), Bertrand Tavernier fourmille son analyse de différents détails. Cela constitue un excellent complément pour quiconque a apprécié le film et veut en savoir plus au regard de l’histoire du western.

Gageons que Sidonis Calysta continue sur cette voie en nous offrant des bonus bien fournis.

Image : 5/5

Un blu-ray de grande classe permettant de visionner le film dans d’excellentes conditions. Les contrastes sont bien rendus et aucun défaut notable n’a été constaté.

Son : 4/5

Le DTS-HD master audio 2.0 est lui aussi de qualité avec un son très bien rendu. Pour un film jouant beaucoup sur les dialogues, c’est appréciable.


Critique + Test blu ray : Nicolas Bonnes 

Collection Western de Légende

Affiche originale de Woman they almost lynched

Copyright Republic Pictures

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