Brüno : la critique du film (2009)

Comédie, LGBTQ, Trash | 1h23min
Note de la rédaction :
8/10
8
Brüno, l'affiche

Note des spectateurs :

Sacha Baron Cohen introduit à l’écran un personnage hors du commun dans une satire docu(l)mentaire très active dans la provocation. Bref, un pamphlet contre l’homophobie, dégénéré et rentre-dedans, forcément hilarant, qui prend par derrière toutes les communautés, y compris celles qu’il défend.

Synopsis : Les aventures du personnage de Brüno, un homosexuel autrichien, roi de la mode créé par Sacha Baron Cohen pour son émission de télévision Da Ali G Show.

Critique : Les anales, désolé, les annales de la comédie peuvent rougir de l’arrivée de Brüno parmi les grands classiques comiques. Non seulement, s’agit-il de l’œuvre la plus drôle vue ces dernières années, mais surtout la nouvelle comédie des auteurs de Borat s’inscrit comme l’apologie du subversif, un suppositoire dans le derrière du tout bien-pensant qui implose là où cela fait le plus mal, c’est-à-dire au plus profond des mentalités arriérées et étriquées.
L’humour subversif et dévastateur vise le communautarisme homosexuel, religieux, juif, musulman, les hétérosexuels du terroir, les blacks du ghetto et les amateurs de talk-shows, les militaires, le show-biz et le rigolos de la mode… Tout le monde en prend pour son grade dans une apologie du mauvais goût irrésistible qui aurait pu valoir au film de Larry Charles Religolo une très lourde interdiction, d’autant que niveau cul, porno excepté, on aura rarement vu autant d’attributs masculins jetés en pâture aux mirettes.

Traité sur le mode du faux documentaire, qui ajoute au mode comique, Brüno relate l’exil d’un journaliste de la mode autrichien déchu vers l’eldorado hollywoodien où il va tenter de devenir célèbre par tous les moyens. Prêt à tout pour remuer son petit popotin sur scène, il va tenter de résoudre le conflit israélo-palestinien (car c’est très tendance la politique), organiser des interviews avec des vedettes (caméos de Paula Abdul et d’Harrison Ford inclus), adopter un bébé noir à la façon de Madonna et d’Angelina Jolie (en fait le môme a été échangé contre un Ipod lors d’un détour shopping en Afrique noire), faire un film X avec un politicien, participer à un talk-show et, comme rien ne marche, tenter par tous les moyens de devenir hétéro pour réussir une carrière de comédien comme Kevin Spacey et Tom Cruise (les rumeurs d’homosexualité sur les deux comédiens étant légion à la sortie du film…).

L’imbécillité crasse de Brüno, emblème d’un monde branché et superficiel, rappelle le personnage de Candide à la découverte du monde. Le récit quasi picaresque n’est évidemment pas sans faire écho aux péripéties du reporter kazakh Borat qui découvrait les USA avec sa crédulité et ses préjugés. Face à la vraie vie, l’homosexuel fantasque à la sexualité exacerbée et aux goûts vestimentaires kitsch, devient immédiatement la victime consentante de sa propre bêtise et des intolérances agressives. Le procédé de tourner avec des anonymes a valu à l’équipe pas mal de sueurs froides. Sacha Baron Cohen, créateur du personnage, qui joue également le rôle éponyme, s’est placé à plusieurs reprises en danger de mort en se fourvoyant dans la provocation la plus chargée parmi des homophobes endurcis, prêts à manifester leur haine viscérale pour les impies par la violence.

La frontière entre la réalité et l’écrit est troublante et rend le spectacle aussi étonnant qu’hilarant. L’incroyable cohérence qui en ressort, la finesse des dialogues paradoxalement lourds en réflexions politiquement incorrectes… tout cela fait de Brüno la comédie de studio la plus outrancière jamais tournée. Une page de l’Histoire du cinéma, édulcorée par la bande-annonce (pour une fois le trailer en dévoile peu), qui n’a laissé à sa sortie personne indifférent. Ses 60M$ au box-office américain relèvent du miracle, en France, en revanche, le documenteur a dû se contenter d’un tiers de la fréquentation de Borat (782 000 pour ce dernier).

 

 

 

Crédits Sony Pictures International Releasing

 

 

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