En 2017, Mariana Montero sortait en salle sa vision de Nuit Debout, à travers le documentaire L’Assemblée. En 2020, Jeanne Dressen revient sur le mouvement, avec une œuvre accouchée dans la difficulté, d’une indépendance totale. Bien lui en a pris, A ma place paraît, malgré le décalage temporel entre le tournage des images et la sortie, plus que jamais d’actualité. Il en ressort une exaltation et une véritable dynamique établie sur la durée.
Synopsis : Savannah cherche sa place. Actrice d’une révolution qui n’a pas eu lieu, elle est une fille de la classe ouvrière et réinvente la politique. De Nuit Debout à l’Ecole Normale Supérieure, Savannah doute, rêve, lutte et apprend. Elle se cherche un avenir.
Critique : En partant caméra à la main observer le mouvement massif qui s’est élevé contre la loi Travail du gouvernent de Manuel Valls, Jeanne Dressen, qui s’était passionnée par les regroupements des Indignés en 2011, se fait l’écho d’une colère, d’un questionnement générationnel quant à l’avenir.
A ma place, même en 2020
Elle s’intéresse plus particulièrement à une étudiante en sociologie de 25 ans, Savannah Abselme. Une jeune femme qui ose prendre la parole dans des cessions bavardes où l’on entend beaucoup les hommes. Le courage, la conviction, le militantisme de la jeune femme vont engager la réalisatrice sur un film témoignage, d’à peine une heure, où elle écoute la colère d’une jeunesse qui gronde, tout comme les débats plus intimistes en aparté, de la jeune femme hors des manifestations. Celle-ci s’interroge sur son avenir, Normal Sup, la fatigue d’un débat qui pourrait la dépasser. Héroïne malgré elle du film aux images désormais gravées, elle a le charisme d’une lutte collective, altermondialiste, écologiste. On sent poindre l’exaltation, mais également une déprime possible face à la perspective de l’échec.
De ce point de vue, la réalisatrice n’en est pas une documentariste neutre. L’agitation spectaculaire dans la rue et les moments de vie, d’outrage qu’elle capte s’additionnent à sa propre conviction. Elle donne de l’emphase à des images où le travail cinématographique est de coller le plus possible au réel.
L’heure de la contestation sociale reprend
Production auto-produite qui a pris plus de quatre années pour émerger, avec une fin de post-production en 2019, A ma place trouve sa place dans la quasi-clandestinité des écrans numériques en période post-confinement de La Vingt-Cinquième Heure, pour une première en e-cinéma, avant de reprendre son combat de rue, en vrai, au cinéma, le 9 septembre 2020, grâce au distributeur engagé DHR/A vif Films qui veut alimenter les débats contemporains d’une société agitée.
Après un été anesthésié, l’heure de la contestation sociale reprend en France. Succédant à la crise des gilets jaunes et accompagnant l’annonce des plans sociaux post-Covid, le combat de rue pour de nombreux indignés donne un forum à cette sortie salle, dans une France polarisée, notamment autour du thème de la répression policière que la réalisatrice, Jeanne Dressen, souhaite saisir. Il lui a fallu quatre ans pour accomplir ce doux pamphlet utopiste qui relève donc d’une double vision, celle d’un cinéma engagé (le vecteur) et celle sur un modèle de société à défendre (l’objectif).
L’heure de la rentrée sociale a vraiment commencé.
Sorties de la semaine du 9 septembre 2020
Sortie salle : le film a ouvert en exclusivité parisienne à L’Espace Saint-Michel à Paris