Sans jamais devenir une star bankable, Michelle Pfeiffer a été une actrice très appréciée entre 1987 et l’an 2000.
Si il faut attendre 1984 et son second rôle féminin marquant dans Scarface de Brian De Palma, pour vraiment apprécier Michelle Pfeiffer au cinéma, les Français ont pu la voir à deux reprises au cinéma, au tout début des années 80, en second rôle dans le méconnu Charlie Chan & la malédiction de la reine dragon, de Clive Donner, avec Peter Ustinov, qui ne sera distribué que dans quelques cinémas du nord de la France, et surtout dans Grease 2, la suite où elle incarne le rôle féminin principal. Un bide qui ne fera pas d’elle l’idole des jeunes de sa génération.
Michelle Pfeiffer, égérie des années 80
Outre Scarface, les amateurs de cinéma de genre la découvre en 1984 dans le film de Richard Donner, dans le rôle séduisant d’une femme oiseau : Ladyhawke, la femme de la nuit, est un conte moyenâgeux intéressant. Puis les lecteurs de Starfix peuvent applaudir sa magnifique plastique chez John Landis, dans Série noire pour une nuit blanche. Le premier est un succès, le second, un échec.
Toutefois, en 1987, Pfeiffer saisit l’opportunité d’une vie : figurer au casting de premier plan des Sorcières d’Eastwick, à égalité de traitement avec Cher et Susan Sarandon, face au tout puissant Jack Nicholson. Le film de George -Mad Max- Miller, cartonne, et la voilà définitivement lancée.
1988-1989, les années magnifiques
Entre 1988 et 1990, elle réussit un sans faute, avec trois de ses meilleures compositions : Veuve mais pas trop… comédie noire de Jonathan Demme. Un succès du cinéma indépendant. Puis Les liaisons dangereuses de Stephen Frears face à Malkovich et Glenn Close, qui lui vaut une nomination aux Oscars. Le film est un phénomène et fait d’elle une actrice incontournable. Puis, en 1989, elle apparaît dans le film à Oscars Susie et les Baker Boys, de Steve Kloves, avec Jeff Bridges. Encore un succès, même si quelque peu oublié par la suite.
Catwoman et puis voilà
Désormais, Hollywood s’intéresse pleinement au potentiel de star de Michelle Pfeiffer, dont le jeu est solide et la plastique sublime. L’industrie lui propose donc des projets commerciaux : Tequila Sunrise, polar noir sur feuille en papier glacé, réalisé par le scénariste Robert Towne, avec Mel Gibson (1989), le film d’espionnage La maison Russie de Fred Schepisi, avec Sean Connery et Roy Scheider, la comédie romantique médiocre Frankie et Johnny de Garry Marshall, et évidemment Batman : le défi, où son interprétation de Catwoman pour Tim Burton suscite les fantasmes masculins des geeks de l’époque. Il s’agira de son troisième film millionnaire en France, après Les sorcières d’Eastwick (1 158 000), et Les liaisons dangereuses (1 695 000).
Le cinéma d’auteur la tente à nouveau avec la proposition essentielle de Martin Scorsese, Le temps de l’innocence. Un petit succès pour un très grand film, avec notamment l’immense Daniel Day Lewis. En revanche, le film à Oscars foireux sur fond de racisme à l’époque de la lutte pour les droits civiques, aux USA, Love Field, de Jonathan Kaplan, est un four monstrueux. Il lui vaut néanmoins une nomination surprise aux Oscars.
Le naufrage d’une carrière
Aussi, l’on retrouve logiquement Michelle Pfeiffer dans une suite de films commerciaux plus ou moins réussis pour relancer sa carrière : l’engageant Wolf de Mike Nichols, avec Jack Nicholson, qui surfe sur le succès du Dracula de Coppola, sans en atteindre l’excellence, Esprits rebelles, premier film jeune de la part de la comédienne où, en prof sympa des quartiers sensibles, elle fait bonne impression (et de deux films millionnaires en plus !). Mais Pfeiffer se perd de plus en plus dans un cinéma désuet qui la sort définitivement de la zone d’intérêt des cinéphiles exigeants… La romance avec Robert Redford (Personnel et confidentiel), signée Jon Avnet, celle avec George Clooney (Un beau jour), puis celle avec Bruce Willis (Une vie à deux, de Rob Reiner) accentuent la fadeur de son jeu. L’insipidité de sa carrière se poursuit avec Aussi profond que l’océan d’Ulu Grosbard, avec Whoopi Goldberg. On est dans le pire du cinéma des années 90, larmoyant, sans réalisation réelle. Meg Ryan pourrait la remplacer dans chacun de ses rôles, tellement son cinéma sonde le vide d’une industrie qui produit à la chaîne tout et n’importe quoi.
Ultime sursaut chez Zemeckis
Dans Apparences, elle joue une dernière fois le rôle de victime, face à Harrison Ford machiavélique. Le thriller de Robert Zemeckis est son dernier succès personnel et devient son plus gros hit français, avec 1 842 000 spectateurs. Un sursaut, à l’aube des années 2000.
Mais le film à Oscars navrant, Sam je suis Sam, avec Sean Penn, nous consterne immédiatement après, tout comme le film au féminin Laurier blanc, avec Robin Wright et Renée Zellwegger. La carrière de Pfeiffer vire au naufrage. On ne verra jamais la comédie romantique vendue comme cougar I could never your woman, d’Amy Heckerling (Allo maman ici bébé), où la vedette tombe amoureuse de Paul Rudd, dix ans plus jeune qu’elle. Cet énième faux pas est exploité en salle sur quelques marchés mineurs, et directement en vidéo en France et… aux USA ! Tout est dit.
Enfin garce !
C’est donc en vieillissant, avec un caractère raffermi que l’on retrouvera avec plaisir Michelle Pfeiffer : en mégère dans Hairspray, remake avec John Travolta du film de John Waters, en sorcière dans Dark Shadows de Tim Burton qui flirte avec les deux millions d’entrées en France, en épouse musclée d’un gars de la mafia dans le Malavita de Luc Besson. En 2019, elle est prête au génocide en reine monstrueuse dans Maléfique : le pouvoir du mal, de Disney.
Michelle Pfeiffer, star vieillissante
Alors que qualitativement Chéri, de Stephen Frears, en 2009, film en costume magnifique sur le vieillissement, aurait pu relancer sa carrière dans le cinéma de l’exigence, elle souffre de la nomenclature de vieille gloire, effectivement vieillissante : Stardust le mystère des étoiles de Matthew Vaughn est un bide, sa présence dans le film choral nanardesque Happy new year de Garry Marshall est un signe, Darren Aronofsky l’entraîne dans le fiasco (intéressant) de Mother, où elle reprend enfin le goût du risque ; mais au lieu d’en prendre de la graine, elle finit par cachetonner, à l’instar des vieilles stars dans les années 70, contraintes aux apparitions dans des films catastrophes, dans des productions hollywoodiennes collectives à gros budget : Le crime de l’Orient Express de Branagh, Ant-Man et la guêpe (où elle est très mauvaise), et Avengers : Endgame. La nostalgie d’un passé qui n’est plus.