Née au Danemark où elle a démarré sa carrière comme chanteuse dans des cabarets, Anna Karina est connue notamment pour ses rôles chez Jean-Luc Godard.
Elle joua évidemment pour Godard, mais également Deville, Varda, Marker, Vadim, Rivette, Schlöndorff, Jacquot, Cukor, Fassbinder, Raoul Ruiz et Jonathan Demme.
« Qu’est-ce que j’peux faire ? J’sais pas quoi faire »
À l’instar de Jean Seberg dans À bout de souffle et Brigitte Bardot dans Le Mépris, Anna Karina est associée aux œuvres de la première période de Jean-Luc Godard (1960-65), à savoir la plus novatrice et créatrice, celle qui marquera à jamais l’histoire du cinéma. Et Anna Karina a tourné plusieurs films avec le cinéaste dont elle fut l’épouse de 1961 à 1967. Née au Danemark, elle débuta par le mannequinat avant d’obtenir le premier rôle féminin du Petit Soldat (1960) et celui d’Une femme est d’une femme (1961) de Jean-Luc Godard, auprès de Jean-Paul Belmondo et Jean-Claude Brialy, autres enfants chéris de la Nouvelle Vague. Son jeu délicat et nuancé lui valut de gagner le Prix de la meilleure actrice au Festival de Venise.
Son plus beau rôle avec Godard fut sans doute celui Nana, la jeune femme de Vivre sa vie (1962), dont le paradoxe était de vouloir atteindre la liberté en se livrant à la prostitution : Karina y était sublime, et il n’est pas superflu de comparer les gros plans sur son visage à ceux que Dreyer avait effectués avec Falconetti dans La Passion de Jeanne d’Arc. Godard la dirigea ensuite dans Bande à part (1964), avant de la retrouver pour deux films sortis en 1965. Même s’il est permis de penser qu’Anna Karina jouait les faire-valoir de Belmondo dans Pierrot le Fou et d’Eddie Constantine pour Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution, l’actrice y était admirable, et l’on se souvient de la célèbre réplique « Qu’est-ce que j’peux faire ? J’sais pas quoi faire » dans Pierrot le Fou. Made in USA (1966) fut le dernier métrage de la collaboration Karina-Godard.
Anna Karina pour Godard certes, mais aussi Rivette, Delvaux, Fassbinder…
Après ces sommets, Anna Karina trouva un autre rôle important dans Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot, sorti en 1967. Ce chef-d’œuvre de Jacques Rivette, maltraité par la censure, est désormais une œuvre culte du cinéma français, et peut-être celui où les talents dramatiques de l’actrice sont le mieux mis en avant. La suite de la carrière cinématographique d’Anna Karina fut en demi-teinte, entre films d’auteur confidentiels et productions mineures, mais on peut retenir ses compositions dans Justine (1969) de George Cukor, Rendez-vous à Bray (1971) d’André Delvaux, Pain et chocolat (1973) de Franco Brusati, Roulette chinoise (1976) de Rainer Werner Fassbinder, L’Île au trésor (1985) de Raoul Ruiz, Cayenne Palace (1987) d’Alain Maline (nomination au César de la meilleure actrice dans un second rôle), ou Haut bas fragile (1994) de Jacques Rivette.
Anna Karina était également chanteuse (le tube Sous le soleil exactement de Gainsbourg), réalisatrice (Vivre ensemble, 1973 ; Victoria, 2008) et romancière. Elle avait reçu en 2014 le prix Henri Langlois d’honneur, pour l’ensemble de sa carrière de comédienne.
Filmographie
1960 : Le Petit Soldat de Jean-Luc Godard
1960 : Ce soir ou jamais de Michel Deville
1961 : Une femme est une femme de Jean-Luc Godard
1961 : Cléo de 5 à 7 d’Agnès Varda
1961 : Le Soleil dans l’œil de Jacques Bourdon
1961 : She’ll Have to Go de Robert Asher
1962 : Vivre sa vie de Jean-Luc Godard
1962 : Les Quatre vérités, sketch du Corbeau et le renard de Hervé Bromberger
1962 : Shéhérazade de Pierre Gaspard-Huit
1963 : Le Joli mai de Chris Marker
1963 : Dragées au poivre de Jacques Baratier
1963 : Un mari à prix fixe de Claude de Givray
1964 : La Ronde de Roger Vadim
1964 : Bande à part de Jean-Luc Godard
1964 : Le Voleur du Tibidabo de Maurice Ronet
1964 : De l’amour de Jean Aurel
1965 : Des filles pour l’armée (La soldatesse) de Valerio Zurlini
1965 : Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard
1965 : Alphaville de Jean-Luc Godard
1965 : Suzanne Simonin, la Religieuse de Diderot de Jacques Rivette
1966 : Made in USA de Jean-Luc Godard
1966 : Le Plus vieux métier du monde (sketch Anticipation) de Jean-Luc Godard
1966 : L’Étranger (Lo straniero) de Luchino Visconti
1967 : Tendres requins (Zärtliche Haie) de Michel Deville
1967 : Lamiel de Jean Aurel
1968 : Jeux pervers (The Magus) de Guy Green
1968 : Avant que vienne l’hiver (Before Winter Comes) de J. Lee Thompson
1969 : Michael Kohlhaas (Michael Kohlhaas – Der Rebell) de Volker Schlöndorff
1969 : Justine de George Cukor
1969 : La Chambre obscure (Laughter in the Dark) de Tony Richardson
1969 : Le Temps de mourir d’André Farwagi
1970 : L’Alliance de Christian de Chalonge
1971 : Rendez-vous à Bray d’André Delvaux
1971 : Carlos (en) de Hans W. Geißendörfer
1972 : Notre agent à Salzbourg (en) (The Salzburg Connection) de Lee H. Katzin
1972 : Vivre ensemble d’Anna Karina
1973 : Pain et Chocolat (Pane e cioccolata) de Franco Brusati
1975 : Les Œufs brouillés de Joël Santoni
1976 : Roulette chinoise (Chinesisches Roulett) de Rainer Werner Fassbinder
1976 : L’Assassin musicien de Benoit Jacquot
1977 : Ausgerechnet Bananen d’Ulli Lommel
1978 : Chaussette surprise de Jean-François Davy
1978 : Comme chez nous (en) (Olyan mint ottho) de Márta Mészáros
1979 : Historien om en moder (en) de Claus Weeke
1982 : Regina Roma de Jean-Yves Prat
1983 : L’Ami de Vincent de Pierre Granier-Deferre
1984 : Ave Maria de Jacques Richard
1985 : L’Île au trésor de Raoul Ruiz
1986 : Dernier été à Tanger d’Alexandre Arcady
1986 : Last Song de Dennis Berry
1987 : Cayenne Palace d’Alain Maline
1987 : L’Œuvre au noir d’André Delvaux
1990 : L’Homme qui voulait être coupable (Manden der ville være skyldig) de Ole Roos
1994 : Haut bas fragile de Jacques Rivette
2002 : La Vérité sur Charlie (The Truth About Charlie) de Jonathan Demme
2003 : Moi César, 10 ans ½, 1m39 de Richard Berry
2008 : Victoria d’Anna Karina