Assistante de Pabst, Delannoy et Ophuls, Jacqueline Audry réalise un court métrage en 1943 puis se lance dans le long métrage en 1946 avec Les Malheurs de Sophie, d’après la comtesse de Ségur.
Jacqueline Audry, une cinéaste méconnue
Elle devient alors, avec Nicole Vedrès, la seule femme cinéaste en France, après Alice Guy et Germaine Dulac, et avant Agnès Varda.
Ses films sont empreints d’un féminisme subtil, sans lourdeur militante, avec une prédilection pour des adaptations littéraires axées autour de délicats portraits de femmes. Elle est l’une des premières à traiter du désir féminin et des contraintes de la société patriarcale.
Elle adapte ainsi Colette avec Gigi (1949), Minne, l’ingénue libertine (1950), et Mitsou (1956), trois œuvres portées par l’interprétation de Danièle Delorme.
Jacqueline Audry ose évoquer les amours lesbiens avec Olivia (1951), d’après un roman de Dorothy Bussy, avec Edwige Feuillère et Simone Simon. Elle récidive en mode suggestif avec Huis clos, d’après la pièce de Sartre, interprété par Arletty et Gaby Sylvia.
Elle se montre tout autant inspirée dans La Garçonne (1957), d’après le roman de Victor Marguerite, avec Andrée Debar.
Une réalisatrice inclassable
La plupart des films de Jacqueline Audry sont dialogués par son époux, Pierre Laroche, et elle bénéficie de l’appui de techniciens et artistes majeurs, dont le directeur de la photo Christian Matras et le chef décorateur Jean d’Eaubonne.
La critique de l’époque lui est plutôt bienveillante, mais la considère comme une réalisatrice mineure. Les ligues de vertu et les commissions de censure s’émeuvent pour certaines œuvres, mais Audry évite le scandale de par l’image de « joliesse » associée, à tort, à son cinéma, aussi incompris à l’époque que celui d’Ophuls.
Les défenseurs de la Nouvelle Vague passent à côté d’une cinéaste qu’ils estiment appartenir à un cinéma académique, et les derniers films de Jacqueline Audry sortent dans l’indifférence générale, de C’est la faute d’Adam (1958) à Fruits amers (1967), adaptée de la pièce de sa sœur, Colette Audry.
Jacqueline Audry termine sa carrière à l’ORTF et voit son nom injustement effacé des histoires du cinéma, à quelques rares exceptions, comme le Dictionnaire des cinéastes de Georges Sadoul.
Une restauration d’Olivia, ressorti en salle en 2018, donne envie de réévaluer une cinéaste méconnue.