Maurice Pialat

Réalisateur, Scénariste, Producteur, Acteur
L'enfance nue de Maurice Pialat, affiche

Personal Info

  • Nationalité : Français
  • Date de naissance : 31 août 1925 à Cunlhat, Puy-de-Dôme (France)
  • Date de décès : 11 janvier 2003, à l'âge de 77 ans, à Paris (France)
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Biographie

Note des spectateurs :

Les humeurs de Maurice Pialat sur l'actualité cinéma

Cinéaste naturaliste, à part dans le paysage français, Maurice Pialat, monstre de talent, au caractère tempétueux qui lui a valu bien des invectives, est surtout l’un de nos plus grands auteurs. Il a été césarisé, palmé. Il a fasciné des générations de cinéphiles, à l’instar de Truffaut qu’il n’aimait pas, ou de Varda.

Maurice Pialat revient de loin. Lui qui rêvait de vivre de ses peintures peint, avec une caméra chirurgicale des fragments de vie, l’affect, au détriment d’une logique purement chronologique.

Ses courts métrages l’entraînent. L’amour existe, pour lequel il ne s’est pas inspiré par sa vie personnelle, contrairement à la plupart de ses œuvres, est un essai concluant, primé à Venise. Tourné en réaction de l’avènement de Truffaut et de la Nouvelle Vague, qui lui était contemporain, ses chroniques turques l’éloignent du mouvement de Godard…

Le docufiction comme maître mot

Son premier long, Maurice Pialat ne peut le concrétiser qu’à l’âge de 43 ans. L’enfance nue est un choc où il met en place les rouages d’un cinéma dont les Dardenne et autres Emmanuelle Bercot se feront les héritiers. Des acteurs non professionnels dans des situations de fiction étrangement documentaires dans leur réalisme et leur sujet (un gamin trimbalé par l’assistance publique, d’une famille d’accueil âgée à un centre de redressement). Pialat décroche le Prix Jean Vigo, se fait un nom et il s’en retourne à la télévision pour filmer une jeunesse pendant la Première Guerre mondiale.

L'enfance nue de Maurice Pialat, affiche

Parc Films, Parafrance, Renn Films, Les Films du Carosse. Illustrateur : René Ferracci

Le triomphe de Nous ne vieillirons pas ensemble

Son second long métrage est une réussite. Nous ne vieillirons pas ensemble va à Cannes, Jean Yanne y remporte un prix d’interprétation ; Marlène Jobert y est formidable. Cette œuvre sur le couple marque sa carrière comme son premier succès populaire.

La traversée du désert

L’auteur Pialat retournera à Cannes en 1980 pour Loulou (Huppert, Depardieu), et évidemment pour la Palme d’Or controversée, Sous le soleil de Satan (1987). Entre-temps, il traverse le désert, traversée qu’il a lui-même, de son aveu, provoquée. Quand tout le monde le lui déconseillait, il réalise La gueule ouverte, œuvre âpre sur la maladie, le cancer, avec Nathalie Baye et Philippe Léotard. L’effroyable échec (27 000 entrées) détricote ce qu’il a construit en quelques années et il perd la société qu’il a fondée. L’échec le touche. Inspiré dans ce film par la mort de sa propre mère et ses souvenirs personnels tragiques, le cinéaste souffre. Il s’entête dans la rancœur. Il devra attendre plus de quatre ans pour revenir à un projet différent, un petit budget sans stars, et avec la fraîcheur d’un casting de fin d’adolescence. Passe ton bac d’abord le réconcilie plus ou moins avec le public en 1979.

Loulou et le retour cannois

Maurice Pialat peut retrouver les stars et le tapis rouge de la Croisette avec Loulou. Le film marque les retrouvailles entre Depardieu et Isabelle Huppert après Les Valseuses, est un triangle amoureux sur fond de classes sociales (Guy Marchand joue le rôle de l’époux bourgeois de Huppert). Les relations sont houleuses entre Depardieu et Pialat sur le tournage. Il faudra la médiation du producteur Daniel Toscan du Plantier pour rabibocher les deux têtes de lard, qui tourneront aussi Police (1985). C’est après avoir découvert Loulou achevé que Depardieu acceptera la réconciliation qui s’imposait.

Affiche de Passe ton bac d'abord de Maurice Pialat

© Covillault

A nos amours, l’œuvre d’un maître

Entre les deux films, Pialat connaît un succès surprenant avec A nos amours. Il y révèle sa muse, Sandrine Bonnaire, sauvageonne du bitume des années 80. Il la dirigera à nouveau dans Police et en Mouchette, dans Sous le soleil de Satan. L’actrice y est époustouflante, comme dans A nos amours qui lui vaut le César de la révélation féminine en 1984. Cette année-là, Pialat remporte aussi le César du meilleur film, qui obtient également le Prix Louis Delluc. A nos amours est un film bouleversant sur adolescence à fleur de peau. Son succès, proche du million d’entrées, ne pouvait pas en être autrement.

 

Maurice Pialat rêve avec Police d’un succès populaire

1984, Pialat rêve d’un vrai succès populaire. Il accepte l’offre de Daniel Toscan du Plantier et réalise le plus gros budget de sa carrière. Police est un film de stars (Depardieu, Marceau, Bonnaire, Anconina) qui se frotte à la compétition de Venise. Sur l’affiche, le nom de Catherine Breillat, qui a écrit le projet, est encore plus gros que celui du second rôle Sandrine Bonnaire…

 

La Palme polémique de Sous le soleil de Satan

En 1987, c’est la polémique Sous le soleil de Satan qui brûle la Croisette. L’adaptation de Georges Bernanos (déjà adapté à l’écran par Bresson, avec Journal d’un curé de campagne) divise. Beaucoup voient Nikita Mikhalkov ou Wim Wenders palmés, mais c’est l’austérité de Pialat qui rafle la Palme remise par Catherine Deneuve et Christophe Lambert, sous la bienveillance d’Yves Montand, président du Jury. Une partie de la grande salle du palais des festivals siffle Maurice Pialat qui, vexé, répond à ses détracteurs : « Si vous ne m’aimez pas, je ne vous aime pas non plus. » Osé. Le film remarquable fourmille de qualités, mais sera une semi-déception commerciale, malgré la présence exceptionnelle des acteurs principaux, Depardieu et l’hérétique Sandrine Bonnaire.

Maurice Pialat se voit en Van Gogh

Artiste peintre, Pialat connaîtra un beau succès public avec son film biopic rugueux, mais lumineux, sur Van Gogh et ses derniers jours à Auvers-sur-Oise. On est en 1991, le portrait miroir en forme de mise en abîme, permet à Maurice Pialat de connaître le dernier succès de sa carrière, avec plus d’1 300 000 entrées. Van Gogh, pour Gaumont, est un projet conséquent. Les nominations aux César sont nombreuses. L’auteur râle, malgré tous ses efforts : seul Jacques Dutronc est récompensé d’un César pour le rôle-titre.

 

Une histoire de famille

Son ultime film, en 1995, est Le garçu, pour lequel le cinéaste retrouve son alter ego Gérard Depardieu une quatrième fois. Le long métrage, au caractère intimiste, paraît minuscule à côté de ses prédécesseurs. Il arbore un aspect familial, puisque le cinéaste y filme son fils, Antoine, âgé de quatre ans. Pialat a eu Antoine à l’âge de 66 ans, avec Sylvie Pialat, qu’il a rencontrée sur le tournage d’A nos amours, en 1983.

Maurice Pialat ne tournera plus après cet échec. Diminué par la maladie, il décède en 2003 laissant le cinéma orphelin. Ses portraits, ses humeurs, sa radicalité manqueront au 7e art hexagonal. On lui trouvera bien des disciples (les Dardenne, notamment), mais son caractère bien trempé, c’est bien chez le Danois Lars von Trier qu’on le retrouvera. Pourtant leurs cinémas n’ont rien à voir, si ce n’est avoir osé filmer l’Antéchrist ?

Pialat nous manque. En 2021, la plateforme Prime Vidéo propose son œuvre sur la plateforme d’Amazon ; Capricci diffuse en 2 volets l’intégralité de ses films en juillet et aout 2021. Un nouveau départ pour les cinéphiles qui ont beaucoup à rattraper? Notamment, redécouvrir en master 2K et 4K au cinéma, cette œuvre impériale que l’on a tant aimée.

Frédéric Mignard

Filmographie :

(Réalisateur, cinéma)

  • 1968 : L’Enfance nue
  • 1972 : Nous ne vieillirons pas ensemble
  • 1974 : La Gueule ouverte
  • 1978 : Passe ton bac d’abord
  • 1980 : Loulou
  • 1983 : À nos amours
  • 1985 : Police
  • 1987 : Sous le soleil de Satan
  • 1991 : Van Gogh
  • 1995 : Le Garçu

La polémique Sous le soleil de Satan

Maurice Pialat par Serge Toubiana

L'une des dernières interviews de Maurice Pialat

A la sortie d'A nos amours

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