Rouge : la critique du film (2021)

Thriller, Drame | 1h28min
Note de la rédaction :
7/10
7
Rouge de Farid Bentoumi (affiche)

  • Réalisateur : Farid Bentoumi
  • Acteurs : Céline Sallette, Alka Balbir, Sami Bouajila, Olivier Gourmet, Zita Hanrot, Henri-Noël Tabary
  • Date de sortie: 11 Août 2021
  • Nationalité : Français, Belge
  • Titre original : Rouge
  • Titres alternatifs : Red Soil (titre international) / Czerwona ziemia (Pologne)
  • Année de production : 2020
  • Scénariste(s) : Farid Bentoumi, Samuel Doux, Audrey Fouché, Gaëlle Macé
  • Directeur de la photographie : Georges Lechaptois
  • Compositeur : Pierre Desprats
  • Société(s) de production : Les Films Velvet, Les Films du Fleuve, Auvergne Rhône-Alpes Cinéma, Radio Télévision Belge Francophone (RTBF), VOO, BE TV
  • Distributeur : Ad Vitam
  • Éditeur(s) vidéo : Ad Vitam Vidéo
  • Date de sortie vidéo : 7 décembre 2021
  • Box-office France / Paris-périphérie : 86 578 entrées / 25 298 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Digital 5.1
  • Festivals et récompenses : Sélection du Festival de Cannes 2020
  • Illustrateur / Création graphique : -
  • Crédits : Les Films Velvet, Les Films du Fleuve
Note des spectateurs :
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Thriller écologique efficace, Rouge dénonce aussi bien les agissements des grands industriels que le consentement général d’une société qui préfère regarder ailleurs. Une réussite.

Synopsis : Nour vient d’être embauchée comme infirmière dans l’usine chimique où travaille son père, délégué syndical et pivot de l’entreprise depuis toujours.
Alors que l’usine est en plein contrôle sanitaire, une journaliste mène l’enquête sur la gestion des déchets. Les deux jeunes femmes vont peu à peu découvrir que cette usine, pilier de l’économie locale, cache bien des secrets.
Entre mensonges sur les rejets polluants, dossiers médicaux trafiqués ou accidents dissimulés, Nour va devoir choisir : se taire ou trahir son père pour faire éclater la vérité.

Inspiré d’une histoire vraie

Critique : Pour construire le scénario de son thriller écologique, le cinéaste Farid Bentoumi et ses collaborateurs se sont largement inspirés du cas de l’usine de Gardanne qui rejette des déchets polluants dans la mer Méditerranée depuis des décennies (consulter le dossier complet ici). Ils ont choisi de transposer cette histoire dans les montagnes de Savoie afin de permettre une visualisation plus marquante encore des effets des boues rouges. Cela donne d’ailleurs lieu à la scène la plus spectaculaire du film lorsque les personnages parviennent aux abords de la zone polluée ici appelée « le lac ».

Rouge, photo 1

© 2020 Les Films Velvet – Les Films du Fleuve. Tous droits réservés.

Toutefois, si le long-métrage s’inscrit dans une certaine tradition américaine du thriller écologique comme autrefois Erin Brockovich (Soderbergh, 2000) ou plus récemment Dark Waters (Haynes, 2019), Rouge entend embrasser de nombreux thèmes annexes afin de dresser un constat plus large sur la société française et ses évolutions. Le titre lui-même est polysémique puisqu’il évoque aussi bien les rejets toxiques de l’usine que les liens du sang qui unissent les membres d’une famille, ainsi que la couleur attachée à un certain engagement politique et syndical. Ce sont ces trois dimensions – écologique, psychologique et politique – que Farid Bentoumi compte évoquer dans son deuxième long-métrage de fiction.

Vers une prise de conscience écologique

Le plus classique vient de l’intrigue écologique proprement dite puisque le spectateur découvre en même temps que l’héroïne les dessous peu reluisants d’une usine chimique où elle vient d’être embauchée comme médecin du travail par l’entremise de son père, pilier syndical du lieu depuis une vingtaine d’années. Guidé par les découvertes successives de l’héroïne, le spectateur peut pleinement s’identifier aux interrogations de celle-ci, tiraillée entre son devoir de médecin et de citoyenne et sa loyauté envers un père qu’elle chérit et admire depuis toujours. Si la progression du personnage vers une prise de conscience affirmée est aidée par une journaliste écolo (très solide Céline Salette), elle répond à une trajectoire classique.

Rouge, photo 2

© 2020 Les Films Velvet – Les Films du Fleuve. Tous droits réservés.

Toutefois, dans cette implacable démonstration qui vise à une prise de conscience collective, on apprécie que Farid Bentoumi donne la parole aux contradicteurs. Ainsi, le spectateur peut se faire sa propre idée, même s’il est fortement invité à embrasser la cause de l’écologie. Bentoumi démontre ainsi le poids de ces grandes entreprises qui font vivre parfois un bassin d’emploi complet depuis des décennies. Il insiste sur les compromissions des édiles, mais ne fait pas preuve de simplisme et montre que l’entreprise est également soutenue par les ouvriers eux-mêmes qui tiennent à sauver leur emploi en période de crise. Ainsi, couler une entreprise gigantesque pour des raisons écologiques peut avoir des conséquences catastrophiques sur un bassin d’emploi entier.

Rouge pose toutes les composantes du débat

Au détour de quelques scènes, le cinéaste explique également pourquoi bon nombre d’ouvriers se sont détournés des partis de gauche ou des écologistes au profit du Rassemblement national qui capitalise sur le désarroi des plus faibles à des fins électoralistes. Certes, Rouge ne dissimule aucunement l’orientation de son point de vue, mais le script est suffisamment malin pour évoquer même les limites du combat pour l’environnement, entre des députés verts corsetés par les réalités économiques du terrain et les extrémistes qui ne font que brouiller le message environnemental.

Au milieu de tout ceci, Rouge est aussi l’histoire d’une famille qui se déchire pour des raisons de divergences politiques. Alors que le vieux syndicaliste incarné avec beaucoup de force et de nuances par Sami Bouajila a fini par accepter toutes les compromissions afin de préserver son outil de travail, sa benjamine jouée par Zita Hanrot se découvre une âme de lanceuse d’alerte, presque contre son gré. Le déchirement de ces deux êtres qui s’aiment d’un amour filial absolu s’avère poignant et révèle ainsi l’ampleur de la fracture qui peut parfois s’immiscer à l’intérieur de la sphère familiale.

Un thriller anticapitaliste efficace

Loin de tout ceci, les responsables de l’usine – abject Olivier Gourmet, toujours aussi juste – mènent la danse en exploitant la crédulité de leurs salariés, maquillant les problèmes de santé du personnel et réglant les problèmes à coup de corruption. Cette vision sans concession d’un certain capitalisme entrepreneurial a le mérite de dénoncer un état de fait encore trop souvent étouffé.

Efficace et très pertinent, Rouge est donc un très bon thriller écologique qui met le doigt sur de nombreux problèmes actuels avec un vrai sens de l’analyse, par-delà ses prises de position partisanes. Le métrage a fait partie de la sélection de Cannes 2020 annulé pour cause de pandémie. Sa sortie a également été repoussée au mois d’août 2021.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 11 août 2011

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Rouge de Farid Bentoumi (affiche)

Bande-annonce de Rouge

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