Damien Chazelle est l’un des jeunes prodiges hollywoodiens des années 2010. Il est couronné d’un Oscar du Meilleur réalisateur pour son troisième long métrage, le légendaire La La Land.
Les Français adorent ramener Damien Chazelle à ses origines françaises, puisque, bien que né aux USA dans le Rhode Island, son père, lui, est un Bernard né à Clamart, dans les Hauts de Seine.
Whiplash, un choc, de Sundance aux Oscars
Passionné de jazz et de cinéma, Damien Chazelle envisage une carrière de batteur, mais son expérience dans l’école de Princeton, lui inspire son premier “grand” long en tant que cinéaste, Whiplash. S’il a réalisé Guy and Madeline on a Park Bench, production indépendante en 2009, déjà apprécié et porté par ses thèmes favoris -, Whiplash est son premier tour de force, un coup de maître qui lui vaut le Grand Prix du Jury et le Prix du Public au festival de Sundance. Le film intense, avec Miles Teller et J.K. Simmons en têtes d’affiche, aurait dû lui ouvrir la porte pour des projets de blockbusters super-héroïques, tendance systématique des années 2010. Mais c’est sans connaître la détermination du jeune cinéaste. Certes, pour faire son trou à Hollywood, il a accepté de donner dans l’alimentaire. Il torche le script du Dernier Exorcisme : Part II, en 2013, ou participe à la réécriture de séquences de 10 Cloverfield Lane qu’il refuse de réaliser pour s’atteler à Whiplash. Bien lui en a pris, le jeune trentenaire décrochera cinq nominations aux Oscars et trois récompenses des mains de l’Académie.
Damien Chazelle, un cinéaste vintage qui dit non aux genres de son époque
Pour son troisième film, Damien Chazelle bouscule les modes et érige Hollywood en décor héroïque. Il tourne une authentique comédie musicale à l’ancienne, avec un budget de 30M$ qu’il transcende par ses visions d’artiste polyvalent, et notamment de scénariste qui maîtrise toutes les formes de son art. Ryan Gosling et Emma Stone l’accompagnent dans ce projet aussi coloré que fou, marqué par la musique de son ami depuis l’âge de 18 ans, Justin Hurwitz, qui sera de ses cinq premiers longs métrages. L’hommage aux classiques des années 40 s’accompagne aussi de son amour pour le cinéma de Jacques Demy, et notamment Les demoiselles de Rochefort.
© Bold Films, Blumhouse Productions, Ad Vitam
Français et francophile, le jeune Américain séduit par la démesure de son style, ses ambitions qui refusent la facilité des effets numériques, pour coller au plus près de la féérie d’un âge d’or du cinéma. La La Land empoche plus de 400 millions de dollars dans le monde et pléthore de prix prestigieux, dont l’Oscar du Meilleur réalisateur. L’Académie essaie de rajeunir les heureux élus et de corriger les flagorneries d’un autre temps. L’espace de quelques secondes, sur la scène de la cérémonie, La La Land est sacré Meilleur film, à la suite d’une bévue de Faye Dunaway, quand le gagnant est en fait Moonlight… Une raison de plus pour faire rentrer Damien Chazelle dans l’histoire du cinéma.
Damien Chazelle sur le tournage de Babylon (2022) © 2022 Paramount Pictures
En 2018, Damien Chazelle poursuit dans les stratosphères du génie, avec le méconnu First Man, le premier homme sur la Lune, adapté d’une biographie de Neil A. Armstrong. Il engage son pote Ryan Gosling à bord de la mission Apollo 11. Le talent est palpable et loué par les critiques, mais les producteurs restent sur leur faim, avec un échec mondial. En France, la superproduction Universal séduit 800 000 sélénites contre 2 800 000 pour La La Land. Le crash est évident.
Après l’échec de First Man, la flamboyance et le défi de Babylon
A l’issue de cette contreperformance, Chazelle accepte une offre Netflix et tourne les deux premiers épisodes d’une mini-série, The Eddy (2020). Coproduit par la France, l’événement met en scène un casting international, avec notamment Leïla Bekhti, Tahar Rahim, pour la France, et André Holland (Moonlight), pour les Etats-Unis.
En 2022, il sort aux USA Babylon, une réponse très attendue à son La La Land. Cette nouvelle super production de 80M$, avec Brad Pitt, Margot Robbie, et Tobey Maguire révèle également le talent de Diego Calva, qui devient une vedette du jour au lendemain. Le casting foisonnant est à l’instar de ce tribut au Hollywood non-censuré par le futur Code Hays des années 20, flamboyant. Voulu par le studio Paramount comme une bête à Oscars, Babylon démontre une fois de plus l’ardeur de Damien Chazelle et de son acolyte de toujours, Justin Hurwitz, pour un cinéma original, ambitieux, loin du tout numérique du Hollywood contemporain.
© 2022 Paramount Pictures