Note des spectateurs :

Tu as connu les années 90 ? Alors séquence nostalgie… Retour sur les hits TV, ciné et musique de la deuxième semaine de juillet 1999. Inclus, de la musique improbable, de la franchouille à la TV, des émissions bidons, des teen movies, Disney déjà puissant, Star Wars, Ryan Phillippe, la famille Hallyday, mais sans mention – ou presque- de Laetitia, Jennifer Lopez so sexy, Chuck Norris déchu à la télé. Bonne nouvelle, BFM TV ne formatait pas les esprits, puisque la chaîne dirigée par Marc Olivier Fogiel n’existait pas…

Vingt ans déjà : à fond la ringardise télévisuelle…

En juillet 1999, faute d’internet à la maison, l’on regardait en famille la série Tramontane qui triomphait sur TF1. Les chaînes rediffusaient les comédies populaires comme Le Gendarme de Saint Tropez (France 3), La Cage aux Folles (TF1), La vie dissolue de Gérard Floque (TF1), et même On n’est pas sorti de l’auberge de l’inénarrable Max Pécas…

Walker Texas Ranger avec Chuck Norris, l’ancienne gloire de la Cannon, désormais persona non grata au cinéma, faisait le prime sur la Une le samedi, Derrick sur la 3, tous les dimanches, Thalassa, Jeux sans frontières, Sagas, Fort Boyard et Capital assuraient les audiences… En fait, en y rependant bien, pas de quoi rallumer un téléviseur, même avec pincement de coeur pour le temps passé, après tout les programmes n’allaient pas au-delà de la 6e chaîne. Et internet n’en étant qu’à son balbutiement, il ne fallait pas compter sur de vraies alternatives. Pixels et définition de basse qualité caractérisaient la World Wide Web.

Copyrights 1999 Matrix – Warner Bros / Cruel Intentions – Sony Pictures

Les Teen movies étaient partout, leurs jeunes gloires aussi

Aux USA naissait le phénomène American Pie, numéro 1 incontesté qui basculait les blockbusters d’action, confirmant le phénomène teen movie dans tous les secteurs, suite au succès fracassant de Scream. Le film se classe alors devant Wild Wild West avec Will Smith. Disney dépassait les 100 millions de dollars de recettes avec Tarzan quand Star Wars et sa Menace fantôme ringarde empochait 385 000 000 pour sa 8e semaine. Austin Powers 2 était énorme avec 182 000 000 en 3 semaines.

Matrix et la révolution matricielle du cinéma numérique

Au cinéma, les nouveautés étaient peu remarquables, à part La dilettante de Pascal Thomas qui apportait la gloire à Catherine Frot. Jude Law floppait dans Le Cygne du destin (sic), Fog de Carpenter connaissait une reprise sur 3 MK2 parisiens (plus de 2 400 entrées en première semaine), Vorace de la regrettée Antonia Bird surprenait, Wishmaster 2 jouait la carte de la série B d’exploitation et Wing Commander (adaptation d’un jeu vidéo, comme Street Fighter et Mortal Kombat) démontrait un peu plus la fadeur du pseudo phénomène pour midinettes Freddie Prinze Jr qui s’est depuis reconverti dans la cuisine.

Evidemment, aucunes de ces nouveautés ne faisaient le poids par rapport aux continuations, La Dilettante ouvrant seulement en 9e place avec 62 000 entrées France, devenant le sleeper de l’été.

Il fallait donc s’appeler Matrix pour régner en dieu tout puissant sur l’Hexagone. Keanu Reeves, un peu mou depuis les succès lointains de Point Break, Entretien avec un vampire et Speed, était au sommet de la gloire, avec 3 millions d’apôtres en 3e semaine, et un total à venir de 4 700 000 spectateurs (et même 5 600 000 entrées pour le sequel Reloaded). Le film était paru aux USA en mars et avait révolutionné les effets spéciaux et la mise en boîte de scènes d’action, sublimant le cinéma d’action asiatique auquel il rendait hommage. Matrix ne ressemblait qu’à lui-même, avec sa narration ésotérique et son débordement de créativité aux abords du nouveau millénaire. Pas de doute, on n’allait pas attendre la République en Marche pour entrer dans le “nouveau monde”.

Le film était aussi le point de départ d’une trilogie par les Wachowski, deux frères qui allaient devenir eux-mêmes des entités liées à tout jamais à ce coup de génie. Ils ne réitéreront jamais l’extase de ce concept d’une vie en dehors de cette trilogie.

Retour au teen-movie, puisque début juillet, c’était aussi une bonne passe pour la version jeune des Liaisons dangereuses, Sexe Intentions avec Ryan Philippe (son Studio 54 était distribué une semaine plus tard) et Sarah Michelle Gellar de la série Buffy et les vampires, qui flirtait avec le million en 3e sememaine.

Dans le top 20 également, on citera The Faculty, triomphe post-Scream, de Roberto Rodriguez, qui s’approchait du million cinq cent mille lycéens.

On finira cet aperçu de l’actualité cinéma du début du mois de juillet 1999 avec Tout sur ma mère. Le classique d’Almodovar était au firmament du palmarès du cinéaste avec 1 597 000 fidèles. Le drame allait devenir le premier long de l’auteur ibérique à dépasser les deux millions d’entrées en France. Par la suite, seuls Parle avec elle et Volver feront mieux.

Les multiplexes tuaient les petits écrans

Nouvelle donne. En 1999, quand un cinéma n’était pas un multiplexe, sa fréquentation périclitait. La fin des années 90 voyait l’apparition de nombreux méga-machin-chose en périphérie des grandes villes, et dans un contexte parisien particulier, UGC commençait un règne sans partage avec son concept des “Ciné Cité”, parfaitement rodé à la carte illimitée.

L’UGC Ciné Cité les Halles conservait largement la tête de l’exploitation sur Paris, position de leader que le site ne perdra jamais et qu’il élargira à l’échelle européenne. Le Ciné Cité Bercy suivait, le cinéma était tout neuf !

Le Rex, symbole d’une époque déclinante, était lui 10e des cinémas franciliens les plus fréquentés.

Les Kinepolis Lomme et St-Julien faisaient le plein dans le reste de la France, pour ne pas oublier le reste de la France, prise de fièvre pour les multiplexes Pathé et CGR.

Et la musique dans tout cela ? De la dance et du RnB bon marché…

L’été étant période de légèreté, les sons improbables et CD deux-titres à fort potentiel pour les vide-greniers contemporains, alimentaient les radios et les music stores très puissants. Virgin et Fnac faisaient la pluie et le beau temps. Amazon et Itunes n’étaient alors que des chimères. Itunes et l’Ipod n’existaient pas. Les maisons de disques battaient tous les records de vente et les radios avaient leurs mots à dire dans le succès d’un artiste et à la télé, les émissions de variété n’avaient pas encore démarré un processus de déclin.

Dans ce contexte d’euphorie, au top 50, David Hallyday, qui doit cohabiter dans le coeur de son paternel, depuis trois ans, avec une belle-mère plus jeune que lui de dix ans, perdait la première place avec Tu ne m’as pas laissé le temps. Il faut dire que le phénomène Zebda tombait la chemise à sa place. Jennifer Lopez faisait mouiller le T-shirt avec If you had my love en 5e place. Lopez l’actrice devenait vraiment chanteuse.

1999, c’était la fin de la décennie de la dance music (ATB, Eiffel 65, Vengaboys…), qui était peu à peu remplacée par des chansons à textes ringardes (Moos et Au nom de la rose), Lââm, Larusso,..

Les stars s’appelaient Will Smith, chanteur à ses heures perdues, Britney Spears ado s’apprêtait à lancer un deuxième single, Ricky Martin n’était pas encore sorti du placard et vendait des singles à la pelle, Whitney et Johnny étaient vivants en 10e et 22e place, Madonna entre deux albums lâchait Beautiful Stranger, la plus grosse progression de la semaine (+38) et Cher réussissait à classer deux morceaux (Strong enough et All or Nothing).

Quant à Farmer, elle voyait Je te rends ton amour s’effriter en 6e semaine. Un single plus que mineur qui n’allait même pas la conduire au-delà de la 10e place, malgré les éditions limitées. L’album Innamoramento sorti trois mois plus tôt se vend pourtant très bien, mais les singles un peu moins que prévu.

Vingt ans plus tard, quid d’Organiz, d’Ann Lee, de TLC, et même de Tarkan? Les trois quarts des prétendants à la première place du top 50 ont disparu. On ne s’en porte pas plus mal.

Culte, Manu Chao atteignait sa meilleure place avec Bongo Bong, je ne t’aime plus, devenu depuis un hymne indémodable, malgré une incapacité à aller au-delà de cette triste position qui démontrait la nullité des hits parades d’une fin de décennie caractérisée par une sur-représentation des succès éphémères à caractère ludique et festif.

Bref, c’était la deuxième semaine de juillet et l’on ne parlait pas de dérèglement climatique, la France était même plutôt optimiste, fait rare dans son histoire.

On notera que le piratage était déjà une préoccupation pour les maisons de disques et les studios d’Hollywood, et pour cause, il fallait attendre 6 mois après la sortie américaine d’un film pour le voir débarquer dans nos salles (cf. La Menace fantôme qui allait finir sa carrière mondiale chez nous, en octobre 1999!). Oui, 6 mois, voire plus… Etre jeune, cinéphile et connecté, en cette année, cela nécessitait de la patience. Beaucoup de patience.

Critique : Frédéric Mignard